Critiques de notre temps

Critiques de notre temps

De l'impôt

 

Réflexion six (29 août 2012)
Les grands groupes français organisent la fuite devant l'impôt de leurs plus riches salariés ...

 

Les entreprises françaises transfèrent hors de France leurs plus gros salaires, pour leur permettre d'échapper à la hausse de la fiscalité française. Les banques envisagent ainsi de transférer leurs salles des marchés à Londres (et l'emploi de leurs traders), chez les britanniques qui avaient proposé de dérouler le tapis rouge pour les riches contribuables français. Le pire, c'est que les mêmes traders avaient fui l'Angleterre à l'époque de la crise financière lorsqu'ils avaient perdu leur travail bien rémunérés, pour venir profiter de l'état providence français et son système d'allocation chômage bien plus intéressant que son homologue britannique. Les grandes entreprises envisagent aussi de transférer leur siège social et les membres de leur comité de direction à l'étranger, dans un pays fiscalement accueillant, pour les mêmes raisons (la Société Générale qui envisage de transférer des postes de traders à Londres, LVMH et son président Bernard Arnault qui étudie la délocalisation du comité exécutif du groupe dans une capitale étrangère, Schneider Electric et son président Jean-Pascal Tricoire qui a transféré son comité exècutif à Hong-Kong ...).

http://www.lemonde.fr/economie/article/2012/08/23/londres-attire-les-refugies-fiscaux-des-banques-francaises_1749106_3234.html

 

Il y a avant tout dans ces comportements un problème de morale. On ne peut pas toujours rechercher à maximiser son intérêt personnel dans la vie sociale. C'est même strictement incompatible, même si de très nombreuses personnes semblent gérer leurs relations sociales de cette manière : affables et prévenants avec les personnes qui peuvent leur apporter quelque chose ou plus puissants qu'eux ; secs et désagréables avec tous les autres. Chercher à payer le moins d'impôts et de taxes dans certains cas lorsque cela nous arrange ; chercher à bénéficier du maximum d'allocations, de droits et d'aides dans d'autres cas. C'est exactement ce que recherchent les traders et autres hauts diplômés réfugiés à l'étranger, hors de France, pour échapper au fisc français, mais qui n'hésiteront pas à revenir en France le jour où leur intérêt le leur commandera, le jour où ils subiront un épisode de chômage ... Les mêmes également qui appelleront à l'aide les pouvoirs publics français lorsqu'ils se trouveront en danger quelque part, lorsqu'il faudra les arracher à des terroristes ou à une guerre civile, où il faudra faire valoir leurs droits. Tous ces gens-là se rappelleront parfaitement être de nationalité française ce jour-là, pour bénéficier des avantages de l'état providence français qu'ils ont pourtant toujours refusé de financer !

 

Le même problème de morale se retrouve aussi chez tous ceux qui vivent du travail au noir, non déclaré, et profite en même temps des diverses allocations, minimas sociaux et aides financières de la collectivité. Je ne fais pas de différences morales entre ces diverses personnes, même si les sommes en jeu sont beaucoup plus faibles dans ce dernier cas ; les économies d'impôts que ces personnes réalisent étant beaucoup plus faibles que celles des premiers ...

 

J'ai à l'égard de ces personnes, qui représentent pourtant une fraction très importante de notre population, un sentiment de honte. Honte d'appartenir à la même communauté nationale, et rage de financer les avantages et les aides dont ils sont les principaux bénéficiaires, dont je ne bénéficie jamais mais dont aucun d'eux ne participent au financement. Contre ces populations, il me semble qu'il faudrait prendre des mesures violentes, pour éliminer les avantages indus dont ils bénéficient. Pour les personnes vivant du travail non déclaré et des allocations sociales, il faudrait plus de contrôles sociaux et fiscaux. Pour les très nombreux expatriés fiscaux, il faudrait qu'il soit possible de percevoir les impôts qu'ils devraient payer en France, ou bien de leur retirer la nationalité française et tous les avantages, sociaux, hospitaliers et diplomatiques, qui vont avec ... Qu'ils deviennent des apatrides ! N'est-il pas insupportable de voir Johny Haliday (alias Jean-Philippe Smet) se faire soigner gratuitement dans un hopital français, le CHU de Guadeloupe et de Martiniques aux Antilles, alors qu'il a fait le choix de s'expatrier en Suisse pour ne plus payer d'impôts et ne plus financer le système de soin français ?

