Critiques de notre temps

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Du pouvoir


Nouvelles réflexions sur le Pouvoir

Nouvelles réflexions sur le Pouvoir

Par Saucratès 

Saint-Denis de La Réunion, lundi 7 août 2023

 

Dans mes recherches ou réflexions autour du concept de pouvoir, les chefferies amérindiennes d’Amazonie décrites par Pierre Clastres constituent l’un de mes objets préférés de réflexion. Ces chefferies se situent peu ou prou à l’une des extrémités les plus éloignées du spectre du pouvoir, tandis que nos sociétés occidentales modernes technologiques et supposément démocratiques se situent à l’autre bout de ce large spectre. 

Au sujet de ces chefferies amérindiennes, Pierre Clastres les présentait comme des ‘sociétés contre l’Etat’. Il n’a pas seulement étudié la tribu des indiens Guayakis, mais également quelques autres tribus amérindiennes comme les Yanomami. Et j’ai trouvé intéressante et pertinente la question que certains penseurs se posaient sur ces sociétés contre l’Etat. Comment des peuples peuvent se protéger d’un concept, le pouvoir coercitif, qu’ils n’ont pas connu ? Comment peuvent-ils avoir développé des mécanismes pour s’en protéger s’ils n’ont jamais expérimenté le pouvoir coercitif ? Comment cela peut-il s’expliquer ? L’apport selon ces penseurs de Pierre Clastres était de présenter ces sociétés non pas sans pouvoir, comme des sociétés auxquelles il manque quelque chose, le pouvoir coercitif, mais bien au contraire des sociétés où il y a quelque chose de différent, où toute la société est construite pour s’opposer à l’apparition du pouvoir.

 

Les chefferies amazoniennes sont en effet des particularités dans le domaine du pouvoir. Pas seulement par rapport au concept du pouvoir occidental, de l’usage du monopole pour l’Etat de la violence légitime. Les chefferies amazoniennes sont des exceptions par l’absence de toute forme de pouvoir coercitif dévolu au chef et à ses séides. On retrouve des sociétés à base de royauté sacrée (ou non) en Afrique. Où ce roi sacré (ou non) dispose de gens à lui, de gens du roi, pour user de la violence à son bénéfice et celui de ses hommes. On retrouve aussi des concepts de sociétés lignagères en Afrique, avec des chefs de lignages et des chefs à peau de léopard. On trouve des sociétés à Big Men (grand homme) en Océanie et en Mélanésie, mais également des royautés puissantes. On trouve des sociétés à classes ou à castes en Asie, avec des nobles et des roturiers et même des esclaves (esclavage pour dettes). L’Australie est plus ou moins à part avec des sociétés que j’aurais de la peine à décrire sous forme de concept de pouvoir (je ne pense pas qu‘Alain Testard aborde les sociétés aborigênes australiennes sous l’aspect du pouvoir politique). Y existe-t-il des chefs ? Il y existe en tout cas des responsables de culte, de sociétés secrètes, comme on en retrouve également en Afrique (je parle des sociétés secrètes). On y trouve des guerres, des guerriers, des vieux hommes puissants avec des filles à marier et de grands pouvoirs religieux, témoignage de leur puissance.

 

Et dans toutes ces sociétés, on peut noter ce que l’on appelle communément une malédiction attachée au fait d’être des chefs.

 

1. Le Big Men mélanésien passera sa vie à trimer durement pour correspondre et maintenir son statut de Big Men, impliquant de régaler largement en patates douces, en ignames et en cochons rôtis ses coreligionnaires, sans recevoir aucune aide de leur part. 

2. Le roi sacré africain sera mis rituellement mis à mort dès lors que le cycle de la nature sera perturbé, déréglé, que la sécheresse guettera ou qu’une inondation surviendra. Tout puissant pendant sa vie, mais à la merci de la moindre catastrophe naturelle ou signe de désordre social. 

3. Les chefs dans les sociétés indiennes de la côte nord-est américaine devait pour sa part, pour maintenir son statut et sa position sociale, toujours offrir des potlachs majestueux et généreux, et devait toujours rendre plus ou détruire autant ou plus qu’il avait reçu par le passé. Avec le risque de perdre son statut et le risque de déchéance s’il ne pouvait pas rendre plus.

 

4. Et quand au chef amérindien, il était toujours à la merci d’être rejeté par les membres de sa tribu s’il ne les représentait pas convenablement, s’il les entraînait dans une guerre dont ils ne voulaient pas ou inversement. À la merci du fait, du risque que les membres de sa tribu ne lui préfèrent un autre chef, un autre membre de la tribu parlant mieux ou les représentant mieux.

 

5. Dans une société beaucoup plus proche géographiquement de nous (mais pas temporellement), les sociétés grecque ou romaine antiques, la reconnaissance de la grandeur des familles riches dépendaient des dons qu’ils réalisaient, qu’ils offraient, des jeux qu’ils finançaient ou des actions d’évergétisme qu’ils offraient à leur cité, tel monument ou telle statue qu’ils avaient financés. À cette époque aussi, le statut social était aussi inséparable des dons offerts, comme en Mélanésie ou sur la Côte nord-ouest américaine. Il n’est plus que dans nos sociétés supposément égalitaires où les riches et les puissants n’ont plus nécessité de donner pour maintenir leur statut social. L’impôt a supposément remplacé les dons, mais les plus riches cherchent et réussissent à y échapper presque totalement. 

 

Néanmoins, au regard de ce spectre très large que peut prendre le pouvoir dans les sociétés humaines, peut-on imaginer que l’on trouve des formes très proches de ce pouvoir, à la fois à un bout de ce spectre, parmi les sociétés amérindiennes les plus préservées, telles que les a observé Pierre Clastres dans les années 1960-1970, mais également à l’autre bout de ce spectre, dans nos sociétés occidentales modernes ? Et peut-on alors se demander ce qu’il faudrait alors en penser, en déduire sur la nature de ce pouvoir ?

 

Dans la description que fait Pierre Clastres d’une société indienne, les Yanoama, qui constitue l’archétype du chef amérindien et de sa potentielle déchéance : 

 

«Disons seulement que la personne de Fusiwe [chef du peuple Yanoama décrit par une brésilienne enlevée qui vécut quelques décennies auprès d’eux] illustre parfaitement la conception indienne du pouvoir, radicalement différente de la nôtre en ce que tout l’effort du groupe tend précisément à séparer chefferie et coercition et donc à rendre en un sens le pouvoir impuissant. Concrètement, un chef - dirigeant ou guidé, faudrait-il plutôt le nommer - ne dispose sur ses gens absolument d’aucun pouvoir, hors celui - tout différent - de son prestige auprès d’eux et du respect qu’il sait inspirer.

 

D’où ce jeu subtil entre le chef et son groupe, jeu lisible entre les lignes du récit d’Elena (Yanoama. Récit d’une femme brésilienne enlevée par les Indiens, Plon, Terre humaine, 1968), et qui consiste pour le premier à savoir à chaque instant apprécier et mesurer les intentions du second, pour s’en faire ensuite le porte-parole. Tâche délicate, toute en finesses, de s’accomplir sous le discret mais vigilant contrôle du groupe. Que celui-ci repère le moindre abus de pouvoir (c’est-à-dire l’us du pouvoir), et c’en est fait du prestige du chef : on l’abandonne, au profit d’un autre plus conscient de ses devoirs. 

 

Pour avoir tenté d’entraîner sa tribu en une expédition guerrière qu’elle refusait, pour avoir confondu son désir et les intentions du groupe, Fusiwe se perdit. Délaissé de presque tous, il persista néanmoins à faire sa guerre pour y laisser finalement la vie. Car sa mort, presque solitaire, est en fait un suicide : le suicide d’un chef qui ne put supporter le désaveu infligé par ses compagnons, d’un homme qui, faute de pouvoir survivre comme chef aux yeux de ses gens et de sa femme blanche, préféra mourir comme un guerrier.»

 

Pierre Clastres, «Une ethnographie sauvage - Recherches d’anthropologie politique», pages 38-39

  

Vous me direz : il n’y a absolument aucune ressemblance avec le pouvoir politique dans nos sociétés occidentales, avec le fonctionnement de l’Etat. Et pourtant, en lisant ces lignes, je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec le fonctionnement de groupes d’égaux, avec mon propre ressenti. Et tout particulièrement avec le fonctionnement d’une section syndicale d’entreprise. Là aussi, le délégué syndical ou le responsable de la section syndicale ne tient son pouvoir que du libre choix des adhérents de sa section. Lui aussi il tient son pouvoir de sa capacité à parler pour le groupe et à le représenter. Lui aussi il ne peut pas conduire ses adhérents au conflit avec l’ennemi (l’employeur), si ceux-ci ne le souhaitent pas. Et inversement. Et là aussi, le délégué syndical court le risque que ses adhérents considèrent qu’un autre responsable parlera mieux et les représentera mieux. Alors évidemment, pas de suicide rituel de l’ancien chef désavoué (mais en dépassant les bornes avec le patron, il peut se faire licencier et il le sera probablement à la fin de sa protection), pas d’obligation de parler dans les cérémonies du groupe … (mais n’est-ce pas ce que l’on attend de lui ?).

 

Evidemment, le conflit et l’opposition avec le patron de l’entreprise est sensé relever de la théâtralisation. Mais aux yeux du personnel et des adhérents, la fraternalisation avec l’employeur risquerait d’être considérée comme une trahison. Et enfin, dernière ressemblance, le pouvoir du délégue syndical comme celui du chef amazonien repose sur leur légitimité à représenter le groupe, sur leur prestige ou sur le respect qu’ils savent inspirer (pour reprendre les mots de Clastres), réels, fantasmés ou usurpés, aux yeux de leurs coreligionnaires ou de leurs mandants. De la même manière, comment réagiraient des salariés et des militants syndicaux si leur délégué se transformait en dictateur, les forçait à travailler pour lui ou cherchait à transmettre sa charge de dirigeant à la personne de son choix ?

