Les affaires
Le procès de France Télécom
Saint-Denis de La Réunion, mercredi 29 mai 2019
Le procès de France Telecom (aujourd'hui nommée Orange) qui se déroule actuellement à Paris est particulièrement important. Il dure depuis déjà trois semaines et il est prévu de durer encore sept semaines. C’est un procès fondamental parce qu’il adresse un message fort à tous les dirigeants d’entreprises privées ou publiques qui pourraient être tentés de brutaliser leurs personnels, leurs employés avec des méthodes proches ou assimilables à du harcèlement moral ou physique ! France Telecom n’est pas la première entreprise ni la dernière à avoir mis en oeuvre une politique sociale et une organisation hierarchique nocive afin d’obtenir, de forcer au départ de l'entreprise de milliers de ses employés, de ses travailleurs. Mais c’est certainement celle où cette politique a pris une immense ampleur, où elle devint un mode central de management, l'acmé de l'équipe dirigeante de l'époque.
Dans ce procès, on trouve deux visions opposées du monde, mais aussi de la situation de France Telecom. Il s’agit de deux visions irréconciliables. Evidemment, comme dans tout procès judiciaire, les personnes poursuivies ne vont évidemment pas reconnaître leurs tords, les malheurs de leurs victimes. Evidemment ... D'un côté, des dirigeants de France Telecom qui sont persuadés d'avoir sauvé une entreprise moribonde, en grande difficulté. Il faut avoir lu la déposition de Jacques de Larosière, ex-gouverneur de la Banque de France, ex-directeur Général du Fonds monétaire international, qui vante, qui encense Didier Lombard, patron de France Télécom accusé dans ce procès. «Un homme brillant, un capitaine d'entreprise visionnaire qui a sauvé France Telecom et qui ne devrait pas se trouver dans le box des accusés».
Que reconnaissent ces cadres directeurs, ces anciens dirigeants de l'entreprise poursuivis par la justice et leurs témoins administrateurs ou hommes du système ? D'avoir sauvé une entreprise moribonde extrêmement endettée et d'avoir souhaité conduire une évolution, une révolution dans cette entreprise, qui s'est aujourd'hui grâce à eux redressée et qui a pu devenir un fleuron industriel et commercial dans son secteur d'activité ? Que la situation était financièrement extrêmement compliquée et qu'il fallait faire des concessions et des sacrifices ? On en saura plus lors des plaidoyers finaux de leurs avocats. Mais je suis presque sûr qu'ils s'estiment parfaitement innocents des charges retenues contre eux, et clament leur incompréhension d'être poursuivis. Exactement de la même manière que les pires criminels, violeurs d'enfants, assassins, voleurs, ex-nazis en fuite, protestent également le plus souvent de leur innocence tout au long de leur procès et même après ! Ce ne sont que des criminels comme les autres.
Ce procès est donc une mise en jugement d'un plan d'entreprise stratégique intitulé Next (acronyme de «Nouvelle expérience des télécommunications) ... et de son volet ressources humaines Act («Anticipation et compétences pour la transformation»). Un plan d'entreprise qui prévoyait le départ de France Telecom de 22.000 salariés et des mutations forcées pour 10.000 autres salariés. 35 salariés mettront fin à leurs jours en se suicidant entre 2008 et 2009. Mis en examen en 2012, les dirigeants de France Telecom de l'époque (l'ex-PDG Didier Lombard, son n°2 Louis-Pierre Wenès, l'ex- DRH Olivier Barberot et quatre autres cadres de l'entreprise) sont aujourd'hui jugés, dix à onze ans après les faits et sept ans apres le début de l'instruction judiciaire !
Mais le plus intéressant est aussi l'analyse qui est faite de cette affaire par le journal Les Échos (journal capitaliste et ultra-libéral s'il en est un !) :
On trouve d'abord dans le sous-titre de l'article : «Retour sur une affaire qui pourrait avoir des répercussions sur les entreprises»
Ensuite dès le début de l'article ... première phrase : «C'est un cas d'école. Par le nombre de victimes d'abord, mais aussi par ses répercussions au sein du haut management français, si les juges d'instruction étaient suivis dans leur raisonnement.»
Et enfin dans la conclusion de cet article : «Ce que décidera le tribunal dans cette affaire risque d'avoir de sérieuses conséquences pour les entreprises. Cette phrase, notamment, de l'ordonnance pourrait résonner comme un avertissement à l'heure où Air France et la SNCF engagent de lourdes réorganisations : Les dirigeants [de France Télécom, NDLR] ont fait le choix de transformer vite, vite, une entreprise de 108.000 salariés dans le déni de son histoire et de sa culture de service public au détriment des conditions de travail des salariés et de leurs droits sociaux».
Pour le journal Les Échos, ce ne sont pas les méthodes de management qui sont nocives. Selon ce journal, ces méthodes sont normales et d'autres entreprises les utilisent. Non le danger vient de ce que décidera le tribunal qui pourra avoir «de sérieuses conséquences pour les entreprises». En clair, faire peur aux salariés de ces entreprises qui pourraient ne pas pouvoir bénéficier des bienfaits de ces si extraordinaires plans stratégiques ! Et faire peur aux juges qui pourraient avoir sur la conscience les futures difficultés des entreprises françaises !
Parce ce que c'est bien un point commun que j'ai avec le journal ultra-libéral des Échos : ces méthodes de management sont mises en œuvre dans de très nombreuses entreprises françaises, par de très nombreux hauts managements qui ont pour objectif des réductions d'effectifs, des cultures du changement et la recherche de l'adhésion des managers à leur idéologie : pressurer leurs équipes et tant pis pour les plus faibles dont il faut se débarrasser à tout prix !
Et dans un raisonnement inverse au leur, j'espère que ce jugement aura un impact sur les prochains plans stratégiques d'autres entreprises en France ou ailleurs, que cela suffira à leur faire peur, suffira à les ramener à une forme d'humanité (est-ce trop demandé à des hauts managers ?). Il est bon que France Telecom serve de victime expiatoire en raison des souffrances causées et de la morgue et de l'absence de toute empathie des dirigeants et hauts cadres poursuivis.
En même temps, on peut se demander si dans ce milieu, ces procès font vraiment peur. Olivier Barberot a ainsi été jusqu'à récemment président de la société Globecast France, filiale d'Orange et dirigeant de quatre autres sociétés. Même s'ils étaient condamnés à de la prison ferme, ils ne seraient d'ailleurs vraisemblablement même pas incarcérés et bénéficieraient d'aménagements de peine !
Pour conclure cet article, on trouve de nombreux témoignages de salariés victimes de France Telecom ou des instances de représentation, médecins du travail ou inspecteurs du travail, qui combattirent ce qu'ils observèrent pendant ces années-là. Le témoignage d’un médecin du travail de cette époque intervenant à France Telecom est particulièrement éclairant.
http://www.sante-et-travail.fr/france-telecom-2006-mon-alerte-restee-sans-reponse
Et ce qui est peut-être inquiétant c'est qu'au-delà des cas d'Air France et de la SNCF, cités par Les Echos, il y a surtout le cas de La Poste. Dans ces différents cas, on se trouve aussi dans le cas d'entreprises employant de nombreux fonctionnaires dont il est impossible pour leur management de se débarrasser ... sans organiser des conditions de travail nocives pour leurs salariés.
Saucratès
Où l'on réentend parler de Julien Coupat en marge du mouvement des gilets jaunes
Saint-Denis de La Réunion
Le 11 décembre 2018
Les informations télévisuelles s'étaient fait l'écho que les violences des gilets jaunes commises à Paris étaient attribuées par le gouvernement français à des groupuscules d'extrême/ultra droite et d'extrême/ultra gauche. Et lorsqu'on parle de groupes d'ultra-gauche, cela me rappelle immédiatement l'affaire du groupe de Tarnac, et notamment l'un de ses principaux protagonistes, celui qui était présenté comme le diable lui-même, Julien Coupat, ainsi que sa compagne, Yildune Lévy.
Et je découvre aujourd'hui un article publié dans le journal Le Monde qui explique que Julien Coupat a été interpelé à Paris de manière certainement totalement fortuite en marge des manifestations parisiennes du 8 décembre.
Pour ceux qui ne sauraient pas qui est Julien Coupat, il faut revenir au prélude de l'affaire du groupe de Tarnac. En 2008, l'ennemi numéro 1 du gouvernement UMP francais et de la ministre de l'intérieur, Mme Michèle Alliot-Marie, sont déjà les groupuscules d'ultra-gauche, au sein desquels les services secrets européens ont introduit une taupe qui les renseigne régulièrement. Et le groupe de Tarnac, dont le leader semble être un jeune étudiant nommé Julien Coupat, ferait partie des plus dangereux, des plus extrémistes. Il s'agit d'un petit groupe de personnes qui ont décidé de faire revivre une épicerie solidaire, une petite communauté (mais sans anneau de pouvoir) dans une petite ville nommée Tarnac. Les groupes d'ultra-gauche étant la hantise de MAM et de Sarkozy, le groupe de Tarnac fait l'objet d'une surveillance policière régulière. Et en 2008, l'ensemble des personnes composant le groupe sont arrêtés suite a la pose de crochets à béton sur le réseau ferré des TGV. Il n'y a pas d'incidents, on ne sait même pas si un TGV est passé sur ces rails, mais Julien Coupat et sa petite amie Yildune Lévy sont sensés être les dangereux terroristes criminels traqués et arrêtés parles vaillantes forces de police et par le vaillant gouvernement Sarkozy !
Il faudra attendre 10 ans pour que la justice se prononce enfin sur cette histoire, et pour que Julien Coupat et Yildune Lévy soient finalement relaxé par le tribunal, en ce début d'année 2018. Ils auront passé de nombreuses années en prison à partir de 2008, ils auront été traînés dans la boue par des nombreux journalistes (qui n'ont pas toujours respecté leur présomption d'innocence ... et encore moins MAM qui les avait déjà condamné et qui les eusse exécuté si elle l'avait pu ...). Mais la surveillance par la DST dont Julien Coupat fait l'objet ne semble pas s'être relachée malgré cela ! Apparemment, il devrait neanmoins échapper à l'exécution capitale dans l'immédiat malgré l'énorme délit commis par Julien Coupat et son camarade : ils possédaient dans leur véhicule «un gilet jaune, des bombes de peinture et un masque de chantier» !