 

Quant aux entreprises françaises qui jouent à ce jeu immoral, il faudrait compliquer leurs interventions en France et le contrôle des entreprises françaises qu'elles détiennent. Si tous les dirigeants d'un grand groupe français sont expatriés fiscalement dans un autre état, européen ou étranger, qu'ils ne peuvent plus être présents qu'un nombre de jours restreints en France, comment pourraient-ils diriger des entreprises en France, décider du devenir de ces entreprises, et récupérer les bénéfices de ces activités françaises ?

 

Est-il possible d'être riche et moral ? Un philosophe avait posé la question si le capitalisme pouvait être moral. Pour moi, la réponse est non, comme le prouvent les milliers de traders qui ont abusé du système entre 2008 et 2010 ou les comportements de la Société Générale, de LVMH ou de Schneider Electric ... ou de France Telecom entre autres milliers d'exemples !

 

 

Réflexion cinq (23 décembre 2009)
Paradis fiscaux - Au-delà du secret bancaire ... Les trusts


Depuis le G20 d’avril 2009, le débat s’est concentré sur la question du secret bancaire en oubliant celle de l’anonymat garantie par les trusts. En effet, l’opacité des paradis fiscaux ne se limite pas à la question des comptes bancaires. Certains d’entre eux offrent aux particuliers et aux entreprises de nombreux autres services qui permettent de dissimuler leur identité à l’administration fiscale et aux autorités judiciaires de leur pays d’origine. Prête-noms, sociétés écrans, trusts, fondations… tous ces montages aux intitulés et aux formes juridiques multiples n’ont en fait qu’un objectif : l’évasion fiscale ou le blanchiment d’argent. 

Comment ça fonctionne ?

Un trust (fiducie) est un montage juridique par lequel un particulier ou une entreprise (fiduciant ou « settlor ») transfère irrévoquablement la propriété de fonds ou de biens à une autre personne (fiduciaire ou « trustee ») chargée de les gérer dans l’intérêt d’un ou plusieurs bénéficiaires. Pour le fiduciant, l’avantage du trust est qu’il est irrévocable, contrairement au mandat de droit français, ce qui en fait un mécanisme recherché en matière de succession. Ce dispositif n’est pas condamnable si l’identité des trois parties prenantes est connue.


Quels sont les avantages ?

Mais, dans la plupart des paradis fiscaux et judiciaires, l’anonymat des donneurs d’ordre et des bénéficiaires est justement au cœur du dispositif. En effet, la particularité du trust, de droit anglo-saxon à l’origine, est de ne pas être soumis à enregistrement car il est considéré comme un simple contrat et non comme une entité juridique, soumise elle à déclaration, à l’instar des sociétés, personnes morales, etc. Comme dans la plupart des pays, il n'est pas prévu d'enregistrer les trusts, l’anonymat des fiduciants et des bénéficiaires est ainsi totalement garanti. Dans les paradis fiscaux et judiciaires, cela permet tous les dérapages. Par exemple, quand le bénéficiaire n’est autre que le fiduciant lui-même ! Destiné à leurrer l’administration fiscale et les autorités judiciaires, le trust permet d’obtenir un résultat très proche du secret bancaire absolu.


Que proposer ?

Il faut mettre fin aux sociétés écrans et aux prête-noms en rendant obligatoire la tenue par chaque État ou territoire d’un registre national des trusts et autres structures juridiques qui concourent à l’opacité du système financier. Ce registre doit préciser le nom de leurs bénéficiaires réels, de leurs opérateurs et de leurs donneurs d’ordre, et rester ouvert aux autorités fiscales, douanières et judiciaires des autres États.

