Mouvements sociaux (1)
Réflexion six (13 mai 2009)
Drôle de grève et drôle de menace du gouvernement ...
Des mois que les grèves touchant certaines universités et certains lycées perdurent. Le gouvernement a été accusé de laisser pourrir ces mouvements sociaux. Ces derniers temps, le gouvernement a commencé à menacer d'une bien étrange manière les enseignants et les étudiants (ou lycéens) qui participent aux actions de blocage des universités ou de certains lycées ; les enseignants grévistes ne seront plus payés, et les étudiants grévistes n'auront pas leurs examens !...
Il faut donc en conclure que pour l'instant, les personnels enseignants des universités qui sont en grève, qui bloquent un certain nombre d'universités françaises, qui n'assurent pas leurs cours, qui ne transmettent pas leur savoir à leurs étudiants, sont malgré tout toujours payés par l'éducation nationale et par l'Etat, employés actuellement à bloquer leur outil de travail, les centres de transmission des savoirs ?
Je n'appelle pas cela une terrible menace, une tragique remise en cause de la liberté de conscience ! J'appelle cela le rappel de la norme. De même pour les étudiants ; il serait tragique que le niveau des examens de fin d'année (ou du baccalauréat) soient rabaissés pour que les étudiants ayant passé leur année scolaire à faire grève obtiennent malgré tout leurs examens.
Il ne s'agit pas d'une remise en cause d'un droit sacré de faire grève par le gouvernement. Il s'agit simplement pour les grévistes d'assumer les conséquences de leurs actes. Faire grève, que ce soit contre un employeur privé ou contre le gouvernement, implique de prendre des risques, de non-rémunération ou de non-réussite aux examens, et de les assumer. Evidemment, la culture française repose traditionnellement sur la stratégie de l'irresponsabilité individuelle au sein des groupes et sur la culture de la revendication, que l'on estime fondée du simple fait de l'importance du groupe ...
Une sorte de prime donnée à l'irresponsabilité et à la revendication, par rapport à la réflexion. Je ne nie pas que certaines réformes doivent être combattues ... Mais dans le monde de l'université et de l'enseignement, la résistance par principe à toute proposition de modification ou de réforme est une forme de système, d'habitude, qu'il serait bon de faire changer.
Réflexion cinq (17 avril 2009)
Du durcissement des conflits sociaux dans les entreprises françaises et de l'illégitimité des mouvements de séquestration des dirigeants ...
Le dialogue social à la française présente un certain nombre de surprises. Nous sommes dans un pays qui reconnaît une forte légitimité aux organisations syndicales représentatives des travailleurs, mais nous sommes aussi un des pays affichant le plus bas taux de syndicalisation d'Europe et du monde, aux alentours de 5% de la population active (et beaucoup moins au sein des seuls salariés du secteur privé) ! Nous sommes aussi dans un pays qui accepte des actions particulièrement limites de la part des organisations syndicales de salariés en période de conflits sociaux, que ce soit la paralysie du pays, des transports publics ou des établissements d'enseignement public ... ou aujourd'hui les séquestrations (forcément violentes) de dirigeants.
Il y a une dizaine de jours, on faisait le compte des entreprises où des actions de séquestration de dirigeants avaient eu lieu, pour influer sur les négociations sur des plans sociaux proposés ... Sony, Caterpillar, Pinault Printemps Redoute, Scapa ... Ces derniers jours, de nouveaux actes de séquestration ont été observés, par exemple chez l'équipementier automobile Faurecia dans l'Essonne, à Faure et Machet (FM Logistic) en Moselle, ou à la Caisse de Sécurité Sociale (et à la CAF) de la Réunion ... Avec les prises de position médiatiques de plusieurs politiques importants, une forme de fièvre agitent désormais les entreprises françaises. Comment envisager désormais une grève sans séquestrer les dirigeants en arguant qu'ils avaient manqué de respect aux salariés et à leurs représentants ?
