Critiques de notre temps

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Censure

Qu’appelle-t-on «censure» ? Qu’est-ce que la «censure» ? Et comment se fait-il que toutes les formes de censures ne soient pas toutes considérées de la même manière, comme des formes de censures intolérables ? Existe-t-il une bonne censure et de mauvaises censures ? C’est en tout cas ce qui ressort de certaines visions ou interprétations médiatiques à la lecture de certains articles de presse. 

 

On peut déjà avoir l’impression que nous sommes rentrés dans une nouvelle ère de la censure généralisée. La lecture de plusieurs articles du journal Le Monde m’a fait ressentir cette sensation d’omniprésence de la censure tout autour de nous et de nos vies. Une multitude de causes semblant toute relever d’un seul et même phénomène : cette omniprésente censure. 
 
Qu’est-ce donc que la «censure» ? À lire Wikipédia, la censure est «la limitation de la liberté d'expression par un pouvoir (étatique, religieux ou privé) sur des livres, médias ou diverses œuvres d'art». 
 

Dans cette idée, la censure qu’estime subir l’artiste Jul, à savoir Julien Berjeaut, semble parfaitement correspondre à cette définition. Celle d’une censure du ministère de l’éducation nationale à l’encontre d’un ouvrage remis en cause parce que Jul ne donne pas la bonne image ni de la ‘Bête’, ni surtout de la ‘Belle’, avec «le grand remplacement des princesses blondes par des jeunes filles méditerranéennes» qui serait selon Jul «la limite à ne pas franchir pour l’administration versaillaise du ministère». 

 

https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/03/19/operation-un-livre-pour-les-vacances-le-dessinateur-jul-denonce-une-censure-de-l-education-nationale-pour-la-belle-et-la-bete_6583608_3224.html

 

Accessoirement, faut-il voir dans cette dénonciation de la censure du ministère de l’éducation nationale une conséquence, une contestation, de la perte financière que pourrait subir Jul du fait de la non sélection et de la non-publication de son adaptation pour l’ensemble des écoliers de CM2 de France et de Navarre ? 
 
Une deuxième série de faits rapportés par Le Monde tourne autour de la censure financière par des pouvoirs privés. Au fond, contraindre une organisation de défense de l’environnement comme Greenpeace à fermer en la condamnant à payer des centaines de millions de dollars pour diffamation au bénéfice de l’exploitant privé d’un oléoduc américain correspond à une certaine forme de censure, à l’américaine. 

 

https://www.lemonde.fr/planete/article/2025/03/19/greenpeace-condamnee-a-payer-plusieurs-centaines-de-millions-de-dollars-pour-diffamation-envers-l-exploitant-d-un-oleoduc-americain_6583637_3244.html

 

Dans un monde judiciaire comme le système américain, ce genre de condamnation et d’amende semble assez normal. Il semble plus incompréhensible dans un système judiciaire européen où des campagnes de dénigrement et d’harcèlement médiatique ne font courir aucun risque à ceux qui les pratiquent. Dans un monde où la sanction n’existe pas, mais où la moindre interdiction conduit les contestataires à se draper dans le costume du censuré, il doit leur paraître bizarre de voire une organisation comme Greenpeace être condamnée de cette manière et risquer de disparaître parce qu’ils ne voudront surtout pas payer, ni ne pourront payer.

 
Dans le même ordre d’idées, le refoulement d’un chercheur français du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) à son entrée aux Etats-Unis parce qu’il avait critiqué la politique menée par Donald Trump en matière de recherche semble poser problème. Mais cette censure, si elle s’appelle «censure», n’émane même pas de Donald Trump lui-même mais du FBI et des autorités américaines qui s’estiment autorisées à ne pas laisser rentrer aux Etats-Unis un critique acerbe de la politique américaine. Surprenant pour un pays comme la France qui ne surveille pas ses frontières, ne sait pas reconduire à la frontière sans intervention suspensive d’un juge administratif, et qui n’oserait jamais agir de la sorte.

 

https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/19/etats-unis-un-chercheur-francais-refoule-pour-avoir-exprime-une-opinion-personnelle-sur-la-politique-menee-par-l-administration-trump_6583618_3210.html

Au fond, aux Etats-Unis, la sacro-sainte liberté d’expression n’est pas une arme dont peuvent user les étrangers au détriment des Etats-Unis, de son président ou de ses industriels, alors qu’en Europe, cette liberté d’expression est surtout réservée à nos ennemis de l’extérieur ou de l’intérieur. 

Si on parle de bonne censure, on ne peut ignorer la censure politique mise en œuvre en Roumanie pour sécuriser le droit des roumains a demeurer dans l’Union européenne, ou bien, inversement et plus probablement, ne pas remettre en cause l’intérêt de l’Union européenne à conserver la Roumanie au sein de là construction européenne. Et tant pis si pour cela, la justice roumaine doit violer le droit à des élections libres en interdisant les candidatures de candidats d’extrême-droite comme Calin Georgescu et Diana Sosoaca.


https://www.lemonde.fr/international/article/2025/03/15/roumanie-apres-calin-georgescu-une-autre-candidate-d-extreme-droite-exclue-de-la-presidentielle_6581545_3210.html

 
S’agit-il encore de «censure» lorsque cette censure vise à défendre une démocratie et empêcher l’élection de candidats considérés comme dangereux pour le maintien de la démocratie ? Mais qui est autorisé à considérer et à juger de cette dangerosité démocratique ? Les mêmes réflexions et les mêmes considérations ne pourraient-elles pas conduire à exclure les candidats du Rassemblement national, au-delà des condamnations actuelles pour le parlement européen ? Que l’on soit favorable aux idées du Rassemblement national ou opposé, on appréciera ou on désapprouvera une telle décision. Il reste à savoir si ces mêmes décisions auraient réellement permis d’empêcher l’arrivée au pouvoir des nazis d’Adolf Hitler dans les années 1930 en Allemagne, et si la situation était réellement comparable. 

 

Se pose aussi la question de déterminer qui est légitime pour décider. Qui est capable de déterminer si telle ou telle demande est légitime ou illégitime ? Si telle démocratie est démocratique ou non, si sa demande est légitime ou non ? Ou bien s’il ne s’agit au fond là aussi que de censure ?

 

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2025/03/19/la-justice-francaise-refuse-les-demandes-d-extradition-vers-l-algerie-d-un-ancien-ministre-algerien_6583475_3212.html

 
 
Saucratès

 

 



29/03/2025
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