Où sont les trusts ?


Ces mécanismes de prête-noms font la fortune des îles anglo-normandes comme Jersey, Guernesey et l’île de Man qui dépendent en partie de la Couronne britannique mais aussi de la City de Londres qui est, de manière plus surprenante, la première pourvoyeuse de trusts. Des services équivalents existent également en Europe continentale, comme par exemple les fondations au Liechtenstein à l’origine d’un scandale récent. Des entreprises comme Michelin, Adidas et Elf sont en effet soupçonnées d’y avoir placé 800 millions d’euros pour échapper à l’impôt. L’opacité entourant ces montages juridiques est telle qu’il est impossible de chiffrer leur nombre et encore moins les sommes qu’ils détiennent. Un rapport du Parlement européen a d’ailleurs listé, en avril 2009, les différentes formes de prêtes-noms et leur localisation.
http://www.stopparadisfiscaux.fr/content/au-del%C3%A0-du-secret-bancaire%E2%80%A6-les-trusts

http://www.journaldunet.com/economie/magazine/dossier/paradis-fiscal-la-liste-de-tax-justice-network/city-de-londres-une-plateforme-financiere-pratique.shtml

 

 

Réflexion quatre (20 mai 2008)
L'évasion fiscale et les migrations internationales de contribuables migrateurs ?


On a ainsi appris mardi en lisant le Figaro que 843 redevables de l'impot sur la fortune (ISF) avaient quitté la France en 2006 pour des cieux plus cléments en matière fiscale (la Belgique, la Suisse, le Royaume-Uni et les Etats-Unis regrouperaient environ la moitié des destinations choisies par ces drôles d'oiseaux migrateurs). Ils n'étaient environ que 650 l'année précédente (2005). Selon le quotidien, en dix années, ils seraient au total 4.658 contribuables à avoir choisi la même solution ...

Cela conforte évidemment la droite libérale dans son discours d'élimination de l'ISF ... dixit le rapporteur général du Budget au Sénat, Philippe Marini. Ces 843 contribuables ayant quitté la France en 2006 auraient apporté avec eux 2,8 milliards d'euros de capitaux au total.

Ce qui me gêne par contre profondément, c'est que ces drôles d'oiseaux migrateurs continuent de bénéficier de toutes les facilités octroyées par la société française et de tous les biens publics financés sur les deniers des contribuables restants.

1. Ces contribuables 'migrateurs' demeurent présents le plus souvent pratiquement la moitié de l'année en France ...

2. Ils se font soigner le plus souvent lorsqu'ils tombent malades dans les hôpitaux publics français ... et bénéficient en plus du fait, de leurs relations et de leur argent, de rendez-vous rapides auprès des grands docteurs payés sur fonds publics, auxquels ils ne participent ...

3. Ils bénéficient des réseaux d'infrastructures aériennes et autoroutières qu'ils utilisent même plus souvent que les français qui les financent par leurs impôts ...

4. Ils ont l'assurance d'être protégé par la diplomatie française s'ils se trouvaient en face de difficultés à l'étranger, par exemple dans le pays où ils ont choisi d'émigrer pour payer moins d'impôts (Argentine pour le chanteur ) ...

5. Ce sont les consommateurs contribuables français, qui, le plus souvent, en plus de financer les biens et les services publics que ces drôles d'oiseaux migrateurs utilisent, achètent par ailleurs les produits qui enrichissent ces personnes (disques de Johny Halliday, de Florent Pagny ou de Richard Cocciente ... produits d'autres entreprises dont les patrons se sont exilés ... Jean Marie Messier ...) ...

Evidemment, la justice veille. Mais je trouverais plus normal que ces personnes soient interdites de toute utilisation de biens et services publics en France.