A bien réfléchir, ce que Clastres décrit comme une société contre l’Etat n’est peut-être qu’une forme normale de fonctionnement d’un groupe d’égaux, dans une société d’égaux. À moins qu’on ait peut-être juste retrouvé avec les syndicats le fonctionnement idéal d’un groupe d’égaux, à l’égal du fonctionnement des sociétés amazoniennes archaïques, même dans notre société ultra-libérale et ultra-policée. 

 

Et on trouve à l’œuvre dans notre société moderne une volonté politique de combattre ce fonctionnement entre égaux. Il est intéressant de voir que ce fonctionnement idéal de la section syndicale ne s’observe pas plus haut dans la structure syndicale. Les syndicats, les branches de syndicats, les unions départementales de syndicat ne reposent plus sur des sociétés d’égaux, mais elles sont aseptisées, organisées avec des élections, des représentants désignés afin de contrôler les personnes qui seront finalement désignées pour diriger. On rentre dans des organisations où tout devient contrôler. Il ne faudrait pas qu’un leader charismatique parlant admirablement prenne le pouvoir et en abuse, comme l’exemple hitlérien l’avait utilement démontré. 

De la même manière, le politique tente de réguler le fonctionnement de la section syndicale pour en extirper cette forme de représentation politique archaïque qui terrorise le pouvoir. Le délégué syndical doit maintenant avoir maintenant prouvé sa représentativité en obtenant suffisamment de voix dès salariés de l’entreprise. Il ne pourra pas se représenter plus de trois fois à l’élection et ne pourra plus être désigné comme délégué syndical. 

La différence entre les sociétés contre l’Etat amazonienne et nos sociétés modernes occidentales, ou celles qui les ont précédées, ne repose peut-être pas tant sur des différences fondamentales, que sur l’idée que les dirigeants de ces sociétés différentes ont réussi à institutionnaliser leur fonctionnement pour permettre à certains chefs de se maintenir et de consolider leur pouvoir, et de se protéger des leaders trop charismatiques.

 

Les sociétés amazoniennes sont juste restées des accidents de la nature, conservant leur caractère de sociétés entre égaux, forcées de se designer des chefs mais qu’ils n’autorisent en aucun cas à consolider et à maintenir leur pouvoir. Il est surprenant, voire extraordinaire, que l’on puisse continuer à observer ce même genre de relations, ce même genre de fonctionnement, dans toutes les sociétés entre égaux que l’on observe dans nos sociétés occidentales ou non occidentales modernes. Associations de quartier, assemblées de copropriétaires, syndicats … Même si à chaque fois, dans chacune de ses instances, des chefs, des responsables, essaient de se réfugier derrière une institutionnalisation, derrière des règles, derrière des quorums, derrière des ordres du jour, pour conserver et maintenir leur pouvoir lorsqu’ils sentent qu’ils perdent de leur pouvoir, que la contestation apparaît. 

La société contre l’Etat de Clastres ne serait ainsi qu’une simple forme naturelle à l’Humanité d’un groupe d’égaux ? Mais il resterait malgré tout cet extraordinaire miracle qui voudrait que des peuples amazoniens aient réussi à maintenir ce fonctionnement de leurs sociétés sans présence d’un pouvoir coercitif au nom de l’Etat. Et cela reste un miracle.

 

Même si, et j’y reviendrais ultérieurement, cette absence de pouvoir coercitif étatique se traduit par une violence interne et externe de ce groupe, que ce soit à l’égard de ses propres membres dans le cadre des cérémonies d’initiation, ou à l’égard des groupes humains proches contre lesquels il existe un état de guerre presque permanent. Entre cette violence et la violence de l’Etat, je ne suis pas sûr de vouloir idéaliser les sociétés contre l’Etat ! Même si cette opposition est intellectuellement féconde et stimulante.

 

 

Saucratès

 

 

Nota : Évidemment, avec cette explication, j’idéalise le  fonctionnement de la section syndicale et de la désignation de son délégué syndical. J’en présente un archétype (au sens webérien de l’idéal-type) de la même manière que l’histoire du chef Fusiwe représente l’archétype du chef amazonien. Dans certaines sections syndicales d’entreprises, là également, certains peuvent hériter du statut et du prestige de leurs parents, et on peut être ainsi dans certaines entreprises délégués syndicaux de père en fils ou de mère en fille, avec des dynasties de représentants syndicaux (cela implique qu’un employeur embauche les enfants de celui qui les emmerde régulièrement… ce qui devient moins commun désormais). À une autre échelle, l’ancien secrétaire général de la CFDT, Francois Chérèque, élu en 2002, n’avait-il pas été élu en tant que secrétaire général de la CFDT justement parce que son père en avait été le secrétaire général (adjoint) quelques décennies auparavant (1979), tout du moins en partie ? 


07/08/2023
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Du pouvoir (2)

 

Réflexion dix-huit (23 juillet 2010)
Une société peut-elle exister sans pouvoir ?

Nous avons pu survoler ce qu'il fallait entendre par le 'pouvoir'. D'une certaine façon, le pouvoir est inséparable de la violence, soit parce qu'il est découle directement, soit parce qu'il en est une trace ritualisée. Il est en effet habituel de mentionner que le pouvoir de l'état repose sur un monopole de la violence légitime. Mais presque toutes les formes de pouvoir reposent sur un tel usage (ou pré-usage) de la violence. Presque parce que Max Weber avait présenté des formes d'autorités différentes : l'autorité charismatique, où ce n'est pas par la force qu'un homme, un chef, se voit reconnaître une autorité, un pouvoir, se voit obéir par ses semblables, mais par une capacité particulière, innée, non violente.

A partir de là, il peut paraître intéressant de s'interroger sur la possibilité de vivre sans pouvoir. Des mouvements ont pu ainsi tenter de refuser l'autorité et le pouvoir, notamment en matière d'éducation des enfants. Toutefois, si des adultes peuvent tenter de vivre à l'abri du pouvoir de l'état ou des institutions, en se maintenant à l'écart de la société et de ses codes, en vivant repliés sur eux-mêmes, en communauté, si des parents peuvent vouloir éduquer leurs enfants en dehors de toute autorité parentale imposée et de toute forme de violence, en les laissant libres de leurs actes, de leurs choix, il me semble pourtant clair que ces mêmes personnes, ces mêmes enfants, ne seront jamais à l'abri de la principale et primitive forme du pouvoir, provenant de la violence et du pouvoir nés des interactions des adultes ou des enfants entre eux, au sein de la communauté ou entre les enfants, d'une même famille ou non.

Il en ressort que le pouvoir légitime étatique ou le pouvoir institutionnalisé est avant tout un médiateur dans les conflits nés des interactions des individus entre eux. Le pouvoir reconnus aux parents permet de réguler les interactions des enfants entre eux au sein d'une même famille. De même les forces armées de police et de gendarmerie sont avant tout des médiateurs dans l'immensité des interactions des individus les uns face aux autres. Le maintien de l'ordre public s'entend également comme la pacification de la vie sociale, de sorte que les individus puissent se croiser et interagir en dehors de toute violence et de toute agression.

Du simple fait qu'en état de guerre, lorsque l'ordre normal des choses est mis en suspens, les interactions des uns et des autres se transforment immédiatement en acte de pouvoir et de coercition, de vol, de viol et de rapine ... il suffit de regarder les conflits du Rwanda, du Vietnam, la seconde guerre mondiale pour voir ce que les hommes deviennent dès lor qu'ils ont une arme entre les mains et l'impression que leurs actes ne seront pas connus ou dénoncés : des violeurs, des voleurs, des assassins ... Et cela n'a rien de surprenant dès lors que l'on regarde les évènements sporadiques qui explosent dans les cités françaises dès lors que des bandes de jeunes se révoltent ... on peut en déduire que, comme le pensait Hobbes dans son Léviathan, l'homme est à l'état de nature un loup pour l'homme.

Evidemment, je préférerais rejoindre la position de Rousseau en estimant que l'homme est naturellement un homme bon ; même si cette dernière thèse ne s'oppose d'ailleurs pas à mes observations puisque selon Rousseau, c'est la vie en société qui fait de l'homme un être mauvais, mais naturellement bon.

Supprimer les diverses formes de pouvoirs institutionnalisés ne feraint ainsi que projeter les individus sans espoir de médiation dans la violence née des interactions des uns et des autres, dans les rapports de force. Et de nouvelles formes de pouvoir institutionnalisé naîtraient d'ailleurs au sein des communautés qui apparaîtraient ; communauté au sein desquelles les formes de pouvoirs institutionnels sont souvent extrêmement violents.

Je ne pense pas ainsi que la société et l'homme puisse se passer des formes institutionnalisées du pouvoir, puisque de toute façon, jamais l'homme ne pourra être à l'abri du pouvoir et surtout de la violence nés des interactions des uns et des autres.

Par contre il me semble qu'il faudrait que la société, que les adultes, s'occupent d'éradiquer la violence des interactions qui est observée entre les enfants dans les structures de crêche et scolaires. On y jette des enfants à leur plus jeune âge, parfois dès qu'ils ont quelques mois, et il leur faut apprendre à la gérer, la plupart du temps sans médiation, puisque les adultes sont persuadés que les enfants y apprennent les choses de la vie et à réagir face à la violence ... mais sans assistance et pratiquement sans médiation.