«Suffisant, selon le parquet de Paris, pour ouvrir une enquête de flagrance pour participation à un groupement formé en vue de la commission de dégradation ou de violence et pour renouveler sa garde à vue après vingt-quatre heures pour la même période. L’intellectuel (...) a vu sa garde à vue levée dimanche soir et devait être présenté, lundi, au parquet aux fins de notification d’un rappel à la loi». Entre parenthèses, tous les francais ont dans leur véhicule automobile un gilet jaune, et même un triangle de signalisation. C'est une obligation !
Julien Coupat et son avocat, Jérémie Assous, semblent penser, premièrement que Julien Coupat semblait «suivi par les services de renseignement depuis plusieurs semaines voire plusieurs mois». Deuxièmement, qu'il s'agit d'une vengeance des services de renseignements intérieurs français qui cherchent toujours à le faire tomber pour terrorisme et à se venger du fiasco de l'affaire du groupe de Tarnac, de la filature et du procès où la police française et la DST ont démontré leur carence et leur dangerosité. Troisièmement, que l'ultra-gauche est à nouveau l'ennemi principal du gouvernement ultra libéral Philippe/Macron, comme elle l'était déjà en 2008, du temps du gouvernement Sarkozy.
A nouveau, les ennemis de ce gouvernement sont donc les groupes français d'extrême-droite et d'extrême-gauche, et on n'oublie complètement les dangers de l'islamisme et des groupes terroristes islamistes étrangers ou des jeunes radicalisés issus des cités, qui peuvent préparer des attentats contre des citoyens français sans que cela ne gêne nullement ce gouvernement.
Le plus amusant : on reparle à nouveau du Comité invisible et de son opuscule publié quelques années avant 2008 : «L’Insurrection qui vient» (La Fabrique, 2007), que je m'etais amusé à relire il y a peu. Dans ce petit bouquin, «le Comité invisible a théorisé l’opposition au pouvoir logistique par des blocages de points stratégiques comme les dépôts d’essence et raffineries, l’envahissement des voies ferrées».
A lire la revue en ligne «Lundimatin»
« Nous ne sommes pas à l’abri que, ce samedi, le dispositif décidé par le ministère de l’intérieur se montre plus insidieux, évitant les conflits frontaux au profit d’interpellations ciblées – à l’allemande, pour ainsi dire – de façon à contenir la tension jusqu’à essoufflement. Et d’appeler à un approfondissement du mouvement, au niveau local : Viser juste, donc, mais aussi durer, avant toute chose. Paris est une émeute, mais Paris, aussi bien, est un leurre. Une vitrine spectaculaire. L’échelle du mouvement est locale. Ce sont surtout les auteurs – Des agents destitués du Parti imaginaire – qui ont pu intéresser les services de renseignement. La signature n’est pas mystérieuse pour les initiés. En effet, Tiqqun, revue philosophique fondée, en 1999, entre autres par Julien Coupat, se revendiquait comme organe conscient du Parti imaginaire ». (citation tirée de l'article du Monde de Simon Pie, et Abel Mestre)
Saucratès
Retour sur les affaires
Quelques dates marquantes pour ces quelques affaires qui m'interpellent :
- 2006, l'affaire du meurtre d'Ilan Halimi et du gang des barbares
- 2007, l'affaire de l'Arche de Zoé
- 2008, l'affaire Jérôme Kerviel vs la Société Générale
- 2008 (toujours), l'affaire du groupe de Tarnac
- 2010, l'affaire du livre d'Aurélie Boulet alias Zoé Shepard
Cinq affaires et cinq histoires terribles, signe soit de l'impuissance de la justice française face au Mal, soit de l'imbécilité humaine et des accointances politiques, soit de la toute puissance de l'argent et du fait que certains d'entre nous seront facilement broyés, soit de l'aberration de la politique et de la lutte contre la délinquance lorsque celles-ci décident de broyer des innocents ... Au fond, toutes ces histoires relèvent du même élément : le fait que l'on peut être facilement broyé, soit par la stupidité, la haine et le Mal (Ilan Halimi), soit par la stupidité des imbéciles (les victimes de Breteau et Lelouch), soit par la toute-puissance de l'argent (Jérôme Kerviel), soit par la stupidité des politiques et de la justice (Julien Coupat), soit enfin par la stupidité de nos abrutis de collègues de travail (Aurélie Boulet).
Réflexion cinq (19 octobre 2017)
L'affaire Jérôme Kerviel ou l'histoire du pot de fer contre le pot de terre
Cette histoire commence le 24 janvier 2008. La Société Générale communique sur une perte de plusieurs milliards d'euros de pertes (6,3 milliards d'euros), survenue au cours des trois jours précédents, due aux agissements d'un de ses courtiers, qui aurait exposé la banque à un risque de marché majeur (positions acheteuses sur les contrats à terme portant sur indice), qui se serait élevé à plus de cinquante milliards d'euros. C'est le PDG de la banque, Daniel Bouton, qui se présentera en victime. On apprendra ultérieurement (au cours de l'après-mid) le nom du trader incriminé : Jérôme Kerviel.
https://saucrates.blog4ever.com/l-affaire-societe-generale-vs-kerviel
On découvre à cette occasion ce 24 janvier 2008 l'une des raisons de l'effondrement des places boursières intervenu le lundi 21 janvier 2008, journée où le CAC 40 avait reculé de 6,83%, repli d'une ampleur rarement observée depuis le 11 septembre 2001. Les places asiatiques s'étaient également effondrées dans la nuit. Les autres bourses européennes reculeront elles aussi fortement (-5,48% pour Londres, -7,16% pour Francfort et -7,54% pour Madrid).
http://votreargent.lexpress.fr/bourse/21-janvier-2008-un-lundi-noir_1585011.html
Ainsi commence l'affaire Jérôme Kerviel, ou comment un obscur et minable petit trader aura failli ruiner l'immense et vénérable Société Générale. Nous aurons à cette occasion droit à un gros énervement du président (de la république française) Nicolas Sarkozy qui ne supporte pas de ne pas avoir été informé de ces difficultés. J'imagine qu'il aurait pu perdre beaucoup d'argent s'il avait investi dans la Société Générale et qu'il aurait aimé en être informé. Le gouverneur de la Banque de France en était par contre apparemment informé. Jérôme Kerviel sera dès lors jeté en pâture à l'opinion publique, traîné dans la boue, présenté comme un minable trader, même pas issu des grandes écoles, mais génial escroc, ayant été capable de duper toute sa hiérarchie à la Banque et tous les mécanismes de contrôle interne et d'inspection, qui n'auront rien vu pendant de nombreux mois, malgré l´ampleur des positions prises (près de 50 milliards d'euros). Précédemment, courant 2007, ces positions lui auraient permis de gagner 1,4 milliard d'euros, ce dont la Société Générale ne se serait pas non plus aperçu, même si ces 1,4 milliard d'euros se trouvaient bien dans les résultats 2007 de l'établissement.
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Crise_financière_de_janvier_2008_à_la_Société_générale
On ne saura jamais le fin mot de cette histoire. Est-il possible que Daniel Bouton et la hiérarchie de Jérôme Kerviel n'ait rien su de l'ampleur des positions et des bénéfices dégagés ? Cela semble inconcevable sauf à avoir des doutes monstrueux sur les carences du contrôle interne et de l'inspection de la Banque. Et comment également ne pas avoir des doutes sur l'activité même de la Banque, si on peut être capable de masquer des gains de 1,4 milliard d'euros ou de ne pas chercher à comprendre leur origine ! Est-il possible qu'un simple trader, même passé par les métiers de back office du trading, ait pu engager aussi immensément la Société Generale, jusqu'à hauteur de 1,8 fois ses fonds propres, sans qu'aucune alarme ne se soit déclenchée. Cette histoire éclaire aussi sur l'importance des fonds propres d'un établissement comme la Société Générale à cette époque, s'élevant à près de 30 milliards d'euros. Combien aujourd'hui ?
La Société Générale et son PDG Daniel Bouton tenteront pendant toutes ces années à se présenter comme une victime de Jérôme Kerviel ; un peu comme si un gigantesque requin essayait de se présenter comme la victime d'un malheureux petit poisson rouge ... ou d'une malheureuse sardine ! Voilà pour cette histoire invraisemblable de la sardine et du mégalodon. Jérôme Kerviel sera d'abord largement condamné, notamment à rembourser les 4,9 milliards d'euros supposément perdus par la Société Générale. Il fera egalement 150 jours d'emprisonnement avant de voir le reste de sa peine aménagée par le port d'un bracelet électronique. Mais, contrairement aux efforts désespérés de la Société Générale et des grands médias qui le présenteront des semaines durant comme un fou, un déséquilibré, un terroriste, Jérôme Kerviel ne perdra jamais la bataille de l'opinion publique, dans cette histoire insensée du mégalodon qui se plaint de la sardine ...
Et puis le mégalodon a commencé à perdre de sa superbe. La Société Générale, qui cherchait à faire porter à son ex-trader la responsabilité de la totalité de sa perte (les 4,9 milliards d'euros supposément perdus), a vu la responsabilité de Jérôme Kerviel être ramené à 1 million d'euros au titre des dommages et intérêts (jugement de la cour d'appel de Versailles en date du 22 septembre 2016) après que la Cour de Cassation ait décidé de casser la partie civile de sa condamnation. En effet, comment un individu pourrait-il se voir imposer de rembourser 4,9 milliards d'euros ? Par ailleurs, un peu plus tôt en 2016, le 7 juin, le conseil des prud’hommes de Paris condamne la Société générale à verser à Jérôme Kerviel plus de 450 000 euros pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et dans des conditions vexatoires.