Réflexion trois (21 septembre 2006)
Zéro impôt ou de l’art de les transférer à d’autres


Sur leur blog paru le 14 septembre (2006), Malika Elkord et Sylvie Prioul nous parlaient de la commune de Bellefontaine et de son maire (Gilbert Boutin), qui venaient d’être distingués du prix de la Marianne d’Or pour ne pas faire payer d’impôts locaux à ces administrés. Comme le soulignaient les deux journalistes du Nouvel Observateur, cette récompense s’inscrit d’abord dans l’actualité électorale. Alain Trampogliéri, initiateur de ce prix, observait que Bellefontaine, 159 habitants, était «un exemple qui devrait inspirer l’ensemble des candidats à la présidentielle».

Au delà de la répétition de ce ’débat’ de la semaine dernière (il n’y eu point beaucoup d’arguments échangés), il me semble qu’il faut dépasser cette analyse pour s’interroger sur ce qui est caché derrière cette notion de ’zéro impôt’, et notamment le transfert des charges que devraient couvrir ces impôts à d’autres contribuables.

Le débat du ’zéro impôt’ me semble une abomination. Les impôts locaux tout comme l’impôt sur le revenu voire l’impôt de solidarité sur la fortune sont une nécessité ainsi qu’un geste citoyen. Le seul débat doit concerner leur montant. L’impôt est en effet la contrepartie de services publics consentis à tous les citoyens ainsi qu’aux étrangers (et aux expatriés fiscaux). L’exemple de Bellefontaine n’est pas aussi simple. Malika Elkord et Sylvie Prioul rappellent qu’un certain nombre de compétences (écoles, habitat, économie et tourisme, pompiers, etc.), ont été transférées depuis 1995 à une communauté de communes, et que l’équipe municipale a alors décidé de ne plus prélever la part communale. Les administrés de Bellefontaine continuent ainsi à payer des taxes foncières et d’habitation, mais sans part communale.

Le cas de Bellefontaine n’est non seulement pas généralisable mais est en plus pervers. Bellefontaine peut se retirer de ses tâches régaliennes uniquement parce qu’elle compte sur la solidarité locale et nationale. Ainsi, «quand il a fallu restaurer l’église, le département et la communauté de communes ont versé une subvention » (cf. le blog de Malika Elkord et Sylvie Prioul). Mais d’où sort cet argent ... des impôts locaux de tous les habitants de la communauté de communes, qui payent tous pour Bellefontaine. Bellefontaine n’aurait-elle pas mieux fait de continuer à récupérer sa partie des impôts locaux, pour financer ce genre de dépenses. Rien ne l’empêchant cependant si elle le souhaite de conserver un train de dépenses faible. En tout cas, les impôts locaux du reste de la communauté de communes auraient pu être un peu moins élevés.

Comme je l’écrivais en commentaire, généraliser l’absence d’imposition locales à toutes les communes correspondrait à cesser de souhaiter des routes entretenues ou même construites, des écoles pour nos enfants (car les personnels communaux sont payés par les communes), des policiers communaux pour y assurer la sécurité. Cela me semble impossible, sauf à être sans enfant, n’être jamais malade, rouler en 4x4 (et polluer à tout va), et faire partie d’un gang de malfaiteurs ou d’un groupe d’autodéfense.

Cependant, on oublie facilement que les impôts (même locaux) servent à financer des investissements (routes mais pas seulement). Les réparations de l’église ont dû être financées par d’autres contribuables. Mais la construction de la salle polyvalente de la mairie n’avait-elle pas non plus été financée par des impôts locaux de l’époque. Une commune sans moyens financiers est une commune qui ne construit plus, qui ne répare plus.

Et supprimer les taxes locales, c’est un transfert des investissements à réaliser sur les générations suivantes. Bellefontaine ne construira plus rien tant qu’elle n’imposera pas ses habitants. Et ses habitants ne sont plus en droit de réclamer de nouveaux investissements de leur maire. Sans les impôts passés, il n’y aurait rien à Bellefontaine. Je me demande également si cette décision est bien innocente. Qui sera prêt à remplacer une équipe municipale qui s’investit autant dans l’entretien et le fonctionnement de la commune ou de la voirie ? N’est-ce pas une assurance pour le maire de conserver son fauteuil ad vitaem eternum ?

