Critiques de notre temps

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De l’évolution des sociétés - Introduction

De l’évolution des sociétés - Introduction

 

Par Saucratès 

 

Saint-Denis de La Réunion, vendredi 15 juillet 2022

 

J’ouvre un nouveau sujet d’écriture. Je souhaitais en effet vous parler d’évolution et de classification des sociétés humaines, comme je vous l’avais promis.

 

Comme je vous l’avais donc indiqué, l’idée est de savoir s’il est possible de retracer une évolution des sociétés humaines allant des premiers groupes de chasseurs-cueilleurs de la lointaine préhistoire, donc des premiers groupes d’humanoïdes, jusqu’aux sociétés humaines de notre modernité, de notre époque, qu’il s’agisse des sociétés occidentales modernes, technologiques et industrielles, qu’il s’agisse des sociétés russes, chinoises ou indiennes, qu’il s’agisse des Etats d’Afrique ou d’Amérique du Sud, ou bien tout simplement des divers peuples vivants en dehors ou à l’écart de ces divers Etats, comme certaines tribus amérindiennes vivant de chasse et de cueillette, comme les aborigènes d’Australie, les peuples Kong ou San en Afrique australe, les tribus pygmées d’Indonésie ou d’Afrique équatoriale, ou enfin les derniers peuples restés à l’écart du reste de l’humanité comme les peuples isolés des îles Sentinelles. 

 

Je vais donc vous parler d’évolutionnisme des sociétés humaines en me basant sur les théories exposées dans les différents livres d’Alain Testart. 

Mais avant cela, un certain nombre de points doivent être éclaircis ou explicités. 

 

A) Lorsque l’on parle d’évolution, on part du principe que les sociétés humaines que l’on pense les plus archaïques n’ont pas varié, n’ont pas évolué depuis les temps préhistoriques. Or, aucune société humaine, même celles que l’on croit les plus isolées, n’est restée à l’abri de toute influence d’autres sociétés humaines. Il n’existe probablement pas de tribus restées vierges de toute influence extérieure depuis la préhistoire.

 

B) Très vraisemblablement, les sociétés archaïques des peuples de chasseurs-cueilleurs (peuplades des îles Sentinelles au large de l’Inde, les indiens Guayakis d’Amazonie) ne constituent pas forcément les restes de sociétés primordiales mais elles ont pu également régresser, évoluer, par rapport à des formes de sociétés plus grandes, plus nombreuses.

 

C) S’il n’avait existé aucun autre peuple que ceux de nos civilisations occidentales, on aurait pu tout ignorer des formes anciennes d’autres formes d’organisations sociales. On aurait ainsi pu ignorer que les peuples préhistoriques vivaient de chasse et de cueillette.

 

D) On peut aussi se demander comment ont pu apparaître la démocratie primitive des anciennes cités grecques athéniennes ou spartiates, la démocratie primitive des anciens peuples germains avant qu’ils n’envahissent la Rome antique, ou l’organisation sociale sans chefs des peuples Sans en Afrique australe ou des aborigènes australiens ? Ces différents peuples ont-ils pu inventer à partir de rien ces formes de démocratie, ou bien ces formes viendraient-elles d’une forme d’organisation humaine plus ancienne, d’un fond immémorial de l’humanité ?

 

D) Ce que l’on appelle «histoire» n’est qu’une infime fraction de l’histoire totale de l’humanité et ce que l’on appelle «préhistoire» couvre la majeure partie de l’évolution des sociétés humaines, à l’exception des quelques derniers milliers d’années. L’histoire elle-même est née à Sumer, avec l’invention de l’écriture, il y a environ 5 millénaires. Les premières tablettes couvertes de signes cunéiformes sont datées de 3.200 avant JC à Uruk. Tout ce qui remonte avant ces cinq derniers millénaires constituent la préhistoire. 