Réflexion dix-sept (21 juillet 2010)

Des rapports de pouvoir (suite)

Il existe enfin une dernière forme de pouvoir différente des deux formes précédemment étudiées, que j'ai appelé le pouvoir légitime (ou étatique) et le pouvoir institutionnel (au sein des institutions). Et d'une certaine façon, cette forme de pouvoir est l'une des premières formes que l'être humain a rencontré, que ce soit au cours de l'histoire de l'humanité, ou au cours de son histoire personnelle, de sa construction en tant qu'homme.

Il est différent des autres formes au sens où il nait simplement de la rencontre de quelques personnes, deux le plus souvent, et qu'il ne nécessite aucune institution pour jouer, pour interférer entre les êtres humains.

Les tous premiers à rencontrer cette forme de pouvoir sont les enfants, dans les structures scolaires ou dans les crêches d'enfants. Ils ne font pas qu'y nouer des liens affectifs avec les adultes et leurs camarades. Ils se trouvent très tôt, dès leur arrivée dans de telles structures, confrontés à des relations de pouvoir, à des situations de pouvoir, et de leur capacité à décrypter et à réagir à de telles situations d'interactions, dépendra toute leur évolution future.

Les interactions que peuvent nouer des enfants entre eux, les rapports de force qui se créent entre eux, qui régissent et structurent leurs relations individuelles, sont des relations de pouvoir ; la première des formes de pouvoir, un pouvoir individuel, la capacité à influer sur les actions de ses camarades.

Il n'est pas neutre que la science qui étudie les rapports des enfants entre eux ait pour nom 'éthologie', science qui a également et principalement pour champ d'étude l'analyse des rapports des animaux entre eux, et tout particulièrement des primates. Il y a une ressemblance marquante des relations de pouvoir au sein des sociétés de primates et des jeunes enfants humains, tout particulièrement parce que la communication y passe principalement par le canal non-verbal, et que les interactions non-verbales régissent de manière privilégiée les relations de pouvoir.

Une relation de pouvoir passe par un ensemble de signaux non-verbaux ; le language du corps, des yeux, de la bouche, de la sudation, le rougissement, la position du corps ... Ces signaux non-verbaux permettront ainsi le plus souvent d'éviter la confrontation violente entre deux protagonistes humains, ou primates, de même que des positions de soumission signifieront à l'autre l'inutilité d'une confrontation violente ou d'une agression.

Mais autant ces formes d'interactions et donc de rapports de pouvoir disparaissent pratiquement de la vie des adultes dans la majeure partie des situations, où le pouvoir y est institutionalisé ou les rapports de force instrumentalisés ... Les adultes ont ainsi essentiellement des rapports hiérarchiques, des rapports commerciaux ou des rapports de propriété ; rapports dont toute remise en cause est punie par la société ou entraîne l'intervention de la police ... on parle de la majeure partie des situations puisque ces rapports consensuels n'éclatent qu'en période de troubles ou de guerre, lorsque la nature violente de l'homme peut alors se déchaîner ...

Autant les enfants baignent dans cette forme d'interactions et de relations de pouvoir, en crêche collective puis à l'école ... Comme si ces interactions auxquels ils sont confrontés étaient sensés leur apprendre à réagir dans leur vie future, dans les relations de pouvoir utltérieures qu'ils auront à connaître, alors qu'elles n'ont justement rien en commun.

L'étude de cette dernière forme de pouvoir nous permet par ailleurs de tirer une conclusion sur le pouvoir, qui n'est peut-être pas évidente pour les deux premières formes de pouvoir que j'ai étudiées, puisque ces deux formes nous sont présentées comme imposées, puisque notre obéissance est rendue obligatoire par le fonctionnement d'une société qui nous précédait et préexistait, et contre lequel il semble inutile de résister. Le pouvoir naît de sa reconnaissance par ceux qui y sont soumis ; le pouvoir d'une personne n'existe que parce que nous lui reconnaissons un tel pouvoir ! Sans reconnaissance, sans acceptation du pouvoir de l'autre, cet autre n'aurait aucun pouvoir, ni sur nous, ni sur les autres ! Ce n'est que parce que nous acceptons la relation de pouvoir que nous y sommes soumis ! On en revient ainsi à l'analyse qu'en faisait Etienne de La Boétie, au seizième siècle, dans le «Contr'un», aussi nommé «Discours de la servitude volontaire». Le pouvoir n'existe que parce qu'on accepte de le servir, de se soumettre, de le reconnaître !


Réflexion seize (11 juillet 2010)
Nos rapports au pouvoir

Le pouvoir n'a pas pour seul apparence son acceptation étatique. Chacun d'entre nous, nous rencontrons également le pouvoir hors de l'état, hors de nos rapports avec la police, avec l'armée, avec la gendarmerie, avec la justice, avec l'administration. Si nous ne devions supporter de rapports de pouvoir, de domination, qu'avec ces seules quelques organisations, la vie serait vraisemblablement très simple, beaucoup plus facile. Il n'en est évidemment rien !

Il existe une autre forme de pouvoir, de domination que nous rencontrons à tous les coins de notre vie ; le pouvoir que l'on peut dénommer institutionnel. Ce sont les rapports de pouvoirs que nous rencontrons dans notre vie professionnelle, avec nos supérieurs hiérarchiques au travail (pour ceux qui travaillent), avec nos collègues ou nos subalternes si nous disposons d'un pouvoir hiérarchique, dans nos achats de tous les jours dès lors que nous attendons un service en échange du paiement d'un prix donné. On peut aussi rattacher à cette notion de pouvoir institutionnel les relations que nous avons avec nos enfants dans l'organisation de la vie familliale, mais aussi celles que nous avons avec des enseignants dans le cadre de l'éducation de ces mêmes enfants.

Notre vie entière est rythmée par de telles relations de pouvoir (que j'appellerais institutionnelles) avec les personnes qui nous entourent, dès lors qu'entrent en jeu le paiement d'un prix, le versement ou l'attente d'un salaire, l'existence d'une relation de dépendance, de subordination. Et qui dit relation de pouvoir dit justement existence d'un déséquilibre relationnel entre les deux personnes, les deux parties à l'échange ; il y a un qui peut agir comme bon lui semble, sous certaines limites, et l'autre qui doit subir. Ainsi dans la relation entre un client et un vendeur, puisque le client peut toujours se retirer avant d'avoir payé, quelque soit le temps qu'il a engagé dans l'échange, tandis que le vendeur n'en a pas la possibilité (sauf dans une relation de gré à gré, hors de tout cadre institutionnel justement) C'est la relation de subordination du vendeur à son employeur qui lui impose de subir celle du client de son employeur.

Evidemment, les deux formes de pouvoir, étatique et institutionnelle, peuvent se superposer l'une l'autre, se combiner, voire s'affronter. Dans une administration par exemple, il y a superposition entre le pouvoir étatique dont bénéficient les fonctionnaires qui y travaillent, et le pouvoir institutionnel régissant les relations hiérarchiques entre ces mêmes fonctionnaires. Dans l'armée, il y a même pratiquement confusion entre ses deux formes de pouvoir, puisque l'obéissance à la hiérarchie est une règle de fonctionnement, une règle constitutionnelle au pouvoir étatique, et que le refus d'obéir aux ordres dictés par un supérieur hiérarchique a pour nom insubordination et est passible d'une peine d'emprisonnement, voire de la peine de mort dans certaines circonstances (guerre).

A l'inverse, l'imposition dans la fonction publique d'une culture du résultat, visant à traiter l'usager du service public comme un client, pour répondre le mieux possible à sa satisfaction, conduit à opposer la logique de l'autorité étatique dont le fonctionnaire dispose à l'encontre de l'usager, et la subordination institutionnelle qui découle de la transformation de la relation en une relation vendeur-client. Les deux formes de pouvoir s'affrontent ici, s'oppose, impliquant la désagrégation de la position de représentant de l'état du fonctionnaire en question, avec le respect qui doit lui être dû, pour ne plus lui laisser que sa position d'infériorité hiérarchique émanant de la relation client-vendeur qui en découle.

Il est facile ensuite aux plus hautes autorités gouvernementales de souligner l'importance de l'appartenance à la fonction publique, par exemple dans le monde de l'éducation nationale, et de fustiger les actes de violence à l'encontre des fonctionnaires, des enseignants ... Mais ce sont justement les politiques régulièrement menées depuis des décennies pour ravaler la fonction publique à une simple culture du résultat, qui expliquent l'évolution des mentalités et la disparition du respect dû à un fonctionnaire de l'état.

Si le pouvoir étatique repose in fine sur l'usage de la force de coercition légitime (aux yeux de l'état), le pouvoir institutionnel ne repose pas forcément sur une telle autorisation d'usage de la force, mais sur l'usage de l'argent, c'est-à-dire sur la reconnaissance du pouvoir de l'argent dans les relations humaines. Un salarié qui refuserait d'obéir à un de ses supérieurs hiérarchiques dans une institution ne courra pas (plus) le risque d'être violenté, attaqué ou mis en prison. De même pour le vendeur qui qui enverrait paître un client désagréable. Il ne courrait plus ce risque aujourd'hui, même si, dans le cadre des relations d'esclavage, l'esclave qui se rebellait contre son maître courrait autrefois le risque d'être battu, frappé, ou de se voir amputer d'un membre à titre de punition, à titre de leçon.

Aujourd'hui donc, dans le cadre des relations salariales, le pouvoir institutionnel ne repose plus sur l'usage de la violence, légitime ou illégitime, mais sur celui de l'argent. Et en définitive, seule la valeur que l'on donne à l'argent finalement, donne une valeur aux relations de pouvoir que l'on doit supporter, ou que l'on peut obtenir des autres.

