Critiques de notre temps

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Retour sur l'économie - La fièvre ultralibérale des privatisations

Saint-Denis de La Réunion, mercredi 19 juin 2019

 

Quelques mots de retour sur la science économique. Au-delà de l'actualité politique francaise du moment, j'observe actuellement un grand retour de l'ivresse ultralibérale, ce sentiment de la toute-puissance de l'argent et du capital comme lors du retour de la droite dans les années 1986-1988. Le retour du centre-droit au pouvoir en France, même s'il a pu sembler imperceptible en comparaison des années d'ultralibéralisme triomphant sous les socialistes en 2012-2017 (mais ce sont en fait les mêmes hommes plus ou moins qu'on trouvait au pouvoir entre 2012 et 2017 et depuis 2017), nous ramène maintenant à l'époque ultralibérale anglo-saxonne, aux années TINA de Margareth Tatcher («There is no alternative»). Je veux évidemment parler du grand retour de la fièvre des privatisations. 

 

Je veux parler évidemment des privatisations des Aéroports de Paris (ADP) et de la Francaise des Jeux (FDJ), mais pas seulement. Qu'est-ce qui est à l'œuvre derrière ces deux volontés de privatisations ? Répondre à l'appétit d'investisseurs étrangers ou nationaux friands d'ex fleurons monopolistiques, à des prix bradés et au potentiel de développement invraisemblable ? Répondre à une volonté munichoise ou bruxelloise de détruire des monopoles nationaux sous le prétexte que la mise en concurrence et la constitution de firmes privées est forcément toujours mieux pour le consommateur. Même si des centaines de contre-exemples comme dans le domaine de l'électricité ou le rail, devrait suffire à démontrer aux hauts fonctionnaires européens que le consommateur n'est jamais le gagnant dans les remises en cause des monopoles publics. Mais Bruxelles en a-t-elle quelque chose à faire ? Les hauts fonctionnaires européens détruisent-ils les monopoles étatiques par pure idéologie aveugle ou par pur intérêt financier, parce qu'ils trouvent ensuite à être employés par ces mêmes groupes ou ces mêmes entreprises qu'ils auront régulièrement avantagé ? Ou bien pour une quelconque autre réponse, comme de répondre à un mandat donné à ce Président et à ce gouvernement que quelques intérêts privés ont porté au pouvoir pour y effectuer certaines tâches ? 

 

Mais quand je parle de fièvre de privatisations, je pense à une volonté maladive de se partager la dépouille des services publics français. Il n'y a pas longtemps, j'entendais qu'une fraction non négligeable  de députés interrogeaient la pertinence de la privatisation du domaine autoroutiers français, cédé puis concessionnellement reconduit pour des bouchées de pain à des groupes comme Eiffage, Bouygues ou Vinci, et qui assurent la rentabilité de ces groupes. Autrefois, on faisait construire et porter par des intérêts privés des investissements collectifs hasardeux (mais éventuellement rentables) qui furent nationalisés par la suite (je pense ici aux chemins de fer dans les années 1850-1900 entre autres exemples). Aujourd'hui, depuis quelques décennies, c'est le choix inverse qui est mis en oeuvre : on fait porter un secteur public le financement d'investissements publics en permettant aux intérêts privés de s'enrichir invraisemblablement au cas ces investissements deviendraient particulièrement rentables (cas des partenariats publics privés) ou d'en profiter ulterieurement. Deuxième choix ouvert par les privatisations : on fait financer par l'Etat des investissements publics qu'on revend ensuite pour une bouchée de pain à des interets privés pour qu'ils profitent des fruits et de leur rentabilité. C'est ce que l'on appelle la socialisation des pertes et la privatisation des profits. 

 

Ainsi, j'entendais hier soir sur France Culture que les sociétés autoroutières lorgnaient désormais aussi sur les routes nationales. Après avoir mis sous coupe réglée les autoroutes françaises, dont ils assument malgré tout une partie de l'entretien et peut-être de quelques nouvelles constructions, les groupes Eiffage, Vinci et Bouygues seraient désormais candidats à accroître leurs prédations, leurs prises de contrôle sur les routes nationales qui permettent de contourner ou de poursuivre les réseaux autoroutiers ! Bientôt, la France leur appartiendra et il nous faudra payer pour pouvoir sortir de nos maisons ou de nos appartements pour nous rendre à notre travail. Une mise en couple réglée de la France, sachant que nos routes nationales, comme nos autoroutes, ont été construites avec l'argent de nos impôts, des taxes que nous payons. 

 

https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-mardi-18-juin-2019

 

https://www.marianne.net/economie/chassee-par-la-porte-la-privatisation-des-routes-nationales-revient-par-la-fenetre-lrem

 

L'ultralibéralisme est en train de s'étendre en France, désormais sans aucune limite ni aucune prudence, comme si tels des vautours, tels des charognards, ils savaient que ce gouvernement lance la mise aux enchères de l'ensemble du patrimoine public, des services publics et des instruments du pouvoir régalien. À quand la vente de l'armée francaise aux intérêts privés ou de la police et de la gendarmerie, sous le prétexte fallacieux que cela coûte trop cher à entretenir ? Une armée, une police et une gendarmerie qui n'auraient plus alors à défendre que les intérêts du grand Kapital. Ou bien le fermage des impôts comme la TVA ou de l'impôt sur le revenu, comme sous l'Ancien Régime féodal ! 

 

Il se passe quelque chose de plus de malsain au sommet de l'Etat français. C'est comme si les interrogations exprimées par certains politiques sur l'intérêt de la privatisation des sociétés autoroutières conduisaient celles-ci à actionner leurs contacts, leurs taupes au sein de l'Etat pour s'octroyer une part encore plus grande d'un gigantesque pactole, supposément pour aider bénévolement l'Etat dans l'entretien de ce réseau routier. Et le pire, c'est que c'est ce discours qui risque de nous être servis par ce gouvernement aux ordres des intérêts privés, par Macron ou Philippe ! Jusqu'à ce que l'ensemble des routes françaises deviennent payantes, voire même l'utilisation des trottoirs !

 

(soyons honnête, le projet des sociétés autoroutières ne date pas d'aujourd'hui mais de 2014, à l'époque où les ultralibéraux socialistes tels Hollande, Valls et déjà Macron étaient encore au pouvoir)

 

Il faut faire barrage à ce vent, à cette tempête de privatisations, en bloquant déjà en premier lieu la privatisation d'ADP, en attendant de pouvoir bloquer les autres. Pour cela, il faut que 4,7 millions d'électeurs signent la pétition pour demander un référendum d'initiative populaire. 

 

https://www.20minutes.fr/politique/2542967-20190618-privatisation-adp-site-referendum-recolte-plus-125000-signatures-premier-jour

 

 

Saucratès



19/06/2019
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