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Jérôme_Kerviel
Evidemment, le combat entre le mégalodon (la vénérable ou vénéneuse Société Générale) et la sardine n'est toujours pas terminée, dans l'attente des appels et pourvois en cassation de la Société Générale, qui ne renoncera pas facilement à faire porter à une vraisemblable innocente victime ses manquements et ses échecs, voire ses pertes financieres dantesques lors d'une crise financière qui n'est toujours pas terminée. Mais il faut un certain courage, pour, après avoir été trainé dans la boue de cette manière, par un monstre et des parasites de leur espèce, oser se lever et défier une organisation comme le monde de la finance, comme le fit et le fait toujours Jérôme Kerviel (à noter que la Societe Générale le présentera des le début comme un criminel en fuite ... ils auraient aimé qu'il prenne la fuite ou se suicide, qu'il soit abattu par la police, pour apparaître réellement comme un criminel ... et eux comme les victimes d'un criminel ... sans jamais avoir de comptes à rendre ... mais non, Jérôme Kerviel ne prendra pas la fuite ... il fera face à la meute, seul).
Car ne nous trompons pas, derrière ce combat entre un trader et la Societe Generale, c'est contre tout un système que celui-ci se bat, un système qui n'hésite pas à nous écraser, nous, humbles particuliers que nous sommes. Le gouverneur de la Banque de France, ami des socialistes et de Macron, n'est rien d'autre qu'un ancien petit dirigeant de la BNP Paribas, ex haut fonctionnaire au ministere de l'économie, entre autres activités. De même, la BCE est egalement dirigé par un ancien banquier d'affaire italien, Mario Draghi, de la Banque Goldman Sachs, ex haut fonctionnaire. Comme notre actuel président de la république, précédemment banquier d'affaire à la Banque Rothschild et ex haut fonctionnaire. Ironiquement, c'est en septembre 2008 qu'Emmanuel Macron a commencé à travailler à la Banque Rothschild ... cette même année 2008.
Réflexion quatre (16 octobre 2017)
Se rappeler de l'affaire du groupe de Tarnac
En 2008, on découvre l'affaire des terroristes gauchistes du groupe de Tarnac. Les ennemis publics de la police française et du gouvernement de droite de Nicolas Sarkozy et de sa ministre de l'intérieur Michèle Alliot-Marie (dit MAM) sont un petit groupe d'idéalistes gauchistes du plateau du Larzac, qui tiennent une épicerie solidaire ! Quelle horreur au lieu de gagner de l'argent ! Ils sont surtout soupçonnés d'appartenir au Comité invisible, et d'avoir écrit ou d'avoir participé à l'écriture d'un petit opuscule criminel : «L'insurrection qui vient».
Nous sommes alors en 2008, la droite, l'UMP et Sarkozy sont au pouvoir, la police et la justice s'attaquent à tous ceux qui critiquent ou contestent Sarkozy, sa politique ou sa personne (un peu comme aujourd'hui avec Macron), à une époque où le terrorisme islamique n'est pas encore considéré comme l'ennemi principal à combattre ; l'UMP et MAM préfèrent les laisser préparer leurs massacres, voyager, se former et s'armer afin de mieux s'attaquer aux extrêmement dangereux terroristes anarcho-gauchistes qui tiennent des épiceries solidaires ! Bienvenue dans le monde de MAM et dans le monde de ses lubies !
https://saucrates.blog4ever.com/l-affaire-du-groupe-de-tarnac-1
Le crime de ces jeunes gens ? Ils auraient placé des crochets à béton sur des candélabres de la SNCF, dans le but de faire dérailler des trains à grande vitesse ! Entre autres attentats terroristes libertaires ! Aucun incident déploré. Aucun déraillement évidemment. L'ensemble des preuves retenus contre ces nombreux jeunes gens tiennent dans des procès verbaux de traque et de suivi, bidonnés, inventés ... et pourtant, depuis actuellement neuf années, ces élucubrations tiennent et perdurent, sans que la justice n'ait encore réussi à faire la part du vrai et du faux dans cette sordide et terrible affaire. Ces jeunes gens ont fait des mois et des mois de prison ; Yldune Lévy et Julien Coupat sont restés les plus longtemps en prison, puis placés en liberté surveillée ! Et toujours pas innocentés.
On laisse des terroristes islamistes fichés S porter des armes et préparer des attentats meurtriers, mais on s'acharne sur des jeunes gens innocents et leurs proches (en septembre 2012, des proches des mis en examen, forgerons de leur état, seront traités comme des criminels par la police anti-terroriste), dont le principal crime est quand même d'avoir peut-être écrit un très joli petit opuscule anarcho-gauchiste, qui est un sacré succès de librairie, même si ce doit être l'un des rares bouquins à être librement téléchargeable sur internet : «L'insurrection qui vient» (On est d'accord, ce simple fait est déjà un crime crapuleux et mériterait la peine de mort pour risque d'atteinte aux sacro-saints bénéfices des puissants de ce monde !).
Ça se passe donc à partir de la nuit du 7 au 8 novembre 2008, alors qu'ils seront soupçonnés d'avoir commis un sabotage des caténaires sur des lignes TGV de nuit à Dhuisy, en Seine-et-Marne. Il est aussi soupçonné par la police antiterroriste d'être le leader d'une structure clandestine anarcho-autonome entretenant des relations conspiratives avec des militants implantés à l'étranger projetant de commettre des actions violentes. Récemment, on l'a aussi soupçonné d'être le cerveau organisant les exactions contre l´adorable et extraordinaire Loi Travail du gouvernement socialiste/ultra-libéral de François Hollande ... les mêmes ministres et députés d'ailleurs qui participent au gouvernement et à la majorité presidentielle de Macron ... ex-ministre d'Hollande et à l'origine justement de la Loi Travail.
Alors, que Julien Coupat soit réellement un révolutionnaire ou non, ce n'est pas la question. Il a juste eu le courage de ses opinions, de combattre un système intolérable où nous, les électeurs, sommes pris pour des abrutis et des idiots par des hommes et des femmes politiques qui se moquent de nous. Alors, ce n'est pas un terroriste ni une personne qui doit être condamnée. C'est juste une personne qui a ouvert les yeux, et qui ne se contente pas d'éviter de regarder ceux qui se moquent de nous. Penser n'est pas un crime, de même que parler, même si c'est parler de révolution !
Comment est-il possible qu'il n'y ait toujours pas eu de jugement depuis novembre 2008 concernant cette affaire, plus de neuf ans après le début de cette affaire, alors qu'il n'y a vraisemblablement pratiquement aucune preuve contre les multiples personnes qui ont été poursuivies, mises en examen ou interrogées. Ce n'est qu'en début d'annee 2017 que la qualification terroriste a été abandonnée, malgré de multiples appels du parquet qui tient dur comme fer à son affaire des terroristes de Tarnac ! Et bientôt, ils seront innocentés en raison d'un dossier complètement vide, mis à part les divagations des policiers et des juges antiterroristes, de MAM (Michèle Alliot Marie, d'abord ministre de l'intérieur puis ministre des armées avant d'etre jetee à la rue pour incompétence notoire) et de Sarkozy. Innocentés après vraisemblablement des années à venir d'appel du parquet.
Et pendant ce temps là, les véritables terroristes, islamistes, amis des socialistes, de Sarkozy et des ultra libéraux, vont continuer à préparer tranquillement et à commettre des attentats ! Normal, le véritable ennemi de l'ordre établi, ce ne sont pas les islamistes, qui sont juste là pour faire monter la peur chez les électeurs et autoriser l'instauration de lois liberticides. Le véritable ennemi du pouvoir, de Sarkozy, d'Hollande et de Macron, ce sont ceux qui pensent, qui ne sont pas aveugles devant leurs agissements, ceux qui réfléchissent, ceux qui pourraient vouloir renverser leurs pouvoirs et la domination des puissants sur le monde. ceux-là sont l'ennemi, pas les islamistes barbus assassins et tueurs, qui aident eux à maintenir l'emprise des puissants sur notre monde !
Réflexion trois (24 août 2017)
Se rappeler du gang des barbares
Vous rappelez-vous du gang des barbares ? Vous rappelez-vous de leur derniere victime, Ilan Halimi, torturé puis assassiné par ces bourreaux parce que ceux-ci croyaient que tous les juifs étaient riches ? Vous rappelez-vous de leur chef psychopathe, Youssouf Fofana ?
https://saucrates.blog4ever.com/l-affaire-du-gang-des-barbares
C'est le 13 février 2006 que le corps d'Ilan Halimi, enlevé et sequestré pendant 24 jours, est retrouvé. Il meurt avant d'arriver à l'hôpita. Abandonné et torturé comme un chien par un groupe de psychopathes fous n'ayant plus rien d'humains. Juste des monstres. Vingt-sept personnes ont été accusés d'avoir participé d'une manière ou d'une autre à cette tragique destinée.
Au moins dix-neuf personnes faisant partie de ce groupe des barbares seront condamnées au final :
- Fofana, Youssouf, perpétuité
- Soumbou, Jean-Christophe, 18 ans de prison
- Aït-Abdelmalek, Samir, 15 ans de prison
- Gavarin, Jean-Christophe, 15 ans de prison
- Moustafa, Nabil, 13 ans de prison
- Birot Saint-Yves, Cédric, 11 ans de prison
- Polygone, Fabrice, 11 ans de prison
- Touré Kaba, Yayia, 11 ans de prison
- Ribeiro, Jérôme, 10 ans de prison
- Martin-Vallet, Christophe, 10 ans de prison
- Arbabzadeh, Sorour, 9 ans de prison
- Gouret, Tiffenn, 9 ans de prison
- Serrurier, Gilles, 9 ans de prison
- Sorour Arbabzadeh dit Emma Yalda, 9 ans de prison
- Oussivo N’Gazi, Francis, 7 ans de prison
- Oussivo N’Gazi, Guiri, 7 ans de prison
- Louise, Franco, 5 ans de prison
- Pastisson, Jérémy, 3 ans de prison
- Fontaine, Sabrina, 3 ans de prison
- Lorleach, Audrey, 2 ans, 16 mois de prison avec sursis
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Affaire_du_gang_des_barbares
Plus de onze ans après ces faits, l'immense majorité de ces criminels psychopathes sont sortis de prison. Il est tellement difficile d'accepter de se dire qu'ils ont payé leur crime à la société et qu'ils vivent désormais dehors, parmi nous, au milieu d'entre nous, eux qui ont participé à cette sanglante et abominable histoire, à cette dramatique folie. Quelles envies de haine ne doivent pas parfois envahir le cœur des parents d'Ilan Halimi ?Comment ont-ils fait pour ne pas avoir envie de les assassiner les uns après les autres ? Comment font-ils pour ne pas en rêver tous les soirs, depuis onze ans ?