Il faut néanmoins distinguer au sein des relations de pouvoir institutionnelles les relations existant au sein du cadre famillial, et notamment avec ses enfants. Ces relations de pouvoir que je nomme institutionnelles reposent elles par contre sur la possibilité d'une violence symbolique, considérée par les uns ou les autres comme légitimes. C'est la possibilité de l'existence de la punition, et de la disproportion de la force, qui donne une autorité aux parents, à côté de l'amour filial, paternel ou maternel.


Réflexion quinze (9 juillet 2010)
Retour sur le prolégomènes à l'étude du pouvoir

Je m'intéresserais d'abord à une approche de la réalité du pouvoir au sein de la société, et tout particulièrement au sein de nos sociétés occidentales. En effet, parler du pouvoir nécessite avant tout de signifier la réalité de l'existence de ce concept. Parler du pouvoir n'a d'intérêt qu'en raison de l'opérabilité de ce concept, de sa permanence, de son inaltérabilité. Dans mon idée, le pouvoir a toujours existé, depuis que l'homme est homme, avant même que l'homme ne s'appréhende comme homme. Il prend simplement aujourd'hui des formes nouvelles, modernes, même si dans le fond, on a toujours affaire à une même chose.

Mais avant tout, parler du pouvoir implique de définir ce que l'on entend par ce terme. Qu'est-ce donc que le pouvoir ?

On peut définir de multiples façons le pouvoir. On entend le plus souvent a priori par pouvoir son acceptation étatique. Le pouvoir est ainsi la représentation de la capacité de coercition de la société organisée sous forme d'un état. Et la police, l'armée, la gendarmerie, le fonctionnaire, sont les dépositaires du pouvoir de l'état dont ils sont les dépositaires. Le pouvoir s'entend alors comme le transfert à ces personnes, à ces représentants de l'état, d'une fraction de la souveraineté de l'organisation étatique. Le policier, le gendarme, le militaire, le fonctionnaire, n'est plus seulement alors une personne lambda, mais une parcelle de l'état lui-même, une extension de lui-même.

Toutefois, le pouvoir dont ces personnes disposent est souvent, à la base, inséparable des armes, de l'armement, dont ces personnes disposent, et dont elles sont souvent les seules autorisées à porter, à afficher et à utiliser (si on excepte l'exemple américain et les personnes disposant d'un port d'arme ; droit constitutionnel aux Etats-Unis). De la sorte, à l'origine, il y a inséparabilité entre l'existence du pouvoir dont ces personnes disposent et les armes dont ces personnes ont le droit de faire usage, au nom de l'état ou pour sa protection. Ce n'est qu'au fur et à mesure que l'existence d'un tel pouvoir n'est plus interrogé que la séparation entre pouvoir et arme peut être faite, et où on peut imaginer un représentant non armé de l'état. En sachant néanmoins depuis longtemps que ce pouvoir repose sur la connaissance que le non respect du pouvoir d'un représentant non armé de l'état sera puni immédiatement de l'intervention de représentants armés.

On peut s'interroger sur le principe même de la délégation d'autorité entre l'état et ses soldats, ses gendarmes et ses policiers. Est-ce l'état qui leur a confié leur pouvoir et leur droit de faire usage de leur arme, ou bien leur usage en commun de leurs armes qui a conduit à la création et à l'apparition de l'état ? La réponse diffère évidemment selon l'échelle de temps considéré. Ce qui est faux à l'échelle d'un être humain est vrai à l'échelle d'une société. Chaque organisation étatique, chaque régime politique s'est  constitué par l'usage de la force, de la coercition, par la voie des armes.

Réflexion quatorze (30 septembre 2009)
Sur les gens de pouvoir ...


Les gens de pouvoir, c'est-à-dire les gens recherchant le pouvoir pour le pouvoir, sont partout autour de nous. Le phénomène du pouvoir est même peut-être plus général qu'il n'y paraît, trouvant ses racines jusque dans l'aspiration des personnes à la reconnaissance de leurs pairs, qui commence dès le début de la socialisation, dans la cour de la crêche ou de l'école maternelle. 

Rien de neuf, me direz-vous ! Mais il n'y a pas non plus de différences entre tous ces gens de pouvoir, voir entre toutes ces personnes avides de reconnaissance dès leur plus jeune âge. Il n'y a pas de différence en terme d'aspirations au pouvoir ni en terme de moyens utilisés pour y arriver et pour y subsister entre Nicolas Sarkozy, devenu président du parti politique UMP, puis président de la république, et par exemple François Chérèque ou Bernard Thibault des syndicats CFDT ou CGT, ou un quelconque des grands patrons des grands groupes industriels ou financiers français.

Pour chacun d'entre eux, ils ont intégré une organisation, politique, syndicale, associative ou économique, et ils y ont peu à peu tissé des liens, noué des alliances, renversé ou participé à l'assassinat de rois, de princes ou de notables, avant enfin d'approcher des hautes sphères dirigeantes de ces organisations, puis d'en devenir le leader ou le dirigeant. Je n'ose imaginer l'énergie qu'ils ont dépensé pour atteindre le sommet et s'y maintenir, et je n'ose imaginer les moyens inavouables que tous, ils ont utilisé, moyens qui devraient normalement leur interdire l'accès à toute forme de rédemption ultérieure aux yeux de Dieu (mais non des hommes qui ont la mémoire bien courte) ... si le paradis existe.

Il n'y a pas de différence entre Nicolas Sarkozy, François Chérèque, Bernard Thibault ou Baudoin Prot (DG de Bnp Paribas) par exemple. Mais il n'y a pas non plus de différence avec le secrétaire d'un petit syndicat adhérant à une quelconque grande confédération syndicale, ni un quelconque délégué syndical d'une quelconque entreprise, ni le président d'une quelconque organisation associative (Attac ou MSF) ou d'une microscopique association de parents d'élève. Il n'y a pas de différence de quantité d'énergie utilisée pour atteindre ces postes, ni dans la façon d'utiliser les petits (ou les grands) pouvoirs qui y sont associés. 

Il y a simplement des différences de prestige associées à ces différentes responsabilités. Et il y a des différences de prestige que ces personnes peuvent atteindre en visant d'autres postes, d'autres responsabilités plus élevées. Il est clair que Nicolas Sarkozy a atteint le niveau le plus élevé qu'il peut espérer atteindre en France. Ces ambitions ultérieures ne pourront se situer qu'à un plan international, patron de l'ONU ou dirigeant planétaire. A moins comme Vladimir Poutine de continuer à gouverner la France comme premier ministre en mettant un pantin à la présidence, ou comme les dictateurs africains, de changer la constitution pour poursuivre un troisième mandat à la présidence ... Difficile choix : dictateur africain ou dictateur slave ... le choix paraît limité.

Par contre, un président(e) d'association pourra toujours viser de prendre la présidence d'une autre association fédérale plus importante, pour obtenir plus de pouvoir, plus de reconnaissance sociale ... il ou elle pourra se lancer en politique ou tenter d'entrer dans le gouvernement ... un responsable de section ou d'une fédération syndicale, comme autrefois Bernard Thibault ou François Chérèque, pourront tenter de monter dans les instances confédérales de leur organisation syndicale (ou d'une autre), s'y faire représenter puis élire à des postes de responsabilité. Et de même pour des politiques ou des cadres d'entreprise.

Mais cela éclaire d'une autre façon la promiscuité régnante dans les loges maçonniques françaises et plus largement dans la vie politique et sociale française. Si toutes ces personnes se ressemblent tellement, si elles usent des mêmes méthodes, des mêmes armes, si elles obéissent aux mêmes aspirations, il est alors normal qu'elles s'accordent une certaine reconnaissance entre elles, qu'elles s'appuient dans des loges de maçons. Il est aussi normal que le monde politique français soit un monde fermé, replié sur lui-même, réservé à ces seuls adorateurs, à ces seuls addicts du pouvoir et des honneurs.

Seule différence entre ces diverses personnes : l'organisation dans laquelle ils ont choisi, ou dans laquelle ils ont réussi, à rentrer et à progresser, en fonction de raisons plutôt liées au hasard ou aux liens de sang ... Par exemple, il était plus simple pour François Chérèque de régner à la CFDT, dont son père a été un dirigeant historique, que dans un autre syndicat ou d'une autre organisation. Mais pour nombre d'entre ces personnes, les petites associations qu'ils ont infiltré étaient souvent les seules qu'ils pouvaient rejoindre, mais avec une même soif inextingible d'honneur, de reconnaissance et de pouvoir.

... Mais bon, il existe aussi nombre de dirigeants d'associations, de responsables syndicaux, qui ont pris des responsabilités par obligation, par qu'ils étaient les seuls susceptibles d'occuper ces fonctions, par dévouement, de manière désintéressée et altruiste. Ils sont évidemment extrêmement normaux ... l'immense majorité ... Mais on connaît peut-être tous autour de nous des personnes correspondant à ma première définition.


Réflexion treize (21 septembre 2008)
Pouvoir et légitimité (re-suite) ... ou l'absence de toute véritable légitimité à tout pouvoir politique ...


Nouveau retour sur la notion de légitimité en politique ... Je ne souhaite içi m'intéresser qu'à la plus haute forme de pouvoir dans nos sociétés humaines, à savoir celle de ses principaux dirigeants politiques, empereurs, rois, président, premier ministre ou premier secrétaire ... Pourquoi cet intérêt limité ? Simplement parce que si ce que je veux démontrer est vrai, cela n'en sera que plus vrai pour toutes les autres formes de pouvoirs inférieures dans nos sociétés ...