Les centrales syndicales font l'erreur de ne pas prendre ouvertement position à ce sujet. Il me semble qu'il faut être clair. La séquestration est un acte inacceptable et insupportable. C'est un acte de lâches, de couards. Il est très facile de vociférer, de hurler et de menacer lorsque l'on est une centaine face à quelques négociateurs patronaux ... Très facile. Cela ne demande aucun courage ni aucune intelligence, pas plus que lorsqu'il s'agit de demander 200 euros d'augmentation salariale. Par contre, défendre et argumenter face à ces mêmes négociateurs, représenter dignement ces collègues, inventer une stratégie de négociation et gagner la partie adverse à ses arguments ; ça, c'est de la négociation et c'est du travail.
Je suis totalement opposé à la séquestration arbitraire de dirigeants ou de patrons en raison du caractère violent de ces actions, au minimum une violence potentielle, lorsque la séquestration n'est pas physique ... Et il faut être lâche pour s'attaquer à une personne avec une centaine de personnes autour de soi.
La séquestration est absolument illégale et il faudrait des actions judiciaires prises à l'encontre des personnels qui y participent, pour que la réalité et la dangerosité de ces pratiques soient de nouveau affirmé. Il s'agit de terrorisme social. Il s'agit d'un comportement de meute, comme si ces salariés, grisés par leur nombre et par leur audace, croyaient que tout est possible.
Pour cette raison, le jugement en référé du tribunal de grande instance de Grenoble, qui a ordonné ce vendredi à 19 salariés de Caterpillar, assignés pour occupation illicite et entrave à la liberté de travailler, de laisser libre accès aux usines de Grenoble et Echirolles (Isère), sous peine de payer 200 euros chacun par jour, est un bon jugement. Il rappelle l'état du droit en la matière et les règles devant s'appliquer en matière de conflit social. Il est intéressant de noter que c'est un employeur américain qui a eu le courage de faire appliquer la loi française. Evidemment, les salariés de Caterpillar crient au scandale.
Il faut espérer que d'autres employeurs portent plainte désormais contre les violences qui leur auront été faites lors de leur séquestration. Il est néanmoins vraisemblablement difficile de prouver de tels actes de violence, face à une masse de salariés lâches et solidaires qui nieront vraisemblablement toute violence à l'encontre des personnes séquestrées. On entend souvent dire certains syndicalistes que les dirigeants étaient libres de partir et qu'ils ont été au contraire nourris ... Pour un dirigeant séquestré et admonesté par son personnel, comment prouver les actes de violence ? Face à des syndicats qui se protègent ensuite en imposant la présence dans les accords syndicaux de sortie de conflit des clauses d'arrêt des poursuites pour tout fait commis pendant la grève ?
Il faudrait une position claire et forte de toutes les personnes faisant autorité. Une condamnation forte de ces actions de lâches et de pleutres ... Et des condamnations pénales engagées par l'état à l'encontre de tout ceux qui participent ou ont participé à de telles actions. Et de nouveaux textes de loi pour rendre impossible la couverture de tels faits par des phrases toutes faîtes dans des accords syndicaux, par exemple dès lors que des contraintes physiques sur les personnes auraient été utilisées ...
Pour information, les peines encourues dans les cas de séquestration
http://www.slate.fr/story/3021/que-risquent-les-employ%C3%A9s-qui-s%C3%A9questrent-leur-patron
L'article 224-1 du code pénal reconnaît quatre actions distinctes qui sont regroupées sous la même infraction: le fait d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer une personne. La détention et la séquestration d'une personne sont des comportements continus qui impliquent une privation de liberté d'une certaine durée. Il peut suffire de quelques minutes de privation de liberté pour que l'action soit considérée comme une séquestration. Retenir son patron dans son bureau et l'empêcher d'en sortir rentre clairement dans cette catégorie d'infraction.
«Le fait, sans ordre des autorités constituées et hors les cas prévus par la loi, d'arrêter, d'enlever, de détenir ou de séquestrer une personne, est puni de vingt ans de réclusion criminelle.» Mieux vaut ne pas retenir un patron trop longtemps. La peine de 20 ans est réduite à cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende si la victime est libérée avant le septième jour sans atteinte physique. Toute mutilation ou infirmité de la victime entraîne un alourdissement de la peine maximale à 30 ans. Dans les cas extrême de torture, d'acte de barbarie ou de mort de la victime, l'infraction devient même passible de la prison à perpétuité.
