Relativisme en matière médiatique et politique
C’est une histoire de relativisme moral en matière politique. Ainsi l’article suivant du journal Le Monde où des opposants à l’extrême-droite et au fachisme espèrent un sursaut des électeurs roumains et une défaite de l’extrême-droite. Mais tout ceci n’est-il pas que relativisme moral de la part des journalistes du Monde ?
Relativisme forcément puisque des journaux italiens du même bord politique que la dirigeante italienne populiste Georgia Mélonie titrent probablement, de manière absolument opposée, que la Roumanie avait une chance d’échapper à la gangrène de la corruption en rejoignant l’Italie et la Bulgarie dans le club des pays ayant succombé aux sirènes du populisme.
Comment des pures opinions politiques peuvent-elles prospérer dans la sphère médiatique, sous la plume de journaux qui se disent déontologiquement irréprochables ? Parce qu’il n’y a apparemment qu’un seul secteur politique dans lequel le relativisme moral en matière politique semble être la norme, pour empêcher la survenue de l’extrême-droite. Ils ont échoué en Bulgarie, en Italie : ils n’échoueront pas en France ou en Roumanie ! «No Passaran », semble dire Le Monde.
Le problème, c’est qu’en citant les problèmes de corruption et de prévarication des élites administratives et politiques, Le Monde explique et quantifie non seulement le phénomène de corruption des elites et des forces de l’ordre, mais surtout il favorise le développement des idées d’extrême-droite. Tous pourris disent-ils.
Évidemment, Le Monde et les médias bien-pensants se régalent avec les multiples condamnations du Rassemblement National et de ses alliés par la justice française sur l’utilisation des fonds européens et pour financement illégal de partis politiques. Ils titrent vraisemblablement bien plus sur les condamnations touchant le Rassemblement national que pour les autres affaires. Ils se régalent des réactions outragées de Marine Le Pen qui risque de devenir inéligible pour la prochaine élection présidentielle. Mais probablement que tout autre homme ou femme politique condamné a également des réactions outragées que Le Monde ne reproduit pas article après article. Nicolas Sarkozy doit aussi avoir des réactions outragées sur lesquelles Le Monde reste moins disert.
Tout ceci n’est pas très déontologique. Dès lors que le traitement médiatique accordé à une affaire diffère du traitement des autres affaires du même type, ne devrait-on pas se dire que la déontologie d’un média comme Le Monde est atteinte ? Entamée ? Bafouée ?
Surtout que tout ceci risque d’être sans effet sur le développement du vote d’extrême-droite ? L’extrême droite se nourrit de toutes les inquiétudes d’une partie de la population.
- Des vols et des agressions qu’ils voient autour d’eux et qui demeurent impunis.
- De la justice qui semble si laxiste à l’encontre de tant de petits délinquants, des auteurs de cette petite délinquance quotidienne qu’il est si difficile de pénaliser mais qui empoisonne la vie de tant de personnes.
- Des agriculteurs et petits entrepreneurs qui se sentent corsetés par les multiples normes et règles qui les accablent et qui ne comprennent pas les réactions autour de la loi Duplomb. L’extrême-droite va se nourrir de cet épisode qui démontre aux yeux de ses électeurs que jouer selon les règles du jeu ne permet pas de s’en sortir.
L’exemple roumain s’est bien sûr bien terminé pour les démocrates de tout bord. Malgré la domination de l’extrême-droite roumaine au premier tour, le candidat pro-européen l’a emporté au second tour, après une première annulation du scrutin présidentiel par une justice défendant et prenant fait état cause pour les candidats pro-européens. La justice bulgare ou italienne interdirait et declarerait inéligible des candidats pro-européens ou annulerait une élection pour cause d’ingérence des autorités européennes, je pense que Le Monde y serait beaucoup moins favorable, beaucoup plus offensif.
Mais il semble normal d’interdire et de rendre inéligible un candidat encarté à l’extrême-droite, beaucoup moins pour les autres, même quand ils sont d’extrême-gauche. Comme il aurait été naturel pour tous ces démocrates assurés de rendre inéligible Donald Trump aux Etats-Unis. Même si pourtant il a largement gagné l’election présidentielle contre les democrates. En fait, le résultat du vote ne compte pas aux yeux des défenseurs de la démocratie. Le vote du peuple lui-même, imbecile à leurs yeux, ne compte pas. Seul compte leur idée de ce qui est bien et mal, de ce qui est la démocratie et de ce qui n’est pas la democratie. Ils se sont nourris de la survenue des nazis au pouvoir en Allemagne dans les années 1930 pour généraliser à tous ce qui représente l’extrême-droite.
Ce qui nous attend pour les prochaines années c’est probablement la poursuite d’une progression de l’extrême-droite lors des prochaines élections présidentielles françaises ainsi que dans d’autres pays. L’expérience roumaine rappelle que même largement devant, avec plus de 40% de votes au premier tour, les candidats d’extrême-droite peuvent toujours être vaincus par l’alliance de tous leurs opposants. Mais elle nous apprend aussi que ce qui favorise l’extrême-droite, c’est aussi l’importance de l’abstention ; le recul de l’abstention, réelle ou manipulée, a permis la victoire du camp pro-européen aux élections présidentielles roumaines. Que le pouvoir roumain a fait voter les morts ou bien que les électeurs roumains se soient réveillés, il n’empêche que l’extrême-droite y a été battue. Jusqu’aux prochaines élections.
Le vote pour le Rassemblement national sera également encore plus important lors des prochaines élections présidentielles. En fonction de l’abstention au premier tour, on risque d’avoir des scores extrêmement importants pour le candidat d’extrême-droite meme si la victoire au second tour ne sera pas encore assurée. Jusqu’à quand ? Faut-il craindre qu’immanquablement, l’extrême-droite l’emportera dans pratique chaque pays européen ?
Ou bien faut-il espérer que ce mouvement s’inversera grâce à la mise en œuvre de politiques qui ne nourrissent plus l’extrême-droite ? Sans même que je sache ce qu’il faudrait qu’il advienne. Après tout, le vote d’extrême-droite ne prolifère que chez ceux qui m’ont pas grand chose à craindre de la police, chez ceux qui ne violent pas l’ordre. Chez ceux qui estiment que la police est là pour les défendre avant toute chose, chez ceux qui respectent les lois qui ne sont pas imbéciles, qui ne volent pas, qui ne cassent pas, qui ne truandent pas.
Ce sont aussi ceux qui ne se sentent pas concernés par la faim dans le monde, par la souffrance des autres et qui regardent d’abord leurs difficultés sans s’intéresser à celles des autres, de ceux qui vivent à l’autre bout de la Terre. Avec raison d’ailleurs, nul ne sait si leur misère est pire que la leur.
Notre fenêtre sur le reste du monde repose sur les informations de journaux comme Le Monde ou les journaux télévisés, et ceux-ci nous manipulent en fonction de leur idéologie, des priorités qu’un groupe, qu’il soit l’actionnaire, la communauté des journalistes, un rédacteur en chef, a arrêté. Cette fenêtre sur le monde est ainsi totalement factice. Elle ne repose probablement sur rien de concret. Imaginez que la presse décrive votre propre petit pays et vous pouvez être certains que ce qu’ils en raconteront n’aura rien à voir avec votre réalité, avec ce que vous en connaissez. Les héros dont ils chanteront les louanges seront probablement des truands ou des assassins dont la légende leur sera parvenue par ceux-là même qui y ont intérêt.
Nous avons cru que nous pourrions découvrir le monde à travers les médias et la télévision. Et nous sommes juste manipulés par tous ceux qui sont sensés nous informer factuellement.
Saucratès
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