Combien de ces psychopathes sont encore en prison ? Emma Yalta Sorour Arbabzadeh est sortie de prison en septembre 2012, soit après à peine un peu plus de six ans de prison, sur les neuf années auxquelles elle avait été condamnée ! Comment est-ce possible de ne pas faire faire intégralement leurs peines à de tels psychopathes ? Il ne doit désormais plus rester que Youssouf Fofana à rester en prison sur ce groupe, et pour combien de temps encore, malgré les multiples nouvelles condamnations qui se sont rajoutées à la peine initiale et les vingt-deux ans de période de sûreté auxquels il avait été condamné. Ce psychopathe sortira avant, évidemment ! Les juges aiment trop relâcher les prisonniers surtout les plus dangereux, ceux qui ont tué, assassiné, violé ... pour bonne conduite disent-ils !
Les politiques aussi. Le maire de Bobigny a ainsi embauché la femme de l'un des principaux meurtriers de ce groupe, Lynda Benakouche, épouse de Jean-Christophe Soumbou, sur un poste de chargée de mission à la politique urbaine ! Comme quoi, rien ne vaut la prison et le meurtre pour être considérée comme une spécialiste de la politique urbaine, et de la culture des caves.
Cette histoire, comme des milliers d'autres, et la libération de ces monstres ... combien de dizaines d'autres meurtres ces psychopathes vont-ils encore causer avant leur mort ?... me confirment dans ma certitude que la disparition de la peine de mort pour de tels psychopathes est une erreur abominable ! Ces monstres auraient dû être exécutés ! Par la justice ! Ils n'ont rien à faire en vie, rien à faire en liberté, au milieu de nos enfants !
Il en va de même des monstres comme ce groupe de psychopathes, et des terroristes ... Qui ne s'est pas réjoui de la mort du terroriste en Espagne, tué alors qu'il s'enfuyait et prévoyait de nouveaux attentats ? Pourquoi les laisser survivre, les juger puis les libérer, pour qu'ensuite, dans cinq ans, ils recommencent et tuent d'autres personnes, qu'ils servent de modèles à leurs frères psychopathes et terroristes !
Alors oui, la peine de mort doit être rétablie pour ces malades, pour ces meurtriers, parce que c'est la seule réponse sensée que la société française et européenne peut apporter aux défis que ces monstres inhumains nous posent, à nous humains ! Ils ne font plus partie de l'humanité. Ils ont nié cette part d'eux-mêmes !
Réflexion deux (20 août 2017)
Que faut-il conclure de l'affaire «Arche de Zoé» ?
Et aussi de l'affaire Zoé Shepard ...
Eric Breteau et Émilie Lelouch sont-ils finalement coupables dans cette histoire ? Condamnés au Tchad à huit ans de travaux forcés puis graciés, et jamais condamnés en France pour le projet de voler des enfants pour les faire adopter par des familles en France, sont-ils vraiment coupables ? Devraient-ils être condamnés au Tchad ou bien leur arrestation, leur emprisonnement puis leur condamnation n'étaient-ils quune sanction politique à l'égard de méchants blancs volant de gentils enfants noirs ... une sorte de catharsis pour pauvres africains victimes des méchants blancs esclavagistes ? Au final, toute cette histoire se traduit donc par une condamnaction à deux ans de prison avec sursis, soit rien du tout ... Evidemment, ces deux là se rêvaient comme sauveurs ... et la France les condamne malgré tout... Alain Péligat, l´un de leur collègue, sera quant à lui relaxé.
Au fond, le projet d'Eric Breteau et Émilie Lelouch était-il véritablement un crime ? Aider à l'adoption de jeunes africains victimes, même non orphelins, était-il criminel ? Si oui, ne faudrait-il pas interdire toutes les associations qui aident à l'adoption de jeunes enfants et des bébés ? Interdire toutes les ONG ? Condamner les orphelinats catholiques qui aident tellement de familles à adopter ? Par ailleurs, l'Etat français lui-même n'a pas non plus hésité à voler des enfants réunionnais pour les placer dans des familles en France, dans la Creuse, pour les faire adopter par des familles françaises (creusoises). Comment l'Etat français pourrait-il condamner des faits qu'il a lui-même mis en oeuvre ! Au fond, cette histoire était un casse tête. Le combat d'Eric Breteau et Émilie Lelouch était peu-être juste, mais ni dans la forme, ni dans le fond !
Mais est temps de parler d'une autre affaire beaucoup plus simple et à la fin heureuse, celle de Zoé Shepard ! Cette auteur avait sorti en 2010 un livre pamphlet sur la fonction publique territoriale française sous un nom d'emprunt. Sous son vrai nom, elle s'appelait Aurélie Boullet, et travaillait réellement dans la fonction publique territoriale (l'une des trois fonctions publiques française, avec la FP d'état et la FP hospitalière), au conseil régional d'Aquitaine. Son crime ? Elle avait sorti un livre intitulé «Absolument dé-bor-dée ou le paradoxe du fonctionnaire». J'ai adoré ses descriptions de «Coconne» et «Simplet». J'ai longuement parlé et défendu de cette affaire.
https://saucrates.blog4ever.com/l-affaire-aurelie-boulet-alias-zoe-shepard
Pour ce crime, Aurélie Boulard a failli être exclue (révoquée) de la Fonction publique. Elle est passée en conseil de discipline, dont les représentants, pour la moitié syndicalistes, ont voté son exclusion. J'ai écrit au président de la région Aquitaine à ce sujet, lui indiquant qu'en tant que socialiste, ce serait une honte s'il révoquait cette agent, niant la liberté d'expression. Au final, elle écopa de 10 mois de suspension, dont 4 mois ferme !
Aurelie Boullet a sorti deux autres livres depuis 2010, l'un «Ta carrière est finie» en 2012 et le deuxième «Zoé à Bercy» en 2015. Elle a passée de nombreuses années à être placardisée à la Région Aquitaine, et je ne peux que frémir en pensant à toutes ces années qu'elle a passé sans occupation au milieu d'agents qui la détestent, l'évitent, la fuient ou se liguent contre elle. Elle est sacrément solide Aurelie ! Chapeau !
http://www.breizh-info.com/2016/02/06/38687/ministere-economie-finances-publiques-shepard-interview
L'histoire finit bien d'une certaine façon. Aurélie Boullet n'a pas été révoquée et travaille toujours à la Région Aquitaine. Elle a sorti trois livres et continue de s'exprimer parfois sur les errements de la Fonction publique territoriale. Les abrutis et les ineptes qu'elle a dépeint existe bien sûr dans la fonction publique territoriale, de même que dans presque toutes les entreprises ... on y trouve souvent des «Simplet», des «Coconnes», mais aussi des «Joli cœur» et des «Manipulateur». Elle aurait aussi pu nous parler beaucoup plus longuement des syndicalistes, qui ne l'ont pas loupé dans cette histoire. Je me rappelle encore d'un élu CGT, Pascal Gomez, qui expliquait en janvier 2011 que «la base s’est sentie atteinte dans son honneur». Le pire de cette histore, c'est qu'à un moment, elle a pourtant été syndiquée à la CGT !
Certains pourront penser qu'attaquer la Fonction publique est une solution de facilité. Que pour une «Coconne» ou un «Simplet», il y a de nombreux fonctionnaires méritants, courageux, travailleurs et intègres. Certains pourront estimer qu'elle fait le jeu de la droite et de l'extrême-droite dans cette affaire, des ultra-libéraux ...
http://www.lepoint.fr/economie/les-verites-de-zoe-shepard-27-06-2013-1700785_28.php
Zoé Shepard ne dit justement pas le contraire, bien évidemment, en rappelant qu'il y a des milliers d'humbles fonctionnaires dans les mairies, au quotidien et au contact de la population, qui rendent d'insignes services pour une considération et un traitement misérable.
Mais pour autant, il s'agit d'un courant politique (l'ultra-libéralisme) que l'on ne pourra pas stopper ... Parler du réchauffement climatique ne le fait pas arriver plus vite, que je sache ! Pourquoi en irait-il différemment dans le cas d'Aurélie Boullet alias Zoé Shepard ? Ce qu'elle dit n'est pas faux. Juste un florilège des aberrations quotidiennes rencontrées dans la Fonction publique territoriale !
Réflexion une (19 août 2017)
Le temps des affaires n'est pas celui de la justice
L'affaire de l'Arche de Zoé
Un certain nombre d'affaires m'ont interpellé au fil des dernières années. Ces affaires pour certaines ne sont toujours pas terminées, pendant, en cours ... Un peu comme l'affaire de Pénélope et François Fillon ... elle aussi va se poursuivre pendant des années et des années, même si pendant les quelques mois de la campagne présidentielle, de nouvelles révélations se succédaient tous les jours ... mise en examen, auditions ... et puis depuis le retrait de François Fillon de la vie politique ... plus rien ... bizarrement !
Donc d'abord l'affaire de l'arche de Zoé ...
https://saucrates.blog4ever.com/l-affaire-arche-de-zoe-2
Une sombre affaire de tentative d'enlèvement de jeunes enfants au Tchad, supposés être de jeunes orphelins du Darfour, par une pseudo association humanitaires et de nombreux bénévoles manipulés par le leader du groupe, Eric Breteau, et sa compagne Émilie Lelouch. Affaire qui avait failli conduire cette association humanitaire à voler de jeunes enfants tchadiens à leur famille, familles qui ne les aurait jamais revus s'il avait réussi à faire décoller son avion et sa centaine d'enfants, avec l'objectif de les faire adopter en France par des familles à la recherche d'enfants.
L'histoire débute en octobre 2007. L'opération humanitaire échouera avec l'intervention de la police tchadienne, l'emprisonnement d'une partie des bénévoles au Tchad (dans des conditions de détention forcément atroces) en tant que voleurs d'enfants, eux qui se croyaient des sauveurs des orphelins du Darfour ! Puis leur procès au Tchad, leur condamnation à huit de travaux forcés (peine oubliée en France), les interventions diplomatiques notamment de Nicolas Sarkozy pour les rapatrier en France pour qu'ils y effectuent leur peine, peine qu'ils n´effectueront évidemment pas. Ils ont été rapatriés en France le 28 décembre 2007, trois mois à peine après l'éclatement de l'affaire. On ne pourra pas critiquer la justice tchadienne sur sa lenteur. Des intérêts supérieurs plaidaient pour une justice rapide, expéditive (au fond, peu importait la peine, puisque les condamnés devaient être extradés vers la France et leurs peines être annulées). En janvier 2008, leur peine de travaux forcés est commué en une peine classique de prison. Depuis leur retour, ils sont incarcérés à la prison de Fresne. Et en mars 2008, le président tchadien leur accorde une grâce présidentielle, même si bizarrement l'armée française vient d'intervenir au Tchad pour lui permettre de rester au pouvoir. Les six membres emprisonnés sont libérés le 31 mars 2008.
