Du péché
Du péché
Par Saucratès
Saint-Denis de La Reunion, Samedi 5 novembre 2022
Parlons donc de la notion de péché ! Le péché est en effet sous-jacent à de nombreuses discussions sur la question de l’homosexualité et des positions que devrait prendre l’Eglise catholique apostolique vis-à-vis d’elle.
Évidemment, sur ce point-là, il n’y a vraiment rien de simple dans ce que l’on peut dire. On ne choisit pas son orientation sexuelle ; j’en ai bien peur. Je n’ai pas choisi d’aimer les femmes, pas plus que d’autres hommes n’ont choisi d’aimer les hommes. Et inversement. Certaines femmes aiment les hommes, et d’autres les femmes.
On peut ainsi croire en des centaines d’explications de l’homosexualité ou de l’hétérosexualité. Personnellement, je pense que c’est l’hétérosexualité qui est naturelle, c’est-à-dire conforme à la nature de l’homme et de la femme, que ce qui est naturel est le fait d’être attiré par une personne du sexe opposée. Mais d’autres personnes pensent que légitimement que le sexe d’une personne n’est pas fixé à la naissance, ou que des enfants peuvent ne pas se reconnaître dans leur sexe physique. Après tout, je ne suis pas totalement opposé à une telle vision dé la sexualité puisque je crois en la possibilité de la réincarnation et des vies antérieures.
Imaginons donc que dans toute la discussion que nous allons avoir, on ne veuille juger ni blesser personne mais que l’on cherche uniquement à réfléchir sur l’existence de cette notion de péché, de position de l’Eglise sur un certain nombre de sujets liés à la sexualité, et qu’en aucun cas, cela ne vaut jugement et condamnation de quelque orientation sexuelle que ce soit.
Ceci n’est pas non plus simple parce que nous avons tous aussi un jugement différent sur ce qu’est le péché, et nous ne parlons jamais de cette notion à personne d’autre qu’à notre for intérieur. On ne parle jamais de péché avec ses amis. L’un d’eux, David, se proclame athé mais ne croit-il vraiment pas en l’existence du péché ? J’avais une amie qui se disait agnostique mais elle a été frappée par une terrible maladie, le plus terrible des cancers, et avant de mourir, elle s’est fait baptiser et je pense qu’il n’y avait pas de personne plus religieuse et plus heureuse qu’elle dans ses derniers jours. Et pourtant, elle laissait une fille et un mari derrière elle. J’ai une autre amie (Bérénice) qui doit être la plus respectueuse des préceptes de la religion, mais son meilleur ami est homosexuel et elle se trouve être la plus ardente des défenseurs des droits des homosexuels.
Le péché est donc une notion apprise de notre enfance, fruit de l’éducation donnée par nos parents, de l’éducation religieuse que nous avons reçue au catéchisme ou à la mosquée, ou ailleurs, et de ce que l’on en a conservé, intégré, intériorisé. Et surtout, sauf dans de très très rares occasions comme des situations de malaise entre personnes très proches, on ne parle jamais de cette notion de péché. Je pense que nombre de mes amis cherchent en permanence à agir bien, conformément à ce qu’ils estiment être la morale, ils évitent de faire le mal intentionnellement, mais jamais on a abordé ce qu’ils estiment être le péché. Et inversement. Je pense même que ma femme ignore ce que je tiens pour péché et j’ignore ce qu’elle considère comme péché. Et ce n’est pas différent pour nos propres enfants. Seuls les prêtres par le biais de la confession en ont connaissance, pour ceux qui se confessent (ce n’est pas mon cas).
Il y a très longtemps, sur un autre site, la Nonobserverie, un autre internaute, Connaissance, m’avait plaint pour ma croyance religieuse. Je crois en un Dieu justicier, inflexible, comptable de chacune de mes actions, un Dieu vengeur, intransigeant, et qui me jugera ou me condamnera sur la somme de l’ensemble de mes mauvaises ou bonnes actions. Chacune mauvaise chose, chaque péché que je commettrais pèsera sur mon âme. La conséquence d’une mère terrible, tyrannique peut-être. Ou pas. Et la sexualité est certainement le lieu du pire de nos addictions, de nos mauvaises pensées. On en guérit avec l’âge, vraisemblablement pour la majeure partie d’entre nous. La vieillesse est un naufrage dit-on souvent, mais peut-être cela devient-il aussi une délivrance, que ce soit pour les femmes qui attirent moins la luxure des hommes, ou pour les hommes qui sont peu à peu délivrés de leurs pires instincts, de leurs pires désirs. Ou pas ….