Mon hypothèse de travail sera la suivante : toute forme de légitimité d'un pouvoir politique n'est qu'une simple apparence, qu'une mascarade à l'usage de ceux qui doivent obéissance, pour légitimer la domination d'un homme sur les autres, pour légitimer le pouvoir absolu d'un homme seul sur les autres ... Car sans cela, nos sociétés humaines seraient incontrôlables, si chacun était en mesure de se considérer aussi apte qu'un autre à diriger les autres hommes.

C'était particulièrement vrai dans le cas des états dirigés par des monarchies héréditaires (et cela l'est toujours pour les états où demeure une royauté régnante comme en Espagne, en Angleterre, en Belgique ...). La légitimité de la transmission du pouvoir, qu'il soit réel ou d'apparat, ne doit pas être interrogée dans de tels régimes, sinon comment expliquer et légitimiser cette transmission de la charge royale au fils ou à la fille premier né ? Aux temps féodaux, sous les rois carolingiens puis mérovingiens, la désignation du roi prenait la forme d'une élection, mais c'était cependant le plus souvent le fils du roi défunt qui était élu pour succéder à son père ...

La légitimité d'un roi à diriger un état repose alors sur une construction politique d'une nation, selon laquelle toute sa population (ou du moins la plus grande partie) reconnaît une certaine légitimité à la transmission héréditaire du pouvoir entre un homme et sa famille ... Et le plus incroyable, c'est que cela fonctionne encore aujourd'hui, à notre époque, comme chez les Grimaldi à Monaco, où une famille règnante peut se transmettre héréditairement le pouvoir sans que le reste du peuple ne trouve à y redire ...

Mais la légitimité de la transmission du pouvoir, et donc de ce pouvoir lui-même, n'est guère différente dans une république démocratique comme la France ou les Etats-Unis. Evidemment, on n'y trouve que rarement trace d'une transmission héréditaire du pouvoir entre un dirigeant et son fils (mis à part le cas des Bush aux Etats-Unis). Mais les procédures formelles de désignation du chef de l'état, bien que très différentes de ceux qu'elles sont dans un régime monarchique, visent le même objet : rendre légitime la désignation d'un homme au plus haut poste de pouvoir de l'état, sans que cette légitimité ne soit interrogée par l'ensemble du peuple ...

La légitimité des modes de scrutin concourant à l'élection et à la désignation d'un chef de l'état dans un pays donné n'est réellement qu'une apparence et une mascarade, pour une désignation aussi peu libre et démocratique que ne l'est un système monarchique ... Simplement, dans le cas d'une république ou d'une démocratie, le choix des candidats est réalisé dans des partis politiques où des hommes politiques choisissent un homme appelé à diriger l'état ...

De manière générale, toute forme de pouvoir n'est légitime qu'en apparence, selon une idéologie propre qui fonde une constitution, une société ... quelque soit sa nature ... Un ordinateur pourrait aussi bien tirer au sort le nom du futur chef de l'état que la légitimité d'un tel régime pourrait tout autant être interrogée, et tout autant être acceptée par les autres personnes constituant cette société. Il n'existe ainsi pas de légitimité absolue et incontestable au pouvoir d'un homme, même aux plus hauts postes de nos sociétés, même quand ils sont le fruit d'élections apparemment libres et démocratiques ... Parce que le pouvoir sur les autres est toujours usurpé ...


Saucratès


Ecrits précédents sur le même sujet :
1.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-2004886-du_pouvoir__1_.html


23/11/2010
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Du pouvoir (1)

Réflexion douze (5 septembre 2008)
Du pouvoir tout court ...

 
« (...) le pouvoir, ce n'est pas une propriété, ce n'est pas une puissance ; le pouvoir ce n'est jamais qu'une relation que l'on ne peut, et ne doit, étudier qu'en fonction des termes entre lesquels cette relation joue. On ne peut donc faire ni l'histoire des rois ni l'histoire des peuples, mais l'histoire de ce qui constitue, l'un en face de l'autre, ces deux termes, dont l'un n'est jamais l'infini et l'autre n'est jamais le zéro. »
(Michel Foucault - « Il faut défendre la société » - page 150)


Citation intéressante de Michel Foucault ... L'idée que le pouvoir ne doit être étudié que dans le cadre de ses manifestations réelles, de sa réalité, en tant que relations entre personnes et non uniquement sous forme de potentialités ... Drôle d'époque toutefois que nous vivons actuellement en France ... Qu'un officier de police puisse être sanctionné parce que la maison corse d'un ami proche du Président de la République française a été occupée symboliquement par des contestataires corses ... et que l'officier de police concerné n'a pas pris les mesures adéquates pour empêcher la survenue d'un tel évènement. Un gouvernement qui assure que la même sanction aurait été prononcée même si la personne concernée n'avait pas été un ami proche du Président ... Mais il nous est quand même permis d'en douter fortement ...

Qu'un nouveau fichier (Edvige, acronyme de 'Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale') est pu être créé pour ficher (évidemment) l'ensemble des personnes ayant des responsabilités politiques, sociales, économiques, syndicales voire religieuses ... Ce n'est également pas très rassurant ... Difficile de savoir à quoi un tel fichier pourra bien servir ou comment les droits d'accès (au sens Cnil) aux informations personnelles contenues pourront être effectivement garantis ...

L'approche de Foucault dans ce cadre est intéressante. Le gouvernement Sarkozy-Fillon tente d'accroître le pouvoir qui lui a été octroyé par le biais des urnes, mais ce pouvoir n'existe que dans l'espace qui lui est donné par le peuple français ... Et c'est à ce peuple, ou à la fraction agissante de ce peuple d'agir pour contester les mesures qu'il estimerait attentatoires à ses libertés imprescriptibles s'il les estimait menacées. Ce combat ravirait évidemment les contestataires forcenés de ce gouvernement, ceux qui défendent les sans-papiers et qui rappellaient depuis longtemps que les 'agressions' policières ou judiciaires contre les sans-papiers n'étaient qu'un avant-goût de ce qui attendait tout le monde ... Nicolas Sarkozy est-il en train de leur donner raison ... Va-t-on vers une radicalisation du pouvoir de Nicolas Sarkozy et de ses séides ?

Idée également que le pouvoir n'appartient à personne en particulier, que nul ne peut donc non plus l'accaparer ... Qu'est-ce donc que le pouvoir ? Pourquoi certains en sont-ils dépositaires ? Pourquoi certains en bénéficient-ils ? Alors qu'il ne devrait appartenir à personne, et aucun être transmissible ni être accaparé par une clique ... La réponse à toutes ces questions est là, quelque part autour de nous !


Réflexion onze (2 septembre 2008)
Pouvoir et légitimité ... La légitimisation ...


Je m'interrogeais il y a peu de temps sur le processus de légitimisation du pouvoir. Sur le fait que chaque personne dépositaire d'un quelconque pouvoir est souvent persuadée de la légitimité de son usage, de sa détention et de son droit à l'exercer sur les autres. Sur le fait également que nos sociétés occidentales sont construites sur le culte de la légitimité du pouvoir et qu'on le rencontre à tous les échelons de la société.

Sur le processus de légitimisation du pouvoir. J'ai essayé à plusieurs reprises de réfléchir sur ce qu'était le 'pouvoir'. Exercice difficile. Il est vraisemblablement plus simple, selon un philosophe comme Michel Foucault, de s'intéresser aux diverses manifestations du pouvoir dans nos sociétés, plutôt que de travailler sur un concept aussi général que le pouvoir. Mais cette méthodologie posera ensuite le problème de la généralisation des quelques explications trouvées au concept global lui-même. C'est évidemment un problème que l'on retrouve dans toutes les sciences humaines et sociales ... Comment passer du micro au macro ? Faut-il donc s'intéresser au concept global du pouvoir, en le recherchant sous toutes les formes qu'il peut prendre dans nos sociétés ? Ou faut-il, comme le préconise Michel Foucault, retenir une approche de type anthropologique, et s'intéresser à certaines formes de manifestation du pouvoir, de la même manière qu'il s'était intéressé à l'hôpital psychiatrique à la prison, c'est-à-dire à la manière dont la société occidentale traite les personnes déviantes vis-à-vis de la norme (les fous et les délinquants) ?

Ce qui revient tout de même au préalable de définir ce que l'on entend par 'normes', sur la manière dont on les définit, sur les déviances que l'on autorise et celles que l'on interdit, et sur les moyens que la société utilise pour contrôler les individus pour limiter au maximum les déviances autorisées. De manière plus générale, il est évident que définir le concept de pouvoir implique au préalable la définition des lois grâce auxquelles et sur la base desquelles le pouvoir va agir.

On en arrive ainsi au concept même de légitimisation du pouvoir ... Il n'y a légitimité du pouvoir que parce que le pouvoir repose sur des lois, sur des règles, sur des usages, sur des habitudes, préalablement acceptées et reconnues par l'ensemble de la société et par les personnes sur lesquelles ce pouvoir va agir. Un pouvoir légitime ne peut s'appliquer par la voie de la force et de la répression. Dans ces cas, il y a usurpation du pouvoir, c'est-à-dire que l'on se trouve à un pouvoir illégitime, qui ne tient que par la contrainte, et qui sans celle-ci, disparaîtrait naturellement, un peu à la manière dont se délitent les pouvoirs dictatoriaux ou à la manière dont le communisme soviétique s'est désagrégé dès lors que l'appareil de répression militaire et policier a été désassemblé, lors de la perestroika ...