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/L%27Arche_de_Zoé
Mais cette histoire n'était pas terminée. Eric Breteau, Émilie Lelouch et quelques uns des bénévoles restent poursuivis par la justice française. Signe que la justice francaise est beaucoup plus longue à juger que la justice tchadienne, ce n'est qu'en décembre 2012 que la justice statue sur le sort des membres de l'Arche de Zoé : Eric Breteau, Emilie Lelouch, Philippe Van Winkelberg, Christophe Lentien,
Alain Péligat, Marie-Agnès Peleran et Nathalie Cholin. A noter qu'Eric Breteau et Émilie Lelouch ne seront pas présents lors de leur procès, vivant alors en Afrique du Sud, laissant leurs collègues et victimes seuls sur le ban des accusés, face au tribunal. Ils seront tous les deux condamnés à deux ans de prison ferme le 12 février 2013. Les ont-ils fait ? Mystère ?
Evidemment que non. Ils sont libérés et placés sous contrôle judiciaire en avril 2013, dans l'attente de leur procès en appel. Quand on pense que des gosses sont jetés en prison de manière préventive, parfois sur de simples présomptions, mais que ces deux manipulateurs chevronnés n'auront fait que deux mois de prison sur les deux ans de leur peine. Sacrément injuste !
C'est le 14 février que se terminera leur procès en appel, qui les voit être condamnés simplement à deux ans de prison avec sursis. Le troisième prévenu à avoir fait appel de sa condamnation, Alain Péligat, a lui été relaxé. Eric Breteau et Emilie Lelouch se virent aussi interdire d'exercer pour cinq ans toute activité professionnelle d'accueil, d'hébergement ou de placement de mineurs.
Et, apparemment, le pourvoi en cassation de leur condamnation a depuis été rejeté.
Aujourd'hui, en 2017, les gamins qu'ils devaient enlever au Tchad ont dix ans de plus ; ils doivent être pour certains de jeunes adultes, dont certains tentent peut-être la traversée de la Méditerranée sur des coques de fortune. A moins qu'ils ne soient devenus riches grâce à cette histoire ; le jugement du Tchad prévoyait le versement d'une amende de plus de 4 milliards de francs CFA aux familles des enfants victimes. Mais ces milliards ont-ils été versés ? Et par qui ? L'Etat Français ? Même si Nicolas Sarkozy avait juré ses grands dieux que le gouvernement ne se substituerait pas aux condamnés ! Mais François Hollande qui n'aime pas les riches ?
Eric Breteau est désormais âgé de 47 ans, Émilie Lelouch de 41 ans, et jusqu'en 2019, ils ne devraient plus pouvoir exercer d'activité d'accueil, d'hébergement ou de placement de mineurs ! Où sont-ils ? Répartis en Afrique du Sud ? Au Tchad ?
L'affaire Dieudonné
Réflexion quatre (lundi 13 janvier 2014)
Il n'y a plus d'affaire Dieudonné !
Voilà, c'est fini. C'en est presque triste, Dieudonné abandonne le conflit qui l'opposait au Système, au gouvernement, aux associations antiracistes. Il n'y a plus d'affaire Dieudonné. Comment écrire sur une affaire qui n'en est plus une ? De toute façon, contre l'unanimité de droite et de gauche, contre l'unanimité contre lui de tous les bien-pensants et les empêcheurs de penser en rond, il n'avait plus aucune chance. Lorsque les plus hautes instances judiciaires françaises violent allègrement le droit public français, que voulez-vous qu'un pauvre artiste franco-camerounais hors système fasse contre tout le monde ?
Ah ! Ca me rappelle les histoires sur Yannick Noah ! Le fait que lorsqu'il gagnait il était «le français qui gagnait» ... Et lorsqu'il perdait, il était «le franco-camerounais qui perdait» ... Parce que combien de fois n'a-t-on pas entendu ces derniers jours, les uns et les autres, de la part des journalistes ou des associations antiracistes, cette petite antienne sur Dieudonné le franco-camerounais ... Mais certainement lui n'a-t-il pas droit aux mêmes égards que les autres opprimés !!!
Ceci étant dit, gageons que la curée contre Dieudonné ne prendra pas fin aussi rapidement, et que ses opposants, ses adversaires ne s'arrêteront que lorsque Dieudonné sera mort, assassiné, emprisonné ou en fuite à l'étranger. Sous couvert d'un combat contre l'antisémitisme, c'est tout un système, toute la machinerie d'un système qui s'est déchaîné, et cette machinerie a besoin de sang pour être satisfaite.
La rue n'est pas totalement contre Dieudonné. Evidemment, des millions de personnes bien-pensantes en France se disent dégoûtées par les blagues racistes de Dieudonné ; j'en côtois de nombreuses, et défendre Dieudonné est à leurs yeux au mieux incompréhensible, et au pire fait de toi un raciste, un antisémite et un gros con. Malgré tout, une grosse frange des français, ceux des cités, tous ceux qui sont victimes des violences sociales de notre société, chômage, licenciement, doivent, je pense, trouver une certaine jouissance à le voir combattre un système qui les a eux-mêmes exclus, broyés, rejetés ... Comment cette rue peut-elle comprendre les rodomondades de Valls et de sa clique, de la ministre de la culture et autres personnages importants de l'Etat et de la société française ?
Comme moi ? L'impression que toute cette histoire n'avait pour seul but que de tenter de noyer l'affaire Hollande-Gayet dont le pouvoir socialiste savait qu'elle était sur le point d'exploser ... Il aurait simplement suffi que le magazine Closer informe quelques jours à l'avance le gouvernement de cette parution ... ou que les renseignements généraux jouent leur rôle et aient transmis cette information à leur hiérarchie ... de quel ministère dépendent-ils donc au fait ? De l'intérieur ? C'est bizarre ... (pour rappel, les RG avaient été capables sous Mitterrand de masquer son aventure extraconjuguale et sa fille Mazarine) ... On appelle cela allumer un contre-feu pour étouffer médiatiquement une autre affaire très dangereuse pour le pouvoir socialiste ...
Et les plus récentes paroles de Manuel Valls apparaissent en regard particulièrement désagréables : «Je ne laisserai plus jamais, plus rien passer des mots qui divisent les Français (...). J'ai déclenché un mouvement parce qu'il y avait une forme d'impunité qui me révoltait» ... Ou s'arrêtera le ministre de l'intérieur contre ce qui divise les français ? Des milliers de choses divisent les français ... L'autorisation du mariage des homosexuels divise les français ... Le chômage et le fait de disposer d'un travail divise les français ... Les différences de richesse divisent les français ... Les différences de pouvoir, entre ceux qui peuvent bafouer la loi, rouler à tombeaux ouverts sur les autoroutes parce qu'ils sont ministres, gendarmes ou policiers, et ceux qui à la moindre incartade passent sous les fourches caudines de la justice (comme Dieudonné), tout cela divise les français ... Pourquoi donc ne s'attaquer qu'aux mots ? Les propos moqueurs sur les blancs, sur les noirs, sur les jaunes, sur les musulmans, sur les bretons, sur les auvergnats, bénéficieront-ils également de la même valeureuse condamnation de Manuels Valls ?
http://tempsreel.nouvelobs.com/topnews/20140111.AFP7321/dieudonne-interdiction-du-spectacle-confirmee-a-orleans.html
Enfin, cette non-affaire Dieudonné continue de me laisser un goût d'insatisfaction. Insatisfaction parce que les jugements rendus par le Conseil d'Etat, notamment celui de jeudi soir, violent le droit constitutionnel français, les principes supérieurs du Droit français, ceux en raison desquels nous sommes une Démocratie, une République ... Les principes qui devraient être inviolables et sur lesquels justement le Conseil d'Etat et le Conseil Constitutionnel sont censés veiller scrupuleusement ... Et gageons que ce qui a été jugé de manière expéditive, sans possibilité pour Dieudonné d'être entendu ni même défendu, cette justice d'exception, gageons que nous nous trouverons nous aussi confronter à ces dérives, dérives d'une justice dévoyée ...
Alors oui, j'aimerais que cette affaire qui n'en est plus une ne s'arrête pas là. J'aimerais que la cour de justice européenne, que la cour européennes des droits de l'homme soit saisie de ce jugement du Conseil d'Etat incompréhensible, inacceptable ... J'aimerais que la liberté d'expression soit défendue ... Car on le voit bien, la fatwa du pouvoir socialiste contre Dieudonné va être lancée de la même manière contre le magazine Closer et ses journalistes qui osent s'en prendre au président de la république et à l'actrice avec lui est prêté une liaison ...
La boite de Pandorre a été ouverte. Et tous les bien-pensants feraient bien de réfléchir rapidement, sur le fait de savoir s'ils veulent rentrer dans une dictature des derniers bien-pensants, des plus puissants ... Le Conseil d'Etat n'a pas encore été appelé à se prononcer sur l'interdiction du magazine Closer, de la sortie de ce numéro ... ou de la fermeture administrative de ce magazine ... après tout, lui aussi est un récidiviste auquel on ne peut plus faire confiance ... Mais je suis sûr que le Conseil d'Etat saura, à la demande du même ministre de l'intérieur, prendre une nouvelle mesure expéditive et liberticide à la demande du pouvoir socialiste ... Quand je pense que des milliers de salariés protégés licenciés en conflit avec leur employeur, des milliers d'entrepreneurs en conflit avec une administration, attendent parfois des années que ce même Conseil d'Etat statue sur leur affaire ... et là, en quelques heures, en quelques dizaines de minutes, ce même Conseil d'Etat est capable de statuer ... Ca doit les laisser songeur ...