E) Il existe deux méthodes pour dater et exprimer l’histoire ou la préhistoire. La première consiste à dater par rapport à l’an 0 de la chrétienté et l’on parle ainsi de date avant JC ou après JC. La seconde méthode pour exprimer les datations consiste à chiffrer par rapport à aujourd’hui, et on parle ainsi de datation BF («before present» - avant le temps présent). Ces deux formes de datations disent la même chose, mais elles ne doivent pas être confondues, plus de 2.000 ans les séparant. 

F) Il existe également de nombreuses méthodes de datation pour dater des fossiles, des fragments de poteries, des tablettes ou des papyrus. Les plus connues sont la dendrochronologie et la datation au carbone 14.

 

1-La dendrochronologie est une méthode pour dater les bois anciens grâce aux empreintes des cernes des arbres. Il existe des bibliothèques d’empreintes d’arbres permettant de remonter de plusieurs milliers d’années dans le temps, et de les dater à l’année près. La dendrochronologie permet de remonter jusqu’à des datations de 9.000 ans BF.

 

2-La datation au carbone 14 est une autre méthode pour dater des vestiges d’êtres vivants. Mais comme la dendrochronologie, elle ne permet pas de remonter très loin dans le passé. Au delà de 50.000 ans BF, cette méthode n’est plus assez précise. Le carbone 14 est un isotope instable du carbone ; le carbone 12 étant un isotope stable. Environ un million de millionième du carbone du monde est constitué en C14, et sa demi-vie est de 5.730 ans. Au bout de 5.730, la moitié d’un échantillon de carbone 14 aura disparu et se sera transformé en azote 14 (de manière stupéfiante, le carbone 14 est issu lui-même de l’azote 14 du fait des bombardements par des rayons cosmiques dans l’atmosphère). Les plantes absorbent indifféremment du carbone 12 ou du carbone 14, et celles-ci sont mangés par des animaux qui sont à leur tour mangés par d’autres animaux. Le carbone 14 se disperse ainsi chez tous les êtres vivants, et la proportion entre les deux isotopes C12 et C14 est à peu près la même que dans l’atmosphère.

 

A partir de la mort d’un végétal ou d’un animal, il n’y a plus de nouveaux apports de carbone et la proportion entre C14 et C12 va commencer à baisser dans les tissus morts. En mesurant cette proportion, en se basant sur la demi-vie du C14 de 5.730 ans, on peut ainsi dater précisément un reste ou un fossile d’être vivant.

 

https://www.cea.fr/comprendre/Pages/radioactivite/essentiel-sur-la-datation-au-carbone-14.aspx

 

3-Pour les datations au-delà de 50.000 ans ou bien concernant des vestiges non organiques ou non végétaux, il faut utiliser d’autres méthodes de datation comme par exemple la méthode Potassium-Argon, qui permet de dater des roches éruptives dans une fourchette de 100.000 ans à 10 millions d’années, en raison de la transformation de l’isotope Potassium 40 (K40) en l’isotope Argon 40 (Ar40). Dans ce cas, on ne cherche pas à mesurer la quantité de K40 dans une roche, puisqu’on ignore combien il y en avait au départ. Ce que l’on mesure, c’est la proportion de K40 et d’Ar40. Quand le K40 contenu dans un cristal décroît, l’Ar40, un gaz, reste piégé dans ce cristal. Si ce cristal contient autant de K40 et d’Ar40, on sait donc que la moitié du potassium s’est transformée. Il y a donc 1,3 milliard d’années que ce cristal s’est formé. S’il y a deux fois plus de K40 que d’Ar40, le cristal n’a que 650 millions d’années … Heureusement, l’Ar40 est également un isotope stable de l’argon.

 

Autre méthode de datation, la méthode Uranium 238-Thorium 234, dont la demi-vie est de 4,5 milliards d’années. À noter néanmoins que le Thorium 234 n’est pas un isotope stable, et qu’il va passer par 14 stades intermédiaires avant de se transformer en plomb 236, seul isotope stable de cette chaîne de transformation.