Donc, ce débat sur le ’zéro impôt’, c’est le débat sur le transfert sur d’autres (les contribuables des autres communes, nos descendants) des charges que nous devrions financer. Et ce n’est rien d’autre. A l’échelle d’une vie d’homme politique, ce n’est peut-être pas grand chose.

Derrière ce débat d’une meilleure utilisation des fonds publics pointe aussi autre chose. Evidemment, les électeurs de Bellefontaine n’ont pas à s’inquiéter de possibles détournements de fonds de leur maire. Mais ce que je sens pointer derrière ce débat de la Marianne d’Or, c’est une mise en cause de la fonction publique et de son coût financier. C’est la possibilité d’un remplacement de la fonction publique par des élus municipaux volontaires ou par une secrétaire à mi-temps non titulaire. Mais encore une fois, n’est-ce pas transférer les possibles erreurs de cette équipe municipale sur d’autres ou sur les générations futures. Imaginons que des entretiens ou des réparations soient mal effectués (sur des routes, des monuments, des passerelles ...) et qu’il y ait mort d’homme (ou de femme ou d’enfant), de résidents ou de touristes, le coût de cette économie minime d’impôts ne pourra-t-il pas être considéré comme excessif ?

Le comportement égoïste de certains (qui se cache derrière cette notion de ’zéro impôt’ ne fait-il pas courir un risque énorme au reste de la société, en plus du transfert sur d’autres de la charge d’impôt ?
 

 
Réflexion deux (2 août 2006)
De l’état des finances publiques de la France
Une lecture d’un article d’Alexandre Siné


Les partis politiques français peuvent-ils encore promettre monts et merveilles à leurs électeurs pour les prochaines échéances électorales de 2006 ?

Le constat est accablant : après 30 années de déficits publics successifs (le dernier budget voté à l’équilibre remonte à 1975), le déficit public de la France a dépassé le cap des 1.000 milliards d’euros en 2005 (et bien plus en tenant compte des provisions pour retraites des fonctionnaires que l’Etat devrait comptabiliser). La dette publique représente plus de 65% du PIB français en 2005 (hors provisions de retraites), soit plus de 16.000 euros par habitants.

Les dépenses liées aux rémunérations des fonctionnaires et au paiement des intérêts de la dette représentent aujourd’hui plus de 60% du budget de l’Etat ; le solde seul restant disponible pour les interventions et pour le financement des investissements.

En regard, la valorisation de l’ensemble des actifs de l’Etat ne dépasse pas une centaine de milliards d’euros, soit 10% à peine de la dette publique. Même en vendant tout ce que l’Etat possède (biens immobiliers, entreprises publiques .....), l’Etat ne remboursera qu’une infime partie de ce qu’il doit, et ne financera que deux ou trois années de déficit public.

Ces éléments d’information sont tirés de l’article "Etat imposant, Etat impuissant, l’insoutenable rigidité des dépenses de l’Etat en France" publié dans Futurible n° 313, novembre 2005 et écrit par Alexandre Siné (chargé de mission à la Direction du Budget du Ministère de l’Economie).

Dans cette situation pourtant, on entend en permanence des syndicats contester la diminution du nombre de fonctionnaires et des partis politiques d’opposition dénoncer l’apparition de cagnottes fiscales et proposer de nouvelles dépenses publiques. Leurs opposants au gouvernement ne proposent toutefois que de continuer à diminuer les impôts des plus riches.

Pendant combien de temps encore les prochains gouvernements pourront-ils laisser cette machine s’emballer, avant d’être obligé de réagir ?

Cet article à l’intérêt d’étudier les diverses possibilités qui pourraient permettre de résoudre ce problème. Selon l’auteur, l’augmentation des recettes est difficilement envisageable car le poids des prélèvements dépasse déjà 43% à 44%, et que seuls quelques pays (dits scandinaves) dépassent tout juste ce taux. L’augmentation de la croissance de l’économie française apparaît également comme insuffisante, qui permettrait au mieux de diminuer de quelques milliards d’euros le déficit public, sans commune mesure avec ce qui serait nécessaire. Enfin, le retour à une inflation plus élevée, qui permettrait de diminuer le poids de la dette, apparaît impossible dans le cadre de l’euro, et très difficile dans le cadre d’une sortie de la France de la monnaie unique européenne.