Réflexion trois (vendredi 10 janvier 2014)
La décision incompréhensible du conseil d'état dans l'affaire Dieudonné
A 18 heures 40 hier soir, le Conseil d'Etat, saisi en urgence par le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a cassé la décision du tribunal administratif de Nantes qui avait autorisé le spectacle de Dieudonné au Zenith de Nantes. Derrière la décision juridique sur laquelle on peut être ou non d'accord, notamment en ce qui concerne le respect ou non de la liberté d'expression et de la liberté d'opinion, je tiens à réagir sur l'enchaînement de ces événements et sur les délais invraisemblablement courts qui ont été observés dans cette affaire, lorsque l'on sait que le conseil d'état met souvent entre trois et quatre ans pour se prononcer sur les annulations d'autorisation administrative de licenciement de délégués syndicaux et de représentants du personnel.
Revenons sur l'enchainement de la journée d'hier.
http://tempsreel.nouvelobs.com/justice/20140109.OBS1800/en-direct-dieudonne-jouera-t-il-a-nantes-le-tribunal-est-reuni.html
A 10 heures 30 hier matin, l'audience du tribunal administratif de Nantes débute. A 14 heures 20, le tribunal administratif de Nantes décide d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique, ce qui a pour effet de permettre la représentation du spectacle de Dieudonné le soir-même à Nantes. Un peu moins de quatre heures pour le procès et le rendu du délibéré, c'est déjà très rapide.
A 15 heures 10, le ministre de l'intérieur annonce la saisie immédiate du Conseil d'état. L'appel du jugement du tribunal administratif de Nantes se fera directement devant le Conseil d'Etat (et non pas devant une Cour administrative d'appel) car il s'agit d'un rejet de référé 'liberté'. Le recours n'aurait pas été suspensif : il n'aurait pas empêché l'exécution de la décision des juges.
A 15 heures 15, il est annoncé que l'audience en référé du conseil d'état se tiendra à 17 heures, soit avec une heure 45 minutes de délai. L'avocat de Dieudonné ne pourra pas être présent, et donc Dieudonné ne pourra vraisemblablement pas être défendu. Or, il me semblait qu'en droit français, toute personne avait le droit d'être défendue ? Sauf Dieudonné ?
A 18 heures 45, au bout donc de 1 heure 45 minutes de jugement et de délibéré, devant apparemment un juge unique, le Conseil d'Etat casse la décision du tribunal administratif de Nantes et donne raison au préfet de Loire-Atlantique. Le spectacle de Dieudonné est donc interdit ce soir à Nantes.
Gageons qu'il s'agit d'un plus rapide jugement intervenu à la suite d'une décision d'un tribunal administratif ! Impossible de savoir si Dieudonné était représenté par un avocat/avoué devant la Conseil d'Etat et s'il a pu être défendu ? Impossible de savoir même de quel manière un rapporteur au conseil d'état a pu élaborer les conclusions du gouvernement ? Impossible surtout de savoir si les droits de cette personne, Dieudonné M'bala M'bala, ont été respectés.
Je n'ai jamais vu pareille parodie de justice être tenue, et je n'ai plus l'impression d'être dans un état de droit, même si tout le monde se réjouit de cette décision et de l'annulation du spectacle de Dieudonné. Pour moi, il n'y a pas eu de justice rendue dans cette affaire, aussi sordides puissent être les blagues et horreurs prononcées par Dieudonné sur les juifs. Même les pires criminels de guerre nazis avaient eu droit à un procès juste et équitable à Nuremberg !
Certains sont fiers d'être en France suite à ce jugement ! Moi, j'ai honte d'y vivre si la plus haute instance juridictionnelle en droit public français peut prononcer un jugement dans ces conditions, dans cette précipitation ! Gageons que la Cour européenne des droits de l'homme condamnera la France dans cette affaire !
Réflexion deux (jeudi 9 janvier 2014)
La liberté d'expression
A la base de l'affaire Dieudonné, pour sa condamnation ou sa défense, il me semble nécessaire de resituer ce que l'on appelle «la liberté d'expression». Quelles sont les fondements juridiques et constitutionnels de la liberté d'expression, et une personne comme Dieudonné peut-elle être condamnée publiquement et poursuivie pour des opinions, être interdit d'expression de ses opinions, même si celles-ci sont considérées comme racistes et antisémites ?
J'ai trouvé plusieurs fondements constitutionnels à la liberté d'expression. Le premier fondement historique, le plus ancien, se trouve dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, principes qui sont repris dans le préambule de la constitution actuelle de la France (du 4 octobre 1958) et ont donc valeur constitutionnelle. Les articles 10 et 11 traitent respectivement de la liberté d'opinion et de la liberté d'expression.
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789
http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Declaration-des-Droits-de-l-Homme-et-du-Citoyen-de-1789
Article 10 : «Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi.»
Article 11 : «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.»
A noter que les limites de la liberté d'expression doivent être prévues par la Loi. Concernant la liberté d'opinion, on notera que l'article 10 est plus restrictif avec cette référence à d'éventuels troubles de l'ordre public, notion particulièrement subjective. Il est clair que le droit fondamental à la liberté d'expression aux Etats-Unis est beaucoup plus protégé puisque le premier amendement de 1791 à la constition américaine stipule : «Congress shall make no law respecting an establishment of religion, or prohibiting the free exercise thereof; or abridging the freedom of speech, or of the press; or the right of the people peaceably to assemble, and to petition the Government for a redress of grievances.» (traduction : «Le Congrès ne fera aucune loi accordant une préférence à une religion ou en interdisant le libre exercice, restreignant la liberté d'expression, la liberté de la presse ou le droit des citoyens de se réunir pacifiquement et d'adresser à l'État des pétitions pour obtenir réparation de torts subis.»)
Le deuxième fondement constitutionnel de la liberté d'expression est à chercher dans La Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée le 10 décembre 1948 par les 58 membres de l’Assemblée générale de l'Organisation des nations unies (ONU) de l'époque. Les articles 18 et 19 consacrent la liberté d'expression, conjointement à la liberté de conviction et de religion :
Article 18 : «Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et l'accomplissement des rites»
Article 19 : «Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit»
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle (article 55 de la constitution française de 1958 : «Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie.»). Il doit être noté également que les limites à la liberté d'expression et d'opinion des personnes et des individus ne sont pas prévues dans ces articles de La Déclaration universelle des droits de l'homme, par différence avec les deux premiers textes de 1789 ; signe que les principes démocratiques ont évolué avec les siècles, même si on ne s'en aperçoit pas actuellement en France.
Un troisième fondement constitutionnel de la liberté d'expression peut être trouvé dans La Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales du Conseil de l'Europe, entrée en vigueur le 3 septembre 1953, dont l'article 10 traite de la liberté d'expression :
Article 10 – Liberté d'expression
«1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.
2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.»
Il peut être noté que ce texte est plus limitatif puisqu'il prévoit des limites («formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi») pour tout ce qui a trait «à la sûreté publique, à la défense de l'ordre (...), à la protection (...) de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui (...)», certainement supposées être indispensables dans des démocraties comme les nôtres.
Enfin, pour ce qui constituerait une opinion politique (puisque la qualité d'humoriste de Dieudonné lui est refusée par ceux qui le contestent), la liberté d'expression est également protégée constitutionnellement par l'article 4 de la Constitution française du 4 octobre 1958 :
http://www.legifrance.gouv.fr/Droit-francais/Constitution/Constitution-du-4-octobre-1958
«Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.
Ils contribuent à la mise en oeuvre du principe énoncé au second alinéa de l'article 1er dans les conditions déterminées par la loi.
La loi garantit les expressions pluralistes des opinions et la participation équitable des partis et groupements politiques à la vie démocratique de la Nation.»
Pour être clair sur ce sujet, il faudrait aussi s'intéresser à ce que l'on appelle la notion d'abus de droit, selon le principe qu'aucun droit ne devrait être absolu. Ce n'est cependant pas le cas dans le cadre des divers amendements à la constitution américaine (pourtant les américains ne s'en portent pas plus mal) ou bien si on lit La Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 (l'ironie de l'histoire veut que ce texte ait été adopté à Paris, au Palais Chaillot, en un autre temps).
Autre ironie de cette histoire sur Dieudonné, c'est bien que le site du Nouvel Obs puisse appliquer une politique de modération et de censure sur les opinions exprimes sur les blogs concernant cette affaire, alors l'article 10 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales du Conseil de l'Europe de 1953 indique pour la liberté d'expression «sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques (...)». L'équipe des modérateurs du Nouvel Obs n'est certainement pas une autorité publique, mais elle s'attribue un droit de censure qui est refusé aux autorités publiques.
Réflexion une (mercredi 8 janvier 2014)
L'affaire Dieudonné
Que faut-il penser de cette histoire de quenelle, de Dieudonné, de son antisémitisme et de ses déboires avec le gouvernement français et tout particulièrement le ministre de l'intérieur Manuel Valls ? Je ne connais pas les spectacles de Dieudonné et je ne me suis même pas sûr que je les apprécierais. Mais cela ne suffit pas à m'interdire à prendre position dans cette affaire. Après tout, je ne connais guère plus le moindre humoriste français (autant qu'il soit possible de dire que Dieudonné est un humoriste) et il est certain par exemple que j'aime encore moins les spectacles de Jean-Marie Bigard et l'horrible slip kangourou qu'il a affiché pour un de ses spectacles. Le dernier humoriste que j'aimais bien était Coluche, et son ami Thierry Le Luron. J'ai un peu l'impression depuis cette époque qu'il n'y a eu pas un seul humoriste valable en France (à l'exception de quelques blagues de Roland Magdane). D'une certaine manière, Coluche et Thierry Le Luro étaient des humoristes engagés politiquement, plus que des simples humoristes faiseurs de blagues ... Mais évidemment, ils défendaient les 'bonnes' causes, les causes politiquement 'acceptables', et n'attaquaient pas les symboles qu'il ne faut pas aborder dans une démocratie française qui pose un certain nombre d'interdits.