Est-ce à dire que la forme la plus stable de légitimité du pouvoir est la forme démocratique ? Et que le communisme inventé par Karl Marx est en fait un système globalement instable ? Je ne pense pas que cela soit aussi simple que cela. Chaque forme de légitimité du pouvoir, chaque forme de société, secrète ses propres démons, ses propres ennemis en son sein. En démocratie d'opinion comme en Occident, en monarchie parlementaire, ou en régime totalitaire comme dans le communisme, des personnes sont forcément dans en lutte contre le régime lui-même ... Lutte plus ou moins acceptée par le régime. Des personnes en lutte contre le régime de pouvoir existant, et sur lesquelles le pouvoir existant tente d'avoir prise ... En sachant que seul le passage du temps, se décomptant en siècles plutôt qu'en années ou en mois, octroie cette légitimité à un régime politique et à une forme de pouvoir ...


Réflexion dix (14 août 2008)
Pouvoir et légitimité ...


Chaque personne dépositaire d'un pouvoir est souvent persuadée de la légitimité de son pouvoir, de son droit à l'exercer sur les autres. On peut dire même de manière plus générale que nos sociétés occidentales sont construites sur le culte de la légitimité du pouvoir. Cette légitimisation se rencontre à tous les échelons de la société.

Aux plus hauts sommets de nos sociétés, nos dirigeants, les ministres, les parlementaires, bénéficient de la légitimité de leur mode de désignation par la voie d'un scrutin libre et démocratique ... même si on peut aussi questionner la façon non démocratique dont ces personnes ont été désignées comme candidat des plus grands partis ... Leur légitimité démocratique étant acquise, peu importe ensuite la façon dont ils nous dirigent, les lois qu'ils votent ou les groupes de pression qu'ils avantagent ... De la même manière, on reconnaît tous aussi une certaine légitimité à nos interlocuteurs, qu'ils soient médecins, chirurgiens, avocats, enseignants ou autres ... en fonction des compétences qu'on leur suppose ou qu'ils affichent, et des nôtres. Dans le domaine professionnel également, on reconnaît aussi une certaine légitimité aux personnes qui nous dirigent ou qui ont été désignées pour nous diriger, en fonction de leurs diplômes, de leur niveau de formation, ou de leur expérience professionnelle ...

Au delà de cette légitimité reconnue, il faut aussi noter que cette légitimité est surtout intériorisée par ces personnes qui bénéficient de certaines formes de pouvoir. Combien de chefs de service, de dirigeants, s'interrogent sur leur légitimité à diriger d'autres personnes, à disposer du quelconque pouvoir sur les autres ? Ce qui me semble aberrant, c'est la capacité de ces personnes à être certaines de leur légitimité à disposer d'un pouvoir et d'être autorisées à en user et à en abuser.

Car évidemment, nous n'acceptons pas tous la légitimisation des pouvoirs de ceux qui nous entourent. Que ce soit la légitimité de nos dirigeants ou de nos parlementaires à faire les lois, la légitimité des uns ou des autres sous prétexte que c'est leur métier, la légitimité des dirigeants dans le domaine professionnel, ou les autres formes de légitimité, notamment concédées par la loi dans les domaines de l'administration, de la police ou de la justice.

Il existe de multiples formes de légitimité du pouvoir, et il existe de multiples formes de pouvoir. Et nous en contestons peut-être tous certaines formes. Par exemple, je n'interroge pas la légitimité des lois et de l'administration à appliquer les lois, même lorsque c'est à mon désavantage, que ce soit sur la route, en matière d'impôts ... D'autres, qui respectent aveuglement les pouvoirs établis, ne respectent aucunement pourtant les lois et les obligations appliquées par l'administration, trichant avec les lois sur la route, avec le fisc, avec les allocations, avec la sécurité sociale ... D'autres enfin, même très hauts placés, ne respectent pas la légitimité de la justice à surveiller leurs agissements (ainsi la lutte de Silvio Berlusconi en Italie contre les juges pour échapper aux condamnations pénales et aux jugements).

A certains niveaux, selon Michel Foucault, nous sommes tous dépositaires et agents d'un certain pouvoir. Nul n'est vraiment esclave du pouvoir dans nos sociétés. Est-ce vrai ? Mais sommes-nous tous aveuglés par le pouvoir dont nous disposons et par notre droit de l'exercer, sans nous interroger sur notre légitimité parfois totalement farfelue d'en disposer ?

Et j'aurais notamment tendance à penser que la domination qui s'exerce dans le domaine professionnel est la moins légitime qui soit ... ce qui ressort des recherches de Michel Foucault.


Réflexion neuf (15 octobre 2006)
Abus de pouvoir


D’un côté, il y a ce que l’on est prêt à abandonner de sa morale ou de ses idéaux pour disposer d’une parcelle de pouvoir.

Mais l’exercice du pouvoir recelle un autre danger. Celui de ne pas sentir changer son regard sur le monde, tout en ne réagissant plus de la même manière avec les autres. L’exercice du pouvoir peut changer le regard sur les autres. La possibilité d’user ou d’abuser d’un pouvoir peut entraîner la disparition de notre humanité, de notre humilité sur les actions et les faiblesses des autres, en oubliant les nôtres. Toute personne de pouvoir qui a la possibilité d’en user, soit le sait, soit ne s’en rend pas compte.

C’était que l’on pouvait reprocher au juge Burgaud, en plus de l’erreur judiciaire. Qu’était-ce que cet acharnement judiciaire, si ce n’est un jeune juge confronté à des faits, à des personnes et à des interdits moraux dépassant sa capacité d’humanité. Mais ce qui est arrivé au juge Burgaud, cette instruction ratée, ces innocents jetés en prison et en pâture à la presse, arrive très souvent à de nombreuses personnes disposant de pouvoir. Un maire ou un fonctionnaire ayant le pouvoir d’accorder une aide financière ou de bloquer un projet social, immobilier ou politique. Que faire lorsque vous vous trouvez face à quelqu’un avec lequel vous avez un différent, et lorsque vous devez prendre une décision à son sujet ?

Aussi inattaquable moralement que vous puissiez vous croire, que feriez-vous dans un tel cas. Le pouvoir modifie aussi notre vision du monde. Tel acte, que vous pouvez tolérer lorsqu’il ne vous touche qu’indirectement, qui peut même vous amuser, peut ne plus avoir la même importance lorsqu’il vous touche directement comme mise en cause de votre propre pouvoir.

Qu’est-ce donc que le pouvoir ? Là se trouve l’interrogation et l’explication primordiale. Comment le définir ?
Parce que l’abus de pouvoir ne touche pas qu’un juge, tel maire ou tel fonctionnaire. Il nous touche tous. Les gendarmes, les policiers, les banquiers ... chaque fois que nos professions nous laissent un minimum de liberté de décision, ainsi qu’un minimum de pouvoir discrétionnaire. Il nous touche aussi en tant que parent, avant tout. Et on peut se croire moral sans se rendre compte que l’on abuse du pouvoir qui nous est délégué ou octroyé.


Réflexion huit (8 octobre 2006)
Erreur et renoncement


A bien réfléchir, je me suis trompé.

Le mois dernier, je pensais que chacun d’entre nous devrait se poser deux questions avant de grandir. Que serais-je prêt à donner pour avoir du pouvoir, et que ne serais-je prêt en aucun cas à abandonner ? Et que serais-je prêt à donner pour disposer d’un pouvoir sur d’autres, pour disposer d’une certaine position sociale, pour être accepté au sein d’une certaine élite sociale ?

Mais la réalité du monde du pouvoir est tout autre. Pour une immense majorité des gens, ces deux questions sont sans intérêt. Rares sont les gens qui seront capables de conserver toute leur vie durant certaines valeurs morales imuables. Le plus souvent, les gens cèdent au fur et à mesure sur l’ensemble de leurs valeurs pour quelques parcelles de pouvoir de plus, pour avancer un peu plus dans l’échelle sociale. On dit aussi que ce sont seulement les premiers pas qui sont les plus difficiles, les plus coûteux. Au fil des renoncements, chaque nouveau renoncement est plus facile. Initialement, on se dit que l’on ne dépassera pas telle limite. Puis on arrive à cette limite, et l’on doit alors choisir de s’arrêter, de descendre du train, de se désolidariser, de perdre, ou bien on peut choisir de renier sa première promesse. Et après cela, ce sera terminé. Il n’y aura plus de limite.

Regardons cette histoire ressortie du frère de Ségolène Royal lors de l’épisode du Raimbow Warrior. Qui a ressorti cet épisode ? Cet homme savait-il, lorsqu’il s’est lancé dans la politique il y a vingt ou trente ans, qu’il irait jusqu’à là pour tenter de devenir président de la République française ? Jusqu’à de tels coups bas, pour conserver une chance d’être élu ou de se présenter ?

Je ne l’espère pas pour lui.

Y a-t-il des personnes pour lesquelles ses deux questions peuvent valoir. Il me reste à espérer que ma définition d’un être moral demeure valide : celui qui saura rester en dehors de ces tentations, ou bien celui qui saura y résister et conserver intactes les valeurs en lesquelles il croit.


Réflexion sept (10 septembre 2006)
Des relations entre Pouvoir et Morale (suite une)


Est-ce le Pouvoir qui corrompt ? Ou était-ce la morale de ces personnes corrompues qui était insuffisamment solide et fiable ? En d’autres termes, doit-on en rattacher la faute à l’individu ou bien aux institutions ?

L’exercice du Pouvoir n’est pas corrupteur pour une personne aux idéaux moraux inattaquables, qui connaîtrait la limite entre le bien et le mal, qui connaîtrait la valeur que l’on doit attacher à l’argent, aux honneurs et à l’idée qu’il se ferait de son intégrité morale.

