Regard pessimiste sur l’état des finances publiques françaises
Quel est l’état de l’économie française ? Question compliquée s’il s’en faut. La lecture d’un éditorial de Marc Touati dans le média Capital en donne une certaine idée. En un mot, la situation de l’économie française est catastrophique.
M. Marc Touati est à mon sens un ultra-libéral pur et dur, économiste, président du cabinet ACDEFI, conseiller économique d'eToro. Le cabinet ACDEFI («Aux commandes de l’économie et de la finance») est un cabinet de conseil économique et financier indépendant que Marc Touati a créé en 2007. Avant 2007, Marc Touati était le directeur de la recherche économique financière du groupe des Banques Populaires et de Natixis.
L’analyse de la situation catastrophique de l’économie française par M. Marc Touati est-elle excessive ? Dans un sens, cette analyse est exagérée pour l’instant. Certes, le déficit public est inquiétant, se positionnant depuis plusieurs années autour de -6% du PIB. Le niveau de la dette française à près de 130% du PIB est tout autant problématique, surtout dans un climat de renchérissement des taux d’intérêt de la dette publique.
Mais le couplet sur les comparaisons internationales pose problème. Il y a peu, une dizaine de pays européens faisaient l’objet d’une procédure pour déficit excessif, et là, M. Touati nous indique que seule la France est désormais poursuivie. Pourquoi pas. Mais ce sont les comparaisons en terme d’écarts de taux (encore appelés spreads de taux) avec la Grèce ou avec l’Allemagne qui interroge. Le spread de taux avec la date allemande a toujours dépassé un demi-point de taux. À ce jour, un spread de taux de 0,8 à 0,9 point avec l’Allemagne est donc à peine plus important que son niveau historique moyen. Certes, ce spread de taux à tendance à progresser légèrement, mais son évolution n’est pas aussi cataclysmique que M. Touati voudrait nous le faire croire.
On découvre ainsi que la situation a été bien pire en 2012-2013 ainsi qu’en 2007. La comparaison qu’il effectue avec la Grèce ou le Portugal est tout aussi problématique. Il fait comme si la Grèce ou le Portugal étaient toujours dans une situation aussi catastrophique qu’en 2012-2013 lorsqu’ils ne trouvaient plus à emprunter qu’à des taux dépassant 20%. Si le spread de taux de la France s’approche voire dépasse le spread de taux de la Grèce ou du Portugal, c’est d’abord le signe d’une bonne santé des économies grecque ou portugaise plus qu’un mauvais indicateur pour la France !
Il n’en demeure pas moins que l’impasse politique française pose problème. Ce n’est pas tant l’impopularité des uns ou des autres qui pose problème ; M. Macron demeure la moins pire possibilité de l’équation politique française, pour l’instant. S’il pouvait se représenter en 2027, il aurait des chances de pouvoir être réélu face aux extrêmes lui faisant face.
Non, le souci de la France est l’impasse politique actuelle. Le parlement est partagé entre trois camps inconciliables. La seule solution actuelle est l’immobilisme et cette situation est catastrophique avec une situation économique atone et un déficit s’élevant déjà à 6% du PIB. Un des trois camps, à gauche, veut mordicus des dépenses publiques croissantes et une hausse des prélèvements publics. Ce camp souhaite aussi un âge de départ à la retraite ramené à 62 ou à 60 ans. Les deux autres camps souhaitent des coupes dans les dépenses publiques et une baisse des prélèvements publics, mais ils sont incapables de se mettre d’accord. Et un des deux camps veut rétablir la retraite à 60 ans lorsque l’autre camp veut encore augmenter l’âge de départ à la retraite au-delà de 64 ans.
En somme des positions inconciliables qui interdisent toute prise de décisions pouvant nous tirer du précipice. Parce qu’au bout de quelques années avec un tel niveau de déficits publics, on va effectivement avoir de sérieux problèmes de légitimité et de crédibilité sur les marchés financiers. Très probablement lors d’une prochaine alternance politique si cette alternance politique fait arriver au pouvoir l’un des deux extrêmes aux responsabilités.
Il n’y a d’ailleurs que très peu de solutions envisageables pour se sortir de la situation de déficit public actuel. Si la situation économique s’améliorait au cours des prochaines années, on pourrait résorber ce niveau de déficit public en bloquant les dépenses publiques sans trop de casse sociale, et la hausse des recettes permettrait de réduire le niveau de déficit. Mais cette solution semble bien hasardeuse. L’inverse semble bien plus probable dans l’état actuel des tensions commerciales internationales.
Il va ainsi bien falloir baisser les dépenses publiques. Mais là aussi, les positions des camps en place divergent sur les dépenses publiques que l’on doit réduire. Les libéraux voudraient s’attaquer aux fonctionnaires, au poids des administrations et aux dépenses bénéficiant aux ménages, et ne surtout pas toucher aux nombreuses aides bénéficiant aux entreprises, comme notamment les milliards affectés au CICE. Pour préserver une supposée compétitivité des entreprises françaises même si on devine que le CICE ou son remplaçant sert avant tout aux dirigeants et aux actionnaires à se verser des confortables dividendes.
Le seul espoir de la France serait aujourd’hui la victoire d’un des trois camps en place. Au moins ce camp-là pourrait mettre en œuvre son programme, si tenter que ce programme puisse aider à rétablir la situation ! Après tout, M. Macron eut les pleins pouvoirs de 2017 à 2024 et on voit bien l’absence de résultats qui en a résulté. Tout comme sous les socialistes entre 2012 à 2017.
Il en irait d’ailleurs tout autant en cas de victoire électorale d’un deux camps des extrêmes. Par ailleurs, une majorité électorale aurait toutes les chances d’exploser devant les difficultés qui s’accumuleraient et les sacrifices à consentir. Avec une fraude d’une partie de la majorité comme cela a pu être observé entre 2012 et 2022.
En un mot, suis-je pessimiste sur les possibilités de la France de redresser ses finances publiques ? Pessimiste ou sans aucun espoir ? Merci de vos analyses personnelles, mes chers lecteurs et lectrices. À vous de m’éclairer.
Saucratès
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