Je parle ainsi de péché sans aucune référence à la religion. Je pense plus éducation, sur laquelle se greffe une notion forcément religieuse. Le père absent ou pas. La mère vengeresse, violente ou pas. Ou inversement un Dieu bon et aimant comme la mère que certains ont pu avoir, ou un père présent, proche, aidant. L’image de Dieu que nous avons tous dépend-il uniquement intimement de nos parents et des relations d’amour ou de peur que nous avons eu ? Si cela peut nous conduire à être des personnes bonnes cherchant à faire le Bien, tant mieux.
La notion de péché est donc aussi large que nos actions. Vol, viol, luxure, violence, meurtre et assassinat, mensonge, manipulation, diffamation, envie, la liste des péchés s’étend à l’infini. Pour certains et certaines, les relations sexuelles hors mariage sont également un péché. Mais parle-t-on de mariage civil, comme le mariage pour tous, ou de mariage religieux ? Aux yeux de certaines femmes, la polygamie serait ainsi moins un péché qu’un mariage civil sans mariage religieux, ce qui démontre ainsi la divergence entre cette notion de péché religieux et de légalité. Selon elles, un homme polygame musulman pourrait ainsi être moins fautif aux yeux de Dieu et de ses femmes qu’un occidental athée qui se refuserait à les épouser devant Dieu, à l’Eglise ?
La notion de péché semble ainsi extraordinairement variable d’une personne à l’autre, d’une religion à l’autre. Comment expliquer que la polygamie soit considérée comme un péché pour un catholique et non pas pour un musulman ? J’en suis arrivé à penser que si la première épouse du prophète avait refusé qu’il épouse une deuxième femme, la religion musulmane en eut été métamorphosée, et peut-être ne serait-elle jamais devenue la religion planétaire qu’elle est aujourd’hui.
On en arrive en quelque sorte à une vision psychologique du péché … Le péché ne serait qu’une construction psychologique, propre à une personne, en fonction de ce qu’on lui a appris, en fonction de la manière dont il l’a instrumentalisé, en fonction de la manière dont il a été éduqué, des parents ou des grands-parents qu’il a eus et qui l’ont éduqué.
Mais dans cette acceptation du péché, cela voudrait ainsi dire que si quelqu’un assassinait sans aucun remord, il ne commettrait pas de péché ? Sur une île de pirates, éduqué par des pirates tuant et détroussant les navires qu’ils capturent en haute mer, les enfants de ces pirates en tuant, assassinant, brûlant et violant les équipages des bateaux capturés, ne commettraient aucun péché ? Faux évidemment.
Le péché ne peut pas être ainsi psychologique. Il est indépendant de notre éducation, des étapes de notre vie, de nos parents. Il existe forcément une définition supérieure à l’homme du péché, des bonnes actions et des mauvaises actions. Et si le péché en lui-même existe, si nous sommes tous pêcheurs, alors Dieu existe forcément ! Je ne sais pas si ce Dieu pèse véritablement chacune de nos actions, leurs intentions ou leurs résultats, ou uniquement les mauvaises, ou uniquement les bonnes, ou si IL n’est qu’amour … mais Dieu existe forcément. Parce que si Dieu n’existe pas, le péché n’existerait pas plus que nos âmes, et il ne servirait à rien de ne violer, de ne pas tuer, de ne pas voler, de ne pas spolier femmes et orphelins, de faire le BIEN. Si DIEU n’existe pas, le BIEN n’a plus aucun sens !
Cela ne signifie en aucun cas que je fais le BIEN uniquement par peur de DIEU. Non pas uniquement. Par éducation aussi, par choix de vie, mais aussi et surtout parce que je crois en un DIEU vengeur, comptable de chacun de mes actes.
Et l’homosexualité dans tout cela, me demanderez-vous ? Péché, faiblesse, curiosité ? Au fond, tout ceci est sans importance tant que je ne le suis pas. Chacun se trouve confronter à son propre jugement, à sa propre conscience. Je sais qu’il n’y a pas de pire juge que sa propre conscience. C’est la seule dont le jugement, dont le regard ne vous quittera jamais ! Avec celui de DIEU.
J’en arrive ainsi à ma conclusion. Seuls ceux qui n’ont jamais péché peuvent condamner les pécheurs. Seuls ceux qui n’ont jamais été tentés, qui ne connaissent pas la tentation, peuvent condamner leurs frères pécheurs. Nous sommes tous des pécheurs, nous fautons tous. Et nous devons vivre avec nos péchés. Le sexe est bien sûr la principale source du sentiment de péché. Je me retrouvais notamment dans un des romans de Brian Aldiss intitulé «Helliconia l’été» (auteur britannique de science-fiction) où un Roi se faisait flageller après chaque rapport sexuel débridé avec son épouse la Reine, parce qu’il voulait se laver du lucre, du taureau en rut qui l’habitait dans ces moments-là.