Et c'est pour cette raison qu'il me semble qu'il faut défendre Dieudonné M'bala M'bala. Evidemment, il semble que ses spectacles soient largement occupés par des blagues ou des attaques concernant quelques personnes de la communauté juive française. On peut parler d'une obsession anti-juive de Dieudonné dans ses spectacles. En même temps, son obsession peut se comprendre s'il se croit l'objet d'une caballe des politiques et d'un lobby juif français.
http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20140103.OBS1315/au-spectacle-de-dieudonne-rires-non-stop-et-obsession-des-juifs.html
Le problème selon moi se trouve à plusieurs niveaux. Premièrement, est-il normal en France qu'on puisse rire d'un certain nombre de choses, d'un certain nombre de gens, mais qu'il soit interdit de critiquer un certain nombre d'autres sujets, comme les juifs, comme la politique d'Israël, comme les handicapés, comme les femmes ... et j'en passe certainement quelques autres sujets. Je pense ainsi que l'on a plus le droit de se moquer des noirs sans risquer une plainte d'une association anti-racisme (notamment de celle de Lozès). Pourtant je me rappelle de certaines blagues d'un ancien humoriste qui aimait bien prendre un supposé accent africain (Michel Leeb) et je ne suis pas sûr que ses blagues ne seraient pas aujourd'hui poursuivies pénalement.
Voilà ce qu'écrivait Rama Yade de Michel Leeb, dans un ouvrage intitulé 'Noirs de France' :
« En jouant avec l’inconscient collectif de son public, Michel Leeb, grimé en noir et les lèvres rougies, a construit toute sa carrière d’humoriste sur ces clichés, notamment le supposé accent africain présenté comme la manifestation d’un handicap intellectuel, sans que, pendant longtemps, personne ne s’en étonne. On entend quelquefois dire que ces sketches ne sont pas racistes et que, décidément, on ne peut plus rire de rien. Pour savoir si les sketches de Michel Leeb sont drôles ou racistes, il suffirait d’imaginer, un instant, que son public soit entièrement noir »
De qui en France peut-on se moquer sans danger aujourd'hui ? A part des blancs, et de certains régionalismes de blancs français (les auvergnats par exemple), je ne suis pas sûr qu'on puisse se moquer ouvertement d'autres types de couleur de peau. Les chinois et les niakwés ? Je ne pense pas non plus que cela soit sans danger pénal ? Les guignols de Canal Plus se permettent simplement de se moquer des militaires américains ressemblant à Stallone se moquant des Niakwés ... Il est extraordinaire que Brice Hortefeux ait dû mentir pour travestir une de ses sorties racistes sur les arabes pour prétexter qu'il parlait en fait des 'auvergnats' ... «Un seul cela suffit ...». Personne ne l'a attaqué pour s'être attribué cette attaque et personne n'y aurait pensé. «Un seul auvergnat cela suffit ...» n'aurait été considéré comme raciste par personne. Mais l'expression «un seul magrebhin cela suffit ...» serait raciste ?
Mais il y a pire que de se moquer des noirs ou des magrebhins ou des niakwés. C'est de se moquer des juifs. Les premières blagues vous exposent à être poursuivis au plan civil ou pénal par les associations communautaristes noires ou antiracistes, si vous êtes un humoriste blanc. Les blagues sur les juifs ou Israël vous exposent à condamner politiquement comme antisémite par les associations communautaristes juives ou antiracistes et d'être en poursuivi et condamné par le gouvernement et par le ministre de l'intérieur. Elles vous exposent à être victime d'un déchainement de violences et d'une condamnation morale. Vous n'êtes plus un homme, ni un humoriste : vous êtes devenus un antisémite !
Défendre Dieudonné, c'est simplement selon moi combattre l'idée que la liberté d'expression puisse être limitée, c'est défendre l'idée que la liberté d'expression est illimitée et constitutionnellement protégée, et qu'elle ne se limite pas aux seules moqueries contre les 'hommes blancs'. Que ce n'est pas une sorte d'auto-dérision pour hommes blancs ayant le sens de l'humour, ou une catharsis pour les autres peuples ou pour les femmes qui peuvent leur faire payer des siècles de domination sans que la justice française n'y ait rien à redire. N'oublions pas que le simple fait qu'une association anti-raciste ait pu se constituer partie civile dans une histoire de racisme anti-blanc avait fait polémique il y a quelques mois.
Un deuxième raison me poussant à défendre la liberté d'expression de Dieudonné concerne l'acharnement de Manuel Valls à son égard. Les ministres de l'intérieur ont régulièrement des marottes. Le gouvernement de Nicolas Sarkozy avait la marotte des organisations terroristes d'extrême-gauche et un petit groupuscule de militants (le groupe de Tarnac autour de Julien Coupat) en avait fait les frais. La ministre de l'intérieur de Nicolas Sarkozy de l'époque, Michèle Alliot-marie, avait pour objectif de s'attaquer aux groupes supposés terroristes d'extrême gauche et n'avait trouvé à s'attaquer qu'au groupe de Tarnac, supposé être le rédacteur d'un petit livret (libelle) intitulé 'l'insurrection qui vient'. J'avais condamné cette affaire comme je condamne aujourd'hui la marotte de l'antisémitisme de Manuel Valls. Comme le disait Julien Coupat à l'époque : «l'antiterrorisme est la forme moderne du procès en sorcellerie». Aujourd'hui, avec ce gouvernement socialiste, c'est plutôt l'antisémitisme qui est la forme moderne du procès en sorcellerie. Tout ceci est bassement politique et ne devrait pas occuper l'espace médiatique. Je crains que cela ne vise qu'à étouffer toute autre forme de débat sur l'impopularité de ce gouvernement socialiste et à cristalliser une opposition et une opinion publique sur des sujets moins dangereux pour un président de la république aux abois. Les chiens (en général) ont besoin d'un os à ronger ; c'est simplement tombé sur Dieudonné comme il y a quelques années c'était tombé sur Julien Coupat et son amie Yldune Levy.
Après cela, que dire d'autres. Il est évident qu'en défendant Dieudonné, je me suis attiré la haine de toute une partie influente de la blogosphère du Nouvel Obs autour d'Allegra et Mirage ... et d'Anna (mais est-elle encore là) et que je ne vais pas pouvoir y faire long feu. On peut parler du contenu des blagues de Dieudonné ou de ce geste condamné (la quenelle). Je n'en ai strictement aucune opinion. Mais un geste qui choque a forcément beaucoup d'attrait pour tous ceux qui veulent s'inscrire contre le système (les jeunes adolescents ou adulescents), ou qui apprécient simplement le personnage de Dieudonné, pour X raisons. Les réactions indignées provoquées par la quenelle d'Anelka, les appels au limogeage/expulsion de ce joueur m'amusent ainsi extraordinairement. La quenelle d'Anelka est ainsi simplement révélateur que toute critique à l'égard des juifs et du sionisme est ainsi impossible en Europe (du moins en France et en Angleterre) et cette impossibilité anti-démocratique devrait de fait imposer à tous ceux qui militent pour la démocratie de combattre cette histérie anti-antisémite.
Saucratès
L'affaire Arche de Zoé (2)
Réflexion seize (11 décembre 2012)
Le gachis de l'affaire Arche de Zoé
Ces jours-ci se tient la partie française du procès de l'affaire de l'Arche de Zoé, cinq ans après les faits. Deux des prévenus (Eric Breteau et sa compagne Emilie Lelouch) se sont réfugiés en Afrique du Sud, laissant seuls leurs compagnons répondent de cette sordide et désastreuse affaire, qui ont conduit certains de leurs membres dans les geôles tchadiennes et devant la justice de ce pays, où ils furent condamnés à huit ans de travaux forcés par la cour criminelle de N’Djamena (il y a cinq ans le 26 décembre 2007).
Signe d'une absence d'indépendance de l'Etat tchadien, les condamnés seront extradés immédiatement après leur condamnation vers la France pour soi-disant y purger leur peine, puis ils furent grâciés par le président tchadien quelques mois plus tard, le 31 mars 2008. Je m'interroge toujours sur les pressions exercées à l'époque par l'Elysée et Nicolas Sarkozy sur le président tchadien, voire sur les dessous de cette opération.
Dans le cadre de ce procès apparaît clairement l'aveuglement des personnes de bonne volonté qui se lancèrent dans cette opération aux côtés d'Eric Breteau, persuadés d'oeuvrer dans la plus stricte légalité, pour le bien d'enfants en difficulté. Les témoignages présentés par Le Monde concernent Alain Peligat, logisticien, et Nathalie Cholin, infirmière urgentiste hospitalière, qui s'occupait du suivi psychologique des enfants et des membres de l'expédition.
http://prdchroniques.blog.lemonde.fr/2012/12/10/arche-de-zoe-un-immense-gachis/
http://prdchroniques.blog.lemonde.fr/2012/12/03/arche-de-zoe-la-detresse-dune-benevole/
Apparaît le côté mégalomane du leader de ce groupe, Eric Breteau, sa folie, son autisme et la dérive criminelle de son plan, qui le conduisit à prévoir d'enlever de jeunes enfants volés à leur famille pour les faire adopter en France, alors qu'initialement, il devait s'agir d'enfants orphelins du Darfour. L'histoire d'un homme ne connaissant pas grand chose à une telle aventure humanitaire et qui ne sut pas comment réagir à une faille de son plan si magique sur le papier, et qui se mua en voleur d'enfants, faisant un tord extrême à toutes les autres opérations humanitaires françaises dans le monde, créant une suspicion de vol d'enfants ...
Et le pire, c'est que pour un peu, il a failli réussir à voler des enfants tchadiens à leur famille, familles qui ne les aurait jamais revus s'il avait réussi à faire décoller son avion et sa centaine d'enfants.
Le malaise qui ressort de cette affaire, c'est que de telles opérations (de vols d'enfants de pays en développement) ont souvent eu lieu par le passé et qu'elles n'ont jamais été condamnées par la justice. L'une d'elles concerne l'affaire des enfants de la Creuse, de jeunes réunionnais qui dans les années 1950-1960, ont été de la même manière arrachés à leurs parents, à leur famille, pour être envoyés en France, dans la Creuse comme garçons de ferme, pour y être adoptés, alors qu'à leur famille il était expliqué qu'ils allaient suivre une formation. La Réunion à l'époque était pourtant un département français !
Alors l'indignation publique des autorités françaises dans l'affaire Arche de Zoé me fait bien rire !