La conclusion de cet article, que peut partager toute personne un peu saine d’esprit, c’est que le retour à des marges de manoeuvre politique nécessite une diminution des dépenses publiques et un retour à un budget en équilibre sur le long terme, pour laisser la possibilité de recourir parfois à un déficit public contracyclique de relance budgétaire. A avoir trop longtemps utilisé l’outil budgétaire, celui-ci n’a plus aujourd’hui aucune possibilité action. Un peu comme un automobiliste utilisant sans arrêt ses freins, qui ne fonctionneront plus lorsqu’il en aura réellement besoin.

Evidemment, ceci est contraire aux intérêts particuliers de nombreux groupes de pression, et des syndicats de fonctionnaires en premier lieu, qui se foutent des finances publiques, de l’efficacité publique, des contribuables et des jeunes générations. A moins d’attendre la banqueroute de l’Etat, qui s’accompagnera de la fin des retraites, des pensions et de la sécurité sociale. Mais il ne faudra pas ce jour-là être vieux et pauvre.

Mais après tout, le manque de courage (des hommes politiques, des syndicalistes, des électeurs tout courts) n’est jamais (et ne doit jamais être) récompensé.
 

 
Réflexion une (21 juillet 2006)
De l’obligation de participer à l’entretien de la cité à proportion de ses moyens


Il y a quelques millénaires, la citoyenneté était inventée et théorisée en Grèce, et l’exemple d’Athènes est arrivé jusqu’à nous grâce aux écrits des philosophes antiques. Qu’était-ce que la citoyenneté ? D’abord le devoir et l’honneur de participer à l’entretien de la cité (constructions, force navale) à proportion des moyens de chacun. Cela faisait de ces grecs imposables (pour utiliser un anachronisme) des citoyens et des combattants, par opposition aux étrangers et aux esclaves.

De se rappeler que payer des impôts pouvait être considéré en ces temps-là comme un devoir et un honneur nous fait mesurer le fossé qui sépare notre époque de cette époque révolue, dont pourtant nos démocraties modernes se sont inspirées pour l’organisation et le partage du Pouvoir. Aujourd’hui, en France, le sport national, après le football, demeure le fait de tenter d’échapper aux services fiscaux et de payer le moins possible d’impôts directs. Les plus riches de nos compatriotes s’exilent pour des raisons fiscales dans des Etats plus cléments en matière de fiscalité (Royaume-Uni pour les topmodels, Suisse pour les acteurs, Argentine pour les chanteurs). Les classes moyennes recherchent toutes les astuces de défiscalisation pour réduire l’impôt qu’ils devront payer. Et une grosse partie de la population française est exonérée d’imposition sur le revenu, dont une partie parce qu’elle ne déclare pas ses revenus d’activité, grâce au système du travail non déclaré.

Comme l’exemple grec est lointain. Le pire, c’est que tous nos riches compatriotes exilés vivent cependant toujours une bonne partie de l’année en France, et continuent d’user de tous les biens et services publics dont ils n’assurent pourtant plus l’entretien par le paiement de leurs impôts. Ils ne cessent pas d’utiliser nos réseaux routiers, ni nos aéroports, construits et entretenus grâce à l’argent public. Ils continuent également de faire appel aux forces de police et aux tribunaux (rémunérés également grâce à l’argent public) lorsqu’ils sont agressés, outragés ou dès que leurs droits (sur une chanson, sur une photo, sur un film) ne sont pas respectés. Il se pourrait même qu’ils usent plus de nos biens et services publics que nous, leurs compatriotes non exilés. N’est-ce pas un comble ? Comment peuvent-ils oser utiliser des moyens publics qu’ils refusent par ailleurs de financer à hauteur de leurs richesses ? Imaginons par ailleurs demain un nouveau coup d’Etat en Argentine et des massacres de civils par des groupes militaires ; ne risque-t-on pas de voir ces mêmes exilés solliciter l’aide de la France pour sauver leur vie. Je trouve ce genre de comportement révoltant.

