Critiques de notre temps

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Quelques éléments récents sur l’origine de l’Homme

Quelques éléments récents sur l’origine de l’Homme

Par Saucratès 

Saint-Denis de La Reunion, samedi 18 mai 2024

 

Un article de la revue «Espèces» de septembre 2023 a publié un petit entrefilet sur «nos multiples racines africaines».

 

«Homo sapiens était présent en Afrique il y a au moins 300.000 ans, mais le peu de fossiles et de données archéologiques connus pour cette période (au Maroc, en Éthiopie et en Afrique du Sud) fait que le scénario de son origine africaine demeure flou. Pour contourner le problème, des chercheurs ont utilisé le génome de 290 individus actuels (quatre groupes de différentes régions africaines et des individus eurasiens) et les ont analysés à l’aide d’algorithmes informatiques. Résultat : une histoire complexe ! Une première divergence aurait eu lieu il y a un million d’années à partir d’une population africaine unique. Une des deux branches créées à partir de ce tronc se serait elle-même divisée en deux, et l’un de ces rameaux aurait quitté l’Afrique il y a 600.000 ans et engendré la lignée des Néandertaliens. Les deux branches restées africaines se seraient entrelacées de nombreuses fois durant des centaines de milliers d’années, avec deux événements de fusion. La première, il y a 120.000 ans, fut à l’origine d’une population ancestrale au Sud de l’Afrique ; la seconde, il y a 100.000 ans, qui a abouti à la formation des populations de l’ouest et de l’est de l’Afrique, ainsi que de celles qui ont quitté l’Afrique et colonisées autres continents il y a des dizaines de milliers d’années. Les échanges incessants de gènes qui se sont poursuivis durant presque un million d’années seraient à l’origine de la diversité génétique d’Homo sapiens. Celle-ci a peut-être contribué à sa survie, à la différence de son cousin Homo neanderthalensis moins diversifié.»

 

Article paru dans la revue Espèces n°49 de septembre 2023, page 11, recensant un article paru dans Nature, pages 755 à 763, de A.P. Ragsdale «A weakly structured stem for human origins in Africa»

 

La découverte de fossiles d’Homo sapiens au Maroc remontant à 315.000 ans, c’est-à-dire remontant bien au-delà des croyances antérieures de l’apparition d’Homo sapiens, avait notamment été présenté en 2017 dans l’article suivant du Monde. Cette découverte évidemment controversée repoussait ainsi l’apparition d’Homo sapiens d’au moins 100.000 ans.

 

https://www.lemonde.fr/paleontologie/article/2017/06/07/la-decouverte-qui-bouleverse-l-histoire-d-homo-sapiens_5140236_1650762.html

 

A noter que l’article de la revue Espèces ne donne pas à un âge à l’apparition d’Homo sapiens. Mais le simple fait que l’analyse de notre génome puisse permettre de remonter jusqu’à faire remonter notre horloge biologique jusqu’à un million d’années dans le passé, me paraît absolument invraisemblable. 

L’analyse génétique décrite par A.P. Ragsdale me laisse néanmoins insatisfait. Pourquoi se contenter de génomes d’individus uniquement eurasiens et ne pas s’être également intéressés au génome d’individus mélanésiens, australiens ou d’indiens d’Amérique du Sud, pour vérifier l’origine de leurs migrations. Mais ces études doivent exister.

 

La science sur l’origine de l’Homme évolue constamment. Il y a un peu plus d’une décennie, les études basées sur l’ADN mitochondrial des cellules avait permis de faire remonter l’existence d’un goulot d’étranglement de l’humanité remontant à environ 100.000 ans. Vers la même époque, une étude se basant sur les évolutions des langues humaines etait également parvenue aux mêmes résultats, faisant remonter par la paléolinguistique la première langue parlée par l’humanité aux alentours de 100.000 avant notre ère. Une population unique de quelques milliers d’individus parlant une langue unique à l’origine de toutes les langues actuelles et qui était passée à deux doigts de disparaîtré. 