Cette histoire fait également apparaître un ethnocentrisme marqué de ces soi-disant bénévoles humanitairement impliqués. Ainsi Alain Péligat et son épouse ont élevé sept enfants, dont trois enfants adoptés, et sont engagés dans l'accueil temporaire d'adolescents ou de femmes en difficulté. Un ethnocentrisme qui veut faire croire qu'un jeune enfant africain sera forcément plus heureux en France que de son pays d'origine, à pouvoir être élevé par une famille française que par les siens, à pouvoir bénéficier de la culture française que de se contenter de la culture africaine. Ces humanitaires semblent ne pas s'être véritablement libérés de l'impression que seule la civilisation européenne est intéressante/valorisante/valable.
Epilogue de cette affaire, trois ans de prison dont deux ans fermes ont été requis par la procureure contre Eric Breteau et sa compagne Emilie Lelouch ; celle-ci ayant également demandé au tribunal de délivrer un mandat d'arrêt contre les deux prévenus qui vivent actuellement en Afrique du Sud et ne se sont pas présentés à l'audience. Des peines avec sursis ont aussi été requises contre les quatre autres prévenus : le docteur Philippe Van Winkelberg (18 mois), Christophe Lentien (12 mois), Alain Péligat (8 mois) et Marie-Agnès Peleran (8 mois). Ces derniers s'apparentent pourtant autant à des victimes abusées qu'à des coupables criminels ... De même que Nathalie Cholin, infirmière qui avait accompagné l'association au Tchad, qui était plus une victime entraînée qu'une coupable.
D'une certaine manière, on aurait pu se retrouver embarquer facilement dans cette affaire si on avait croisé la route d'Eric Breteau et que l'on avait cru à son histoire de sauvetage d'enfants, si on avait eu envie de sauver des enfants, si on avait été tenté par l'aventure et l'humanitaire ...
Réflexion quinze (13 avril 2012)
Actualités récentes des aventures judiciaires des membres de l'Arche de Zoé
Le 27 octobre 2007, il y a quatre ans et demi, débutait les péripéties pénales de l'affaire de l'Arche de Zoé, et notamment de ses six principaux membres, Eric Breteau (37 ans à l'époque), sa compagne Emilie Lelouch (31 ans), Alain Péligat (56 ans), Dominique Aubry (50 ans), Philippe Van Winkerberg (48 ans) et Nadia Merimi (la benjamine).
Deux mois plus tard, le 26 décembre 2007, ils étaient condamnés à huit années de travaux forcés par la cour criminelle de N’Djamena au Tchad, après cinq jours de procès, ainsi qu'à verser solidairement 4,12 milliards de francs CFA (6,5 millions d’euros) aux familles des enfants.
Le 28 décembre, ils sont rapatriés en France pour purger leur peine. Evidemment, à ce moment-là, on comprend à la fois que le procès tchadien était une comédie autorisée par le gouvernement français pour faire semblant de respecter l'indépendance de l'état tchadien, mais on devine aussi que les six condamnés français ne purgeront pas leur condamnation. Le 28 janvier 2008, le tribunal correctionnel de Créteuil transforme la peine de travaux forcés en une peine de prison ferme. Et le 31 mars 2008, le président tchadien signe un décret leur accordant une grâce présidentielle.
Les membres de l'Arche de Zoé n'en ont cependant pas terminé avec la justice française. Ils demeurent poursuivis par la justice française pour escroquerie, aide à l'entrée et au séjour irrégulier de mineurs étrangers et exercice illégal de l'activité d'intermédiaire en vue d'adoption. Ils ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris par les juges d'instruction Yann Daurelle et Martine Vezant en charge du dossier (Dominique Aubry et Nadia Merimi ont bénéficié pour leur part d'un non-lieu). Le 21 septembre 2011, la chambre d'instruction de la cour d'appel de Paris a fixer les charges retenues contre eux. Outre Eric Breteau et sa compagne Emilie Lelouch, sont également poursuivis le médecin Philippe van Winkelberg et le logisticien Alain Péligat, ainsi que la journaliste Agnès Pelleran et un membre de l'association resté en France, Christophe Letien. Eric Breteau et Emilie Lelouch risquent dix ans de prison et 750.000 euros d'amende.
http://basse-normandie.france3.fr/info/non-lieu-pour-le-pompier-bas-normand-65537647.html
http://provence-alpes.france3.fr/info/suite-de-l-affaire-arche-de-zoe--70511346.html
Alain Peligat avait également fait appel de sa condamnation par l'état tchadien (il était le seul membre de l'association à conduire cette démarche). Sa condamnation a pourtant était confirmée d'abord par la cour d'appel de Paris le 19 janvier 2011, jugement au cours duquel il avait appelé les magistrats à laver son honneur («... que vous puissiez penser que nous avons été jugés correctement, ça, je ne comprends pas ... je ne vais pas accepter d'être condamné alors que je n'ai rien fait, je suis parti faire de l'humanitaire et non enlever des enfants»), puis rendu définitive par la Cour de cassation, qui a rejetté son pourvoi le 28 septembre 2011.
En sens inverse, la procédure engagée par l'état tchadien pour le compte des familles des victimes pour obtenir le paiement de l'indemnité de 6,5 millions d'euros, à laquelle les six membres de l'association avait été condamnée, a été rejetée par la justice française. Le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains a en effet débouté le 27 octobre 2011 l’association tchadienne qui réclamait 6,3 millions d’euros de dommages-intérêts au médecin de Castellane en exécution du procès de N’Djamena. «L’ordonnance du référé a débouté les plaignants sur deux plans : d’une part, sur l’irrégularité de l’arrêt tchadien (qui ne mentionne pas les noms des victimes) et, d’autre part, sur la procédure d’exequatur, c’est-à-dire l’exécution du jugement en France».
http://www.journaldutchad.com/article.php?aid=1969
http://www.lequotidiendumedecin.fr/information/le-dr-van-winkelberg-gagne-un-round
Cependant, derrière toutes ses péripéties judiciaires, il ne faut pas perdre de vue le sort des enfants tchadiens (ou du Darfour) totalement oubliés en France. A entendre les principaux membres de l'association Arche de Zoé, ces enfants étaient réellement des orphelins du Darfour, sans père ni mère, et ceux-ci ont depuis disparu, alors qu'ils leur promettaient une vie de rêve et de bonheur en France auprès de familles d'accueil.
La réalité semble être toute autre. Ibrahim Oubali Mahomet, paysan de l’ethnie masalit, est le père de trois enfants « volés » par l’Arche de Zoé : Hamza, Ami, Ahmat, aujourd’hui âgés de 10, 8 et 6 ans. «Des Tchadiens de la commune nous avaient dit que des Blancs avaient ouvert une école à Adré, pour apprendre l’arabe et le français», raconte-t-il. Marié à deux femmes, l’agriculteur a 14 enfants. Pourquoi aurait-il refusé d’envoyer trois de ses fils aux cours de l’Arche de Zoé ?
L’aîné (Hamza) a gardé des souvenirs de cette histoire. Il insiste sur sa grande frayeur lors de son départ vers Abéché, ainsi que sur les faux pansements dont l’avaient affublé les membres de l’Arche de Zoé dans le but de parfaire leur déguisement de réfugiés soudanais. «J’ai compris qu’on nous trompait à ce moment-là. J’ai eu peur et j’ai essayé d’avertir les autres. Puis je me suis mis à pleurer», raconte-t-il.
Hamza et ses frères sont désormais scolarisés à l’école d’Adré. Ibrahim Oubali Mahomet a tout de même obtenu un premier dédommagement. À chaque famille de la partie civile, l’État tchadien a versé 3,7 millions de francs CFA (environ 5 600 €) en 2008. Autant dire une petite fortune : le revenu mensuel moyen d’un fonctionnaire tchadien n’atteint pas les 100 000 francs CFA (151 €). Cet argent a permis à Ibrahim Oubali Mahomet de quitter son village à la frontière, d’acheter un terrain à Adré, de construire un abri en terre séchée et d’y installer ses proches. «Le reste de la somme a été dépensé à la scolarisation des enfants», assure-t-il.
Autre parent d'enfants victime, Zenaba Oubali, veuve de 35 ans, avait confié ses deux plus jeunes garçons à l’association : Youssouf, 8 ans et Mahamat, 9 ans. L'argent versé par l'état tchadien lui a permis d'ériger une clôture autour de sa maison, d'installer des latrines, de bâtir de nouvelles chambres pour ses huit enfants. La paysanne a aussi investi dans une charrette, une presse à huile, des poules, qui lui ont permis de diversifier ses faibles revenus tirés de l’agriculture pluviale.
Youssouf garde aussi ses distances. Chez lui aussi, visiblement, l’affaire a laissé de mauvais souvenirs. «Je vois des Blancs qui nous enseignent et qui nous mentent en même temps», lâche-t-il. Sa mère dit se réveiller en sursaut la nuit, cherchant à tâtons ses deux garçons qu’elle a cru ne plus jamais revoir. Zenaba Oubali a longtemps vécu avec un sentiment de culpabilité, voire de honte. Comment a-t-elle pu faire confiance à des étrangers ? Aujourd’hui, demeure l’amertume d’avoir été dupé par de belles paroles. «Des chefs locaux m’avaient assuré du sérieux de l’ONG», se souvient l’agricultrice qui venait de perdre son mari. «Autour de moi, beaucoup de gens voulaient inscrire leurs enfants dans cette école où ils devaient être nourris et soignés. Mes deux aînés n’ont jamais appris à lire. J’ai voulu que les deux derniers réussissent.»
http://osi.bouake.free.fr/?Les-enfants-oublies-de-l-Arche-de
Enfin, lire également une analyse intéressante qui remet en perspective cette affaire dans le champ de l'interventionnisme humanitaire et du déracinement. En n'oubliant pas que ce sont d'abord les ONG et les plus largement les blancs qui pâtissent de cette affaire Arche de Zoé au Tchad et en Afrique, et qui ont conduit les ONG a quitté la région frontalière entre Abéché et Adré (marquée par l'assassinat en mai 2008 de Pascal Malingre, chef de mission de l'ONG 'Save the children', alors qu’il accompagnait un convoi humanitaire vers Adré. Le Français devait mener à bien des programmes socio-éducatifs et nutritionnels dans les localités des enfants de l’Arche de Zoé)
http://humanitaire.revues.org/index198.html
Saucratès
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