  

http://www.archeologiesenchantier.ens.fr/spip.php?article9

 

G) Si les premières cités humaines connues remontent à Sumer, il y a 5.000 ans, il existe néanmoins d’autres traces d’habitats humains antérieurs, que ce soit sur les bords de l’Euphrate, avant Sumer, remontant à 7.000 ans BF, ou que ce soit ailleurs, notamment dans les plaines d’Europe, avec des maisons constitués en ossements de mammouths.

 

Mais l’un des plus anciens vestiges archéologiques prouvés au monde est le site de Göbekli Tepe, en Anatolie, à la frontière syrienne, sorte de temple que l’on considère comme le plus ancien du monde, dont la construction et l’occupation remonte à près de 12.000 ans BF (à partir de -9.600 ans avant JC). Même si ce temple ne nous éclaire pas sur l’organisation sociale du peuple qui le construisit, qu’il nous renseigne au plus sur leurs croyances, il constitue néanmoins un marqueur intéressant de l’évolution des sociétés. Il y a 12.000 ans, bien avant les premières preuves connues de sédentarisation, bien avant les premières cités sumériennes, bien avant ce que l’on pensait être les premières cités humaines, des peuples avaient construit de gigantesques temples nécessitant une main d’œuvre nombreuse, preuve de sédentarité.

 

Sa construction est notamment contemporaine de la dernière période glaciaire appelée le Dryas récent, qui s’est étendue de 12.850 à 11.650 ans BF (10.900 à 9.700 ans avant JC). 

 

https://www.laterredufutur.com/accueil/un-ancien-temple-raconte-lhistoire-dune-collision-de-cometes-provoquant-lage-de-glace/

 
H) Enfin, dernièrement, j’aborderais dans les prochains articles ce que l’on appelle les systèmes de parenté. Il existe un certain nombre de système de parenté de par le monde. Ces systèmes reposent sur la manière dont Ego appelle ses apparentés.

 

- On appelle ainsi un système de parenté de type «eskimo» un système de parenté descriptif, dans lequel les termes «père», «mère», «frères» et «sœurs» ne s’appliquent qu’à une seule personne. Ce système de parenté est également celui de nos sociétés occidentales. C’est egalement un système dans lequel le même terme de «cousines» est utilisée pour désigner les cousines croisées (fille du frère de la mère et fille de la sœur du père) et les cousines parallèles (fille de la sœur de la mère et fille du frère du père).

 

- On appelle système de parenté de type «hawaïen» un système de type classificatoire dans lequel tous les individus de même sexe d’une génération sont désignés par le même terme de parenté. On l’observe notamment dans toute l’aire de peuplement malayo-polynésienne. Mais ce système ne distingue pas plus que le système «eskimo» les cousines croisées des cousines parallèles.

 

- On appelle système de parenté de type «iroquois» un système de parenté dans lequel il existe un terme différent pour les cousines croisées et un autre pour les cousines parallèles et pour les sœurs. Ce système a notamment été observé par L.H. Morgan chez les iroquois, mais c’est également ce système de parenté qui est observé en Australie.

 

- Enfin, on distingue également des systèmes de parenté de type «soudanais», «omaha» et «crow», qui sont proches du système «iroquois», mais qui different par les termes employés pour distinguer les deux types de cousines croisées (fille du frère de la mère et fille de la sœur du père).

 

Après vous avoir exposé ces quelques préalables, je vais pouvoir m’enfoncer plus profondément dans ce que l’on peut appeler une classification des sociétés, en me basant notamment plus précisément sur quelques lectures de livres d’Alain Testard.

 

  

Saucratès

 

 

Bibliographie : 

  

Alain Testart – Le communisme primitif - Economie et idéologie - 1985 - Editions de la Maison des sciences de l’homme, Paris

 

Alain Testart – Eléments de classification des sociétés - 2005 - Editions Errance, Paris

  

Alain Testart – Avant l’histoire – L’évolution des sociétés de Lascaux à Carnac – 2012 – Editions Gallimard NRF – Bibliothèque des sciences humaines, Paris

 

Richard Dawkins - Il était une fois nos ancêtres. Une histoire de l’évolution - 2007 - Éditions Robert Laffont - Paris



15/07/2022
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