Ces études se contredisaient-elles forcément ? Peut-être pas. Potentiellement pas. À moins que les progrès permanents en matière de recherche génétique ne repoussent toujours plus les connaissances sur l’origine de l’Homme. 

 

Parmi d’autres publications observées, j’ai trouvé cette étude publiée sur le site de l’Ecole normale supérieure (gage de sérieux) sur les comparaisons de l’ADN mitochondrial entre Homo sapiens et Homo neanderthalensis , par Gilles Furelaud et Françoise Ibarrondo.

 

«(…) Les études réalisées de manière plus générale sur le génome mitochondrial de l’homme actuel suggèrent qu’il est âgé (sous sa forme actuelle) d’environ 163 000 ans. Or la séparation initiale entre les lignées ayant donné H. sapiens et H. neanderthalensis est estimée à environ 500 000 ans B.P. (de 365 à 853 000 ans B.P. selon les estimations les plus larges) d’après des calculs d’horloge moléculaire. Cela confirme l’idée d’un génome mitochondrial ayant évolué de manière séparée chez ces deux espèces, et donc l’absence de mélanges génétiques entre sapiens et Néandertal.»

 

https://planet-vie.ens.fr/thematiques/evolution/lignee-humaine/adn-mitochondrial-homo-sapiens-et-homo-neanderthalensis

 

Ils utilisent dans cette étude le même arbre d’origine de l’humanité qu’ils indiquent provenir des conclusions de Krings et al. (1997, 1999 et 2000) et Ovchinnikov (2000), citées dans « Aux origines de l’humanité – La génétique au service de la quête de nos origines », p 503). (les séquences de chimpanzés sont utilisées comme groupe extérieur pour enraciner l’arbre).

 

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De la même manière, la limite de ses études demeure la possibilité qu’il existe des individus, des familles ou des groupes isolés qui pourraient remettre en question la profondeur de tous ces arbres génétiques de l’origine de l’Homme, les repoussant toujours plus loin dans le passé. 

Comment retracer une histoire unifiée de l’humanité en se basant sur ces multiples outils que ce sont l’étude de la paléolinguistique, l’histoire des mythes et des mythemes cheres à Loic Le Quellec, et la recherche génétique sur l’ADN et l’ADN mitochondrial ?

 

Autre élément intéressant : l’existence d’une branche récente d’hominidés contemporaines de l’humanité récente, à savoir Homo naledi. 

https://www.lemonde.fr/paleontologie/article/2015/09/11/homo-naledi-une-decouverte-qui-laisse-perplexe_4751937_1650762.html

 

Homo naledi est une espèce de primates de petite taille ou d’hominidés qui aurait vécu au sud de l’Afrique jusqu’aux alentours de 300.000 ans avant notre ère, et qui semblent, selon Lee Berger et ses collègues, avoir pratiqué des rites d’inhumation et des rites mortuaires sur leurs morts. «Lee Berger et ses collègues font donc l’hypothèse que les corps ont été transportés là par leurs contemporains, qui auraient pu, à la lueur de torches, pratiquer une forme d’inhumation – un soin apporté aux défunts et un intérêt pour l’au-delà documentés uniquement à ce jour pour Homo sapiens et, dans des cas plus discutés, pour Homo neanderthalensis ou des prénéandertaliens.». 

Homo naledi serait ainsi particulièrement éloigné morphologiquement  de nous mais il aurait pratiqué des rites d’inhumation, en prenant soin de leur mort et en les enterrant dans un lieu mythique, pratiques que nous serions les seuls autres espèces de primates ou animales à pratiquer également, ce qui leur donne un caractère fondamentalement humain. Et ils ont été contemporains de l’humanité à la pointe septentrionale de l’Afrique. Quelle part de leur génome retrouve-t-on dans notre génome, dans le génome des populations habitant encore l’Afrique septentrionale ?
 
 
Saucratès



18/05/2024
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