Evidemment, ce type de personne n’est pas majoritaire au sein de l’espèce humaine. Pour des millions d’individus, seule va compter la réussite sociale et son apparence extérieure, l’image projetée. Ce modèle de comportement est notamment généralisé dans les sociétés de type occidentale, véhiculée par les médias et images publicitaires.

Il y existe un archétype de l’individu, du modèle parfait de réussite, de comportements, d’apparence. Cet archétype existe depuis plus d’une vingtaine d’années, hier celui du jeune cadre dynamique, devenu aujourd’hui celui du quadragénaire ou du sexagénaire branché.

Chacun d’entre nous devrait se poser cette question primordiale : que serais-je prêt à donner pour avoir du pouvoir, et que ne serais-je prêt en aucun cas à abandonner. Cette question devrait être poser dès le plus jeune âge, dès que l’enfant atteint une dizaine année. La réponse évoluera forcément avec l’âge, en bien ou en mal. L’argent peut ainsi avoir une beaucoup plus grande importance vers dix-huit vingt ans que plus tard, en ayant plus vécu. On a peut-être également plus envie de pouvoir à cet âge. Mais il existe aussi peut-être des valeurs plus importante, comme l’amour ou l’amitié, que l’on relativise peut-être en vieillissant.

Que serais-je prêt à donner pour disposer d’un pouvoir sur d’autres, pour disposer d’une certaine position sociale, pour être accepté au sein d’une certaine élite sociale. Comme le disait ’Hubert 41’, que serais-je prêt à abandonner de mes valeurs ou de mes principes pour voir satisfait mes besoins au sens de la pyramide de Maslow.

 
« La pyramide (dite de Maslow) est constituée de cinq niveaux. Nous recherchons d’abord à satisfaire chaque besoin d’un niveau donné avant de penser aux besoins situés au niveau immédiatement
supérieur de la pyramide.
niveau 1 : besoins physiologiques
niveau 2 : besoins de sécurité
niveau 3 : besoins d’amour, d’appartenance au groupe
niveau 4 : besoins d’estime des autres et de soi
niveau 5 : besoins d’accomplissement personnel. »

(source Wikipédia)


On est face à un questionnement faustien. Quelle valeur accorde-t-on à nos principes moraux (pour les personnes qui en ont) ? Notre morale, nos valeurs, ont-elles un prix, au-delà duquel on accepte de les vendre, de les renier, de les oublier ?


Réflexion six (9 septembre 2006)
Des relations entre Pouvoir et Morale


Il est trop simple de se considérer comme quelqu’un de moral tant que l’on n’a pas de pouvoir. La morale n’a de valeur que lorsqu’elle doit affronter l’envie, la tentation, ou la possibilité de se renier. L’être moral sera celui qui saura rester en dehors de ces tentations, ou bien celui qui saura y résister et conserver intactes les valeurs en lesquelles il croit.

Seul le Pouvoir peut permettre de mettre à l’épreuve la morale d’un être humain. Seul un homme de pouvoir ayant su préserver son intégrité morale devrait pouvoir être considéré comme véritablement moral. Et pourtant, même un homme sans aucun pouvoir sur une quelconque personne pourrait développer des comportements envieux ou amoraux, inacceptables en terme de morale. Mais cette personne, même en étant morale pauvre et sans pouvoir, ignorerait ses possibles réactions si elle était confrontée à l’exercice du pouvoir.

C’est pour cette raison que l’on dit du pouvoir que celui-ci corrompt. C’est parce que seul le pouvoir peut révéler notre véritable nature, peut nous pousser aux limites de résistance de nos valeurs morales. Et que seul le pouvoir peut faire voler en éclat nos croyances morales les plus ancrées et faire des hommes des monstres égoïstes.

La guerre aussi le peut. Mais c’est justement le pouvoir de tuer qui fait la guerre. La guerre n’est rien d’autre qu’une forme d’exercice du pouvoir, le plus brutal des pouvoirs, celui qui nous ramène à notre passé le plus archaïque, au règne du plus fort, au pouvoir par excellence.


Réflexion cinq (9 septembre 2006)
Du libre choix de chacun


Le Pouvoir est une notion universelle. Le fait de pouvoir exercer un pouvoir sur d’autres personnes n’est pas réservé à une petite minorité d’êtres humains. L’exercice du pouvoir sur d’autres est une constante générale de l’être humain, de l’homme ou de la femme. L’être humain n’est pas un être solitaire, mais un être social, reconnaissent presque tous les sociologues. De la sorte, presque tous les êtres humains se retrouvent dans la vie familiale dans des relations de pouvoir au minimum avec leurs enfants.

Les enfants vivent ainsi toute leur année d’enfance sous des relations de pouvoir plus ou moins équilibrées ou déséquilibrées dans leur milieu familial et dans le milieu scolaire. Ils se construisent (leur personnalité, leurs valeurs) dans ces deux environnements.

Chaque adulte a donc le choix de construire une certaine relation de pouvoir, d’éducation à l’égard de ses enfants et de ses proches dans le groupe de relations familiales. Il a le choix de réussir ou de rater cette relation, de faire mieux ou moins bien que les relations de pouvoir qu’il observe ou subit dans le reste de ses relations sociales. Toute personne évoluant au sein d’un groupe de relations familiales ne peut pas ainsi se considérer comme éloigné de l’exercice du pouvoir, notamment s’il est parent de jeunes enfants. Elle peut même s’exercer entre enfants au sein d’une même famille.

Le Pouvoir est donc une notion très répandue au sein de l’espèce humaine. Il y a forcément des relations de pouvoir que l’on va réussir, et d’autres que l’on va rater. La principale différence entre les êtres humains repose peut-être sur les relations de pouvoir que chacun d’entre-nous considère comme les plus importantes ; certains pouvant ainsi considérer la vie familiale comme une priorité, tandis que d’autres (souvent des hommes) vont mettre en avant le domaine professionnel, et considérer la vie familiale comme une domaine sans intérêt, sans enjeu, où les relations peuvent être inexistantes.


Réflexion quatre (5 septembre 2006)
Du pouvoir de contrainte
 

 
« (...) Dans un système simple, le pouvoir ne peut être que rapport de forces (force morale ou force physique). Mais les sociétés humaines sont complexes, et il existe tout un réseau d’obligations réciproques qui lient les gens, et les obligent à (ou les empêchent de) se comporter d’une certaine façon quand ils sont placés dans certaines conditions, au risque, sinon, de tout perdre. Il y a donc de nombreuses situations de pouvoir, et de multiples façons de classer l’exercice du pouvoir. »
(source Wikipédia)


Quand on parle du pouvoir, on pense souvent à la capacité de contrainte. La contrainte par l’usage de la force est la première des formes de contrainte possibles. C’est même l’une des premières formes de contrainte auquel l’enfant humain est confronté, que ce soit dans sa relation avec ses parents, ou dans ses relations avec ses camarades de crêche ou d’école.

L’usage de la force est également un élément fédérateur de nos sociétés humaines, un élément qui nous force à nous comporter de manière policée dans nos relations aux autres. Le pouvoir du gendarme ou du policier repose notamment sur cette possibilité de faire usage de la force, le droit d’en faire usage, droit qui nous est par ailleurs refusé, à nous autres citoyens.

Evidemment, si seul l’usage de la force caractérisait l’exercice du pouvoir, seuls les plus gros, les plus forts ou les plus armés d’entre nous détiendraient le pouvoir. Ceci n’est manifestement pas le cas dans la vie sociale de tous les jours, même si cela fonctionne effectivement de cette manière pour les enfants à l’école.


Réflexion trois (24 août 2006)
De la bureaucratie

 
« L’histoire est remplie d’exemples où le pouvoir politique a été utilisé nuisiblement ou d’une manière insensée (abus de pouvoir). Ceci se produit le plus souvent, quand trop de pouvoir est concentré dans trop peu de mains, sans assez de place pour le débat politique, la critique publique, ou d’autres formes de pressions correctives. Des exemples de tels régimes sont le despotisme, la tyrannie, la dictature, (etc...) »
(source Wikipédia)


La description que j’ai faite précédemment de l’exercice du Pouvoir en France ne me semble cependant même pas représentative de la seule démocratie. La même recherche du Pouvoir n’est-elle pas également visible dans toute organisation étatique, junte militaire, dictature, Etat totalitaire.

Une apparente différence pourrait ressortir de l’absence de droit dans ces Etats non démocratiques. Mais en même temps, c’est de la bureaucratie, des petits bureaucrates, qu’est venue le danger dans la France collaboratrice, dans l’Allemagne nazie, dans les pays communistes, ou dans les dictatures militaires, et non des puissants.

Bureaucratie (Wikipédia) : « Exercice autoritaire du pouvoir par un appareil administratif constitué par l’État ou par un parti unique dans un contexte non démocratique. »

Dans une dictature ou dans un Etat totalitaire, les puissants passent autant de temps qu’en démocratie à réfléchir et préparer leur ascension sociale. Leurs combats sont justes plus violents physiquement qu’en démocratie ; les règles de droit ne s’appliquant pas. Il y est aussi beaucoup plus dangereux de monter aux plus hauts postes de pouvoir.

La principale différence repose sur les actions des personnes du bas des échelons administratifs, qui peuvent appliquer de manière zélée et avec plaisir les ordres de leurs supérieurs. C’est peut-être là que se trouve la différence entre les deux systèmes ; l’absence de droits des personnes confrontées aux sans-grades (obscurs fonctionnaires, militaires, miliciens ...) dans un régime totalitaire ou dans une dictature. Car ces sans-grades disposent en régime non-démocratique d’énormes pouvoirs délégués par leurs supérieurs, sans risque de procès judiciaires ou d’être désavoués. Alors qu’en démocratie médiatique, les sans-grades sont limités par l’existence des lois et des médias.