La même analyse peut être par ailleurs étendue à tous ceux qui recherchent toutes les possibilités légales ou les montages moins légaux pour défiscaliser et diminuer leur fiscalité. Les départements d’outre-mer sont notamment plein de ce genre de personnes, de même que beaucoup de cadres des classes moyennes. Ces personnes n’arrêtent pas pour autant d’user des biens et services publics. Ils utilisent tout autant que les autres les routes et autoroutes. Leurs enfants vont dans nos écoles (même privées, les écoles bénéficient d’aides publiques de fonctionnement) et dans nos crêches. Leurs véhicules et leurs domiciles ne sont pas placardés d’affiches informant les voleurs que ces personnes sont exclues de la protection des forces de police et que ceux-ci peuvent s’y servir. Mais pour autant, le comportement de ces personnes est-il normal, est-il juste ? Est-ce eux qui ont raison de profiter de toutes les failles du système, de jouer les passagers clandestins de notre société, en bénéficiant de tout sans en payer le prix ? Sont-ce ceux qui estiment qu’il est citoyen de payer normalement ses impôts sans chercher toutes les astuces fiscales imaginables qui ont tord ?

Je ne le pense pas. Toute chose à un coût. Le fait de pouvoir bénéficier de notre système social et de nos infrastructures nécessitent d’en assurer l’entretien au travers du paiement de ce qu’on doit. Ceux qui estiment que le ’fisc’ les escroque devraient quitter définitivement la France, et ne plus jamais y remettre les pieds.

La citoyenneté devrait être inséparable du fait de payer ses impôts. Il devrait y avoir des droits rattachés à cet acte citoyen. Pratiquement tout le monde utilise les services et biens publics. Tout le monde devrait également participer à leur entretien grâce au paiement de l’impôt sur le revenu, même si c’est de manière symbolique pour les plus faibles revenus. Et les plus riches contribuables en exil, ou bien ceux qui défiscalisent leurs revenus, ne devraient plus pouvoir bénéficier des mêmes droits que les autres citoyens.

Conception fasciste de la citoyenneté ? Les anciens grecs étaient-il fascistes ? Non ! Notre société, et c’est encore plus vrai pour les plus riches de nos contemporains, a tendance à ne mettre en avant que les droits individuels, et oublier les devoirs de chacun. Il serait bon de refonder l’acte de citoyenneté. De faire en sorte que des droits soient attachés à l’acte de payer ses impôts. L’une des solutions à retenir est de légiférer. Nul besoin pour cela de modifier la Constitution ; il suffit de réformer le code des impôts et de sociétés, de supprimer le plus possible de possibilités de défiscalisation et de montages fiscaux. De limiter les possibilités de défiscalisation à un certain montant ou pourcentage des impôts. Et de réformer les tranches d’imposition pour généraliser le versement même symbolique de l’impôt.

Mais quel parti politique aura le courage de s’attaquer à ce problème. La gauche comme la droite ont participé à la création de niches fiscales. Et la gauche ne souhaite qu’annuler les dispositions prises par la droite depuis 2002, pas d’annuler leurs propres déductions et réductions d’impôts (emploi de personnes à domicile) aussi justes que celles de la droite.

Bien sûr, certains diront que les exilés fiscaux et les défiscalisateurs paient malgré tout quelques impôts en France (TVA, impôts locaux sur leurs immeubles, etc ...). Au fait, ’éxilés fiscaux’ ; ce terme me rappelle les nobles exilés en Angleterre fuyant la Révolution française. Peut-être par analogie faudrait-il pour eux également rétablir l’usage de la guillotine et criminaliser l’exil ou la fraude fiscale. D’une certaine manière, un peu comme aux Etats-Unis.
 

 
Saucratès



29/08/2012
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