Est-il normal que le sexe ait si mauvaise presse dans la religion catholique ? Que tant de péchés se rapportent au sexe, et que notre éducation catholique soit marquée par cette notion de péché ? Que le sexe ne soit accepté que dans le but de la procréation ? Et que l’usage du préservatif ou de moyens de contraception soit ainsi également considéré comme un péché ? Cela permet ainsi de relativiser la possible condamnation morale de l’épiscopat, de l’Eglise, vis-à-vis de l’homosexualité. Comme toute forme de sexualité dont l’objet premier n’est pas la procréation, le sexe est considéré comme un péché !
Je ne suis pas là pour faire le procès du catholicisme, et je ne vais pas non plus faire le procès d’une éducation qui m’a construit, qui a fait de moi ce que je suis. Ce qui est clair, c’est que c’est un poids extrêmement lourd à porter pour tous ceux qui, en plus, s’écartent de la norme communément admise. Effectivement, la situation doit être très compliquée à vivre pour des couples homosexuels ou pour des homosexuels. Ce n’est ni la faute de l’Eglise, ni de la religion. Certains arrivent à s’en séparer, à s’en libérer. Certains vivent d’ailleurs très bien en tuant, violant, volant, dépouillant les autres. L’absence de sensation du péché n’est pas une bénédiction. Bien au contraire, c’est une malédiction.
Nota :
2. Le problème vient aussi du militantisme homosexuel. Celui qui ne priera pas pour que Dieu le délivre de cette attirance, celui qui ne verra pas cela comme un péché dont il faut se confesser, mais au contraire comme un acte normal, naturel, une valeur à promouvoir, voir quelque chose dans l’ordre des choses, celui-là n’aura rien à faire dans une église ou dans la religion catholique. (Le terme ‘valeur à promouvoir’ renvoie à la philosophie morale et à la conception conséquentialiste de l’éthique).
3. Les dignitaires catholiques peuvent-ils s’élever contre cette loi scélérate. Oui pour ma part. Qui en dernier recours décide qu’une loi est légitime ou qu’elle ne l’est pas ? Pour ma part, je crois en l’existence d’une loi divine, supérieure, aux lois terrestres, des petits pouvoirs des potentats, des lois qui changent au gré du vent, au gré de l’opinion publique. C’est en regard de cette loi divine que des prélats peuvent condamner des lois scélérates, offensantes pour Dieu et les croyants.
4. Si on suit certains, dès lors qu’une loi est légalement votée et publiée, un homme d’église ne peut la contester. Cela marchait-il aussi pour les lois nazies ou vichystes contre les juifs et permettant la spoliation des biens juifs ? Ces lois étaient légales à ce moment-là, édictées par des pouvoirs légitimes, les nazis ou le régime de Vichy. Alors quoi, comment déterminer si une loi est bonne ou mauvaise. Se référer à ce que l’histoire en dira, dans 10 ou 50 ans. Ou alors en demandant l’avis d’une commission composée de quelques gourous autoproclamés ?
5. L’église n’a pas à suivre les effets de mode. C’est avant tout un endroit où des pécheurs (parce qu’on est tous des pécheurs) peuvent chercher des réponses et un réconfort dans la recherche de la foi. Ceux qui ne le comprennent pas, ce qui jugent l’Eglise et ses prélats, n’ont manifestement rien à y faire. Ou bien ils doivent chercher à devenir meilleurs, à se repentir, à comprendre son enseignement.
6. L’enseignement de la religion catholique n’est pas de chercher à exclure, mais à convaincre de changer, de s’amender, de sortir de la vie impie, du péché. Évidemment, certains diront que cela s’apparentent à une thérapie de conversion, interdite désormais par la loi. Là encore, on a une loi scélérate. Encore une. Même s’il est faux de parler de thérapie de conversion. Nul n’est obligé d’aller à l’église, nul n’est obligé de prier. Nul n’est obligé de se faire enterrer religieusement, avec une messe. Chacun est libre, libre de vivre de manière impie, libre de vivre de manière juste, et également libre de condamner une loi scélérate.
7. On parle du péché sexuel, mais on ne parle pas ici du péché climatique ! Le fait de polluer la planète ou de participer à la pollution de la planète ! Le péché au fait d’utiliser un moyen de transport émettant des gaz à effet de serre, comme un véhicule carburant au gasoil … mais il y a aussi le péché de prendre l’avion, moyen de transport émettant un volume criminel de gaz à effet de serre … le fait d’utiliser une climatisation, péché constituant à utiliser une électricité qui pourrait servir à autre chose qu’à son petit confort personnel ? Et là aussi, on se trouve face à des extrémistes, des ayatollahs de la pensée, de la religion, qui estiment qu’ils sont les seuls à être vertueux et que tous les autres sont des pécheurs ou des criminels ! Car là, on ne parle plus seulement de péché, mais de crimes. Écocides … de la même manière que les extrémistes féministes parlent de féminicides …
Saucratès
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