Il y a un autre enseignement (une évidence, une tautologie)à retirer de ce point. En démocratie, ce sont les droits et les instances judiciaires (ou médiatiques) qui permettent de contrebalancer l’exercice du pouvoir. Et c’est le pouvoir nu de l’arbitraire qui s’applique dans les états non démocratiques.


Réflexion deux (23 août 2006)
De l’influence des réseaux


Le Pouvoir consisterait en « la capacité de certaines personnes de produire des effets recherchés et prévus sur autrui. » (Dennis Wrong)

Je n’ai traité hier que de la recherche personnelle du Pouvoir par les individus composant la société. Cette réalité correspond à la société française moderne, une société démocratique fortement hiérarchisée et technocratique, où la position sociale de chacun ne dépend normalement que des aptitudes de chacun ; chacun étant censé partir dans la vie avec des chances égales, à la naissance.

Bien sûr, tout le monde sait que c’est un mythe, et que certains enfants, selon l’appartenance sociale de leurs parents, auront plus de chance de réussite dans la vie que d’autres. Un fils d’énarque aura de fortes chances de devenir lui-même énarque. Delphine Arnault, fille du milliardaire Bernard Arnault, avait aussi de fortes chances de devenir milliardaire.

Dans une présentation sociologique moderne du Pouvoir, celui-ci apparaît ainsi comme la résultante des réseaux personnels de chacun d’entre nous, ce qui explique que l’appartenance sociale de nos parents et les réseaux auxquels eux-mêmes appartiennent puissent influer sur notre propre position sociale.

Toujours d’après Wikipédia,

 
« Un réseau est un ensemble de noeuds ou pôles reliés entre eux par des canaux. Les noeuds peuvent être des points massiques simples ou des sous-réseaux complexes. Les canaux sont à leur tour des flux de force, d’énergie ou d’information.

L’étymologie du mot remonte au latin rete qui signifie « filet », donnant l’adjectif « réticulé », caractérisant les objets ayant une structure de filet, notamment les réseaux.

Un réseau social est un ensemble de relations entre des individus.

Le nombre de Dunbar est le nombre d’amis avec lesquels une personne peut entretenir une relation stable à un moment donné de sa vie. Cette limite est inhérente à la taille de notre néocortex. Elle est estimée à 150 personnes. »  

 

La société française, supposée être démocratique, est d’abord une société à réseaux, dans laquelle la position de chacun dépend non seulement de sa richesse et de son niveau de formation, mais surtout de ses réseaux de relations. Et ce système résonal me semble par essence non démocratique, car il s’entretient lui-même, et rejette souvent toute personne qui ne lui appartient ou qui cesse de lui appartenir. Car de nombreux réseaux de relations sont des réseaux fermés. Internet par contre par définition est un réseau ouvert. Le monde politique par opposition est un exemple de réseau fermé. On peut dire qu’on entre dans un réseau de relations fermé par adoubement, par cooptation. Dans certains groupes (maçonniques), on parle même d’initiation, comme dans certaines grandes écoles françaises.

Mais en fait, parler de réseaux ne fait que normaliser une situation anormale où les puissants ne se retrouvent qu’entre eux, et ne fait qu’expliquer la manière dont ils y sont arrivés. Cela permet aussi à la majorité d’entre nous d’essayer de faire comme les puissants (de les singer), en se gargarisant d’appartenir à quelques réseaux de connaissance, en ignorant toutefois que les principaux réseaux qui permettent d’accéder aux plus hauts postes de pouvoir sont complètement inaccessibles. Et cela ne change rien pour ceux qui sont exclus de la société et du commerce de leurs semblables.

Cette notion de réseau n’apporte pas grand chose ; c’est une création de sociologues ou de médiologues en mal de reconnaissance. Mais elle permet d’éclairer d’un jour nouveau le problème fondamental de la démocratie occidentale, le fait qu’elle soit fantoche. Grâce cette notion, on s’aperçoit ainsi que ce sont quelques réseaux qui contrôlent les démocraties modernes, ce qui explique l’absence de véritables ouvertures de ces soi-disant démocraties politiques.

Mais en même temps, défaire leur influence est pratiquement impossible. Une révolution comme celle de 1917 ne ferait que remplacer un réseau par un autre réseau, comme l’expérience du parti communiste soviétique nous l’a montré. L’interdiction des réseaux de relations a aussi déjà tenté, notamment en 1791 (loi le Chapelier) lorsque le législateur avait interdit les coalitions et notamment les corporations. Mais les réseaux sont par essence insaisissables et se reconstitueront malgré tout, sous une forme ou une autre.


Réflexion une (22 août 2006)
De la recherche individuelle du Pouvoir


Le Pouvoir est la notion socio-philosophique qui m’interpelle et m’intéresse le plus. Je me suis toujours demandé comment était-il possible que le Pouvoir puisse transformer les gens qui s’en approchaient. J’ignore si je serais moi-même transformé si l’on me donnait un quelconque pouvoir sur des gens, et plus je vieillis, et plus je crains que j’en serais effectivement transformé.

Ma fascination envers le Pouvoir remonte à la lecture d’un livre de Pierre Clastres, dénommé ’La société contre l’Etat’. Par pouvoir, il entend essentiellement parler de l’exercice du pouvoir coercitif, même si les sociétés amérindiennes qu’il y étudie s’en protègent justement en limitant l’exercice du pouvoir à la prise de parole, au devoir et au droit de parler.

Pratiquement toutes les sociétés humaines sont malades du Pouvoir ; malades au sens où le Pouvoir les a toutes envahit et occupent les aspirations de pratiquement tous leurs habitants. L’exercice du Pouvoir n’est même pas propre à l’homme ; les chimpanzés ainsi que d’autres primates (les gorilles par exemple) connaissent aussi la notion de Pouvoir au sein de leurs groupes.

Qu’est-ce que le Pouvoir ? D’après Wikipédia, le Pouvoir c’est : « la capacité à obtenir des choses et surtout des individus qu’ils se comportent comme on le souhaite. »

Dans notre société française, le spectacle du Pouvoir correspond d’abord à la concurrence politique et médiatique que se livrent les divers candidats à l’élection présidentielle de 2007, que ce soit Sarkozy, Royal, Hollande, Chirac, de Villepin, Fabius ou d’autres. Mais le spectacle du Pouvoir est partout. Dans les petites communes où les candidats aux prochaines élections fourbissent leurs armes pour attirer les électeurs. Dans les partis politiques où presque tous les adhérents rêvent d’un poste d’élus et où chaque candidat homme ou femme cherche le meilleur siège. Dans les écoles ou dans les entreprises où les jeux de pouvoir visent à accroître ou assurer le pouvoir de multiples petits barons. Le Pouvoir est aussi visible dans les cours de récréation des maternelles, des écoles, des collèges et des lycées, où les processus de soumission et de domination entre enfants et adolescents sont aussi légions. Il est visible dans les organisations syndicales, dans les associations, même si tout leurs membres ne visent pas forcément l’exercice du pouvoir. Il est également visible à la tête des grandes et des petites entreprises, comme les exemples de Havas (prise de pouvoir de Bolloré) ou de Vinci (combat entre Zacharias et Huillard) nous le rappelle régulièrement.

Mais le pouvoir n’est souvent rien en lui-même pour ces personnes. Si tôt acquis, tout poste n’est qu’un tremplin pour un nouveau poste, pour accéder à un pouvoir plus élevé, qui sera lui-même un nouveau tremplin. C’est particulièrement vrai en politique, où un maire visera à être conseiller régional, un conseiller régional président de région ou député, un député ministre ou sénateur, un ministre président ou secrétaire de parti politique puis président de la République. C’est également vrai dans le monde de l’entreprise, où l’ouvrier voudra devenir contremaître, le contremaître devenir cadre ou chef de chantier, le chef de chantier devenir directeur, le directeur devenir PDG, le PDG chercher à devenir PDG d’une plus grosse boîte, et le PDG de la plus grosse société chercher à acheter le plus possible d’autres entreprises pour continuer à grossir. On retrouve le même système dans la haute fonction publique française, où tout poste ne sert que de faire-valoir pour un poste encore plus intéressant.

Quelle énergie dépensée, me direz-vous, et en pure perte pour la collectivité et le bien public, parce que, pendant tout ce temps où ces personnes rivalisent de perfidies, de coups bas, et de viles flatteries, qui s’occupe des activités qui leur sont attribuées ? Heureusement que certaines personnes travaillent quand même, ayant tiré un trait sur leurs ambitions.

Ces ambitieux sont-ils si rares ? J’en connais beaucoup trop. Bien sûr, ils agissent aussi parfois, le plus souvent de manière bien visible, de façon à pouvoir être remarqué. Ces gens-là n’agissent jamais gratuitement ni innocemment.

Et même arrivés au sommet de leur ambition, lorsque plus aucun poste ne peut être supérieur à celui dont ils disposent (président ou dirigeant d’un Etat ou du plus gros groupe), il leur faut encore se battre continuellement pour se défendre de leurs challengers, et pouvoir se représenter la fois suivante en position de l’emporter.

Le plus étrange, c’est que ces personnes n’usent pratiquement jamais ou rarement de ce pouvoir qu’ils recherchent si désespérément, puisqu’ils ne pensent qu’à accroître leur position sociale. C’est une aberration de la recherche du Pouvoir, car ce Pouvoir qu’ils recherchent sans en user se trouve délégué à ceux qui les entourent, qui n’en usent eux-mêmes que rarement, préoccupés d’en obtenir le plus possible une autre fois.


Saucratès


23/11/2010
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