Critiques de notre temps

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Les affaires de Rugy et la fabrique de l'opinion publique

Saint-Denis de La Réunion, dimanche 14 juillet 2019

 

L'Etat de droit est en danger en France sous le gouvernement de Macron et Philippe. La décision du procureur de la République nommé par Macron (M. Rémy Heitz) de ne pas poursuivre trois membres de l'entourage d'Emmanuel Macron à l'Elysée pour parjure (à savoir MM. Patrick Strzoda, Alexis Kohler et Lionel Lavergne) ne peut pas se comprendre autrement sans se rappeler les circonstances de sa nomination décidée par Emmanuel Macron (cf. la tribune de Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit public à l'université de Lille, paru dans le Monde du 9 juillet 2019).

 

«On craignait alors que ce dernier (le président de la République) n'ait pour dessein de contrôler le plus important parquet de France. Avec la décision du même Rémy Heitz concernant les trois collaborateurs du chef de l'Etat, cette crainte paraît devenir réalité : la justice est aux ordres. Ce n'est pas seulement troublant, c'est alarmant pour notre démocratie.»

 

C'est particulièrement inquiétant dans un État de droit. Tout comme les poursuites menées contre les gilets jaunes depuis novembre 2018 sont également inquiétantes, tout comme inversement l'absence de poursuites à l'encontre de tous les agents des forces de l'ordre pour les agressions, les coups, les tirs injustifiés ... Mais ces forces de l'ordre sont les seuls remparts du pouvoir macroniste, et celui-ci ne peut se permettre de perdre le soutien des forces de l'ordre. Macron, en violation du respect de l'Etat de droit, utilise la violence publique pour faire peur, contraindre et combattre les manifestants et ses contestataires et adversaires, comme par exemple les gilets jaunes ou la CGT. Sans les forces de l'ordre, Macron et son gouvernement tomberaient car, à la difference de ses prédécesseurs, il n'a absolument aucune légitimité antérieure, ni même aucune légitimité aucune. Il a été élu en raison d'une intoxication médiatique, d'une manipulation médiatique de l'opinion publique. Et à ses côtés, on trouve toute une série de traitres de droite et de gauche qui ne représentent rien si ce n'est eux-mêmes et une certaine forme de politique et de milieu social ou de caste ! Ces gens-là n'ont aucune espèce de légitimité. Ils ne tiendront qu'autant que les forces de l'ordre continueront à les protéger, eux, et la République derrière eux. Que les forces de l'ordre laissent les manifestants marcher sur l'Elysée, et c'en serait fini du macronisme et de Macron.

 

Que penser par ailleurs de l'affaire, des affaires concernant François de Rugy, révélée par le site Mediapart ? Que les puissants, comme Macron en premier lieu, continuent de mener un grand train de vie aux frais des contribuables ? Tout en nous imposant réformes et cures d'amaigrissement, tout en nous demandant toujours plus de sacrifices ? Il eusse fallu être aveugle ou ignorant pour croire que les hommes politiques étant subitement devenus des anges et des ascètes, tout comme il serait idiot de penser que Macron ou Philippe sont des anges ou des ascètes. La conversation entre Philippe et de Rugy a dû être fort intéressante ! De Rugy disant à Philippe que tu fais tous les jours les mêmes dépenses et dérapages. Et Philippe lui répondant que toi, par différence avec moi, tu as été pris ... 

 

Et l'autre enseignement de cette affaire, c'est pourquoi de Rugy, et comment se fait-il que Mediapart s'en soit pris à de Rugy et à sa directrice de cabinet ? Comment cela se fait-il que Mediapart ait pu avoir des informations compromettantes sur de Rugy. Qui l'a vendu ? Pour quelles raisons ? Car l'arrivée de Macron au pouvoir a tarri les principales sources d'informations des médias. Mediapart a-t-elle enfin réappris à faire du journalisme d'investigation ? Ou bien n'a-t-elle simplement que pu bénéficier à nouveau d'informations venant d'un tiers mal (ou bien) intentionné ? 

 

Cette affaire démontre une chose principalement. Que les traitres comme de Rugy, comme tant d'autres, ne cherchent qu'une seule chose : profiter toujours plus de l'argent public pour leur plaisir personnel et celui de leurs collègues de caste. De Rugy faisait donc de petites fêtes privées fastueuses sur les fonds de la présidence de l'Assemblée Nationale. Et il avait aussi fait procéder à des travaux onéreux dans le logement de fonction luxueux qu'il occupait avec sa famille. Il occupait également un logement social depuis des années sans plus en avoir le droit, sans répondre aux critères pour occuper un logement social. Il avait d'ailleurs viré sa directrice de cabinet pour la même raison, la veille justement. Et enfin, le lendemain, on apprenait qu'il ne déclarait pas et ne payait pas ses impôts en 2015 ou 2016.

 

https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/07/14/francois-de-rugy-assure-qu-il-ne-se-laissera-pas-demolir_5489230_823448.html

 

Ces différentes affaires interrogent le rôle des médias, ce quatrième pouvoir dans une démocratie digne de ce nom. Des médias qui se sont tus ou qui étaient complices de la manipulation de l'opinion publique lors de la prise de pouvoir d'Emmanuel Macron, jusqu'aux incidents de la Place de la Contrescarpe à Paris. Des médias qui sont encore aveuglés par le pouvoir macroniste, opposés au mouvement des gilets jaunes dont ils guettent en permanence les moindres dérapages, les moindres fautes. Et surtout des médias qui ont une certaine image de la bonne politique, des bons partis détenant le pouvoir. Les médias français et plus largement européens adorent les partis de centre-droit ou de centre-gauche. Emmanuel Macron était ainsi le divin espoir de l'Europe, ayant battu/vaincu l'extrême droite française. On sait aujourd'hui que cette victoire était calculée, préparée, manipulée. Le regard médiatique sur les élections grecques du 7 juillet 2019 sont du même acabit. Les médias européens chantent ainsi la très nette victoire de Kyriakos Mitsotakis, du Parti de centre-droite Nouvelle Démocratie. «A plusieurs reprises ces dernières années, les Grecs se sont dangereusement approchés du bord de l’abîme. Les élections législatives, qui se sont tenues dimanche 7 juillet, sont, de ce point de vue, doublement rassurantes : elles marquent une maturité bienvenue de la vie politique grecque, parallèlement à l’amélioration de la situation économique, et s’inscrivent résolument dans le cadre de l’Union européenne (UE). Non seulement la Grèce se normalise, mais, après avoir été le précurseur de la crise en Europe, elle pourrait peut-être montrer la voie de la restructuration du paysage politique.»

 

Aux antipodes de la vision des médias sur son prédécesseur, Alexis Tsipras. «A gauche, la défaite du premier ministre sortant Alexis Tsipras était attendue : il paie ses promesses non tenues et surtout les douloureuses années d’austérité infligées par la profondeur de la crise grecque ... M. Tsipras sauve les meubles et, à 44 ans, peut mettre à profit cette période dans l’opposition pour construire un vrai parti de gauche moderne, structuré et solidement implanté, à partir de ce qui n’était à l’origine qu’un mouvement populiste radical. Syriza s’est assagi ...»

 

https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/07/08/la-grece-un-pays-normal_5486848_3232.html

 

Il importe peu que pour l'emporter, Kyriakos Mitsotakis ait menti à ses électeurs, qu'il est promis de renégocier l'obligation d'un excédent budgétaire de 3,5% imposée aux grecs par leurs créanciers européens. Programme électoral que les dirigeants européens, dès que celui-ci fut élu, porté au pouvoir, s'empressèrent de rappeler à l'ordre. Mais Kyriakos Mitsotakis avait déjà été élu. Ces partenaires politiques de centre droite ou de centre gauche se gardèrent bien d'ailleurs d'interférer au cours de la campagne électorale et de ramener  sa promesse à son caractère mensonger. Peu importe qu'il mente si ce dernier est un parti de centre-droit, voire de centre-gauche. Les seuls mensonges, les seules demi-vérités, combattus à tout prix sont celles émanant des partis d'extrême droite ou d'extrême gauche ; il suffit de lire le site des décodeurs du Monde ...

 

Il en va de même avec la couverture médiatique des élections italiennes et du leader de la formation politique populiste de la Ligue du Nord. Pour quelles raisons les médias européens ont-ils peur des formations populistes ? Et pourquoi donne-t-on ce nom de populiste à des partis politiques qui ont pour ambition de représenter le peuple et de s'appuyer sur le peuple pour arriver au pouvoir ou pour conserver le pouvoir ? Pour quelles raisons le fait de s'appuyer sur une minorité d'énarques, de cadres, de managers, d'enseignants ou de vieux rentiers (tout en manipulant la majorité des autres) est-il considéré comme préférable au fait de s'appuyer sur la majorité du peuple ?

 

Je ne peux pour ma part comprendre un tel traitement différencié de l'actualité et de la politique. Et une telle disproportion entre les traitements médiatiques des uns et des autres. Ce n'est plus de la démocratie dont il s'agit, mais d'une fabrique de l'opinion par le mensonge et la manipulation. 

 

 

 Saucratès



14/07/2019
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