Enfin, il faut savoir que l'Etat n'a pas besoin d'attendre que la victime porte et plainte, et peut se porter partie civile pour engager des poursuites s'il le juge nécessaire. Le fait que la victime porte plainte oblige en revanche le lancement d'une instruction. Il suffirait que l'Elysée ou le gouvernement donnent l'ordre aux procureurs de la République dans chaque département de poursuivre dans tous les cas de séquestration de dirigeants d'entreprise ... Quand le feront-ils ?
(dernière nouvelle, autre tentative de séquestration des dirigeants du Crédit Agricole de la Réunion par des salariés qui demandent une augmentation de 300 euros ... séquestration avortée en raison de l'intervention des forces de l'ordre ...)
Réflexion quatre (7 avril 2009)
Les nouvelles formes de conflit sociaux dans les entreprises et l'arme de la séquestration des employeurs ...
Ségolène Royal cultive l'art d'intervenir sur des sujets qui liguent contre elle la majeure partie des hommes politiques de la majorité présidentielle. Après ses interventions en Guadeloupe sur les békés et avant la condamnation du 'merveilleux' discours de Dakar de Nicolas Sarkozy, elle expliquait comprendre, dans un entretien donné au Journal du dimanche du week-end dernier, les raisons qui poussaient des salariés d'entreprises confrontés à des plans de licenciement ou à des fermetures d'entreprises, laissés sans repères, sans espoir et avec l'impression de l'inutilité des autres formes de mobilisation plus traditionnelles. Tollé à l'UMP, soutien au Parti Socialiste et au Modem, tandis qu'Alain Krivine, ancien leader de la Ligue Communiste Révolutionnaire, au nom du NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste), estimait qu'elle n'allait pas suffisamment loin.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2009/04/06/l-arme-de-la-sequestration-de-patrons-fait-debat-parmi-les-politiques_1177477_823448.html
Les séquestrations de dirigeants par des salariés victimes de plans (ou de charettes) de licenciement, de fermetures d'entreprise se sont en effet multipliées ces dernières semaines ... Sony (article de Libération), Caterpillar (article de Libération), Continental ... hier encore le milliardaire Henri-François Pinault, bloqué et sequestré dans son taxi pendant une heure par des salariés de son groupe (article du Post) ... de même, hier encore, les présidents des universités de Rennes et d'Orléans ont également été séquestrés par des étudiants ... et aujourd'hui, c'est au tour des dirigeants de Scapa France, une entreprise de fabrication d'adhésifs industriels, d'être sequestrés par des salariés en colère (article du Monde) ... Où va-t-on ?
Quant aux français, ils sont relativement partagés sur cette question ; 45% des français sondés estiment la séquestration de dirigeants fondée et 50% jugent la méthode 'pas acceptable' (selon CSA) tandis que pour l'IFOP, 30% des Français approuvent les séquestrations de dirigeants et 63% les comprennent, sans les approuver, tandis qu'ils ne seraient que 7% à les condamner fermement.
http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/04/07/l-ambivalence-des-francais-face-aux-sequestrations-des-patrons_1177591_3224.html
Je suis pour ma part très ennuyé par ces formes, pourtant pas très nouvelles, de mobilisation syndicale, qui montrent une radicalisation des méthodes employées, comme l'exemple guadeloupéen l'avait déjà montré, dans un contexte social et syndical certes particulier. Les séquestrations de dirigeants ou de cadres reposent d'abord forcément sur la contrainte physique, et imposent aux dirigeants d'accepter la contrainte, l'enfermement, sous la menace de l'usage de la violence physique par un groupe. Je pense que ce qu'il y a de pire dans ces méthodes, c'est l'impossibilité pour les dirigeants concernés de pouvoir obtenir justice des coups qu'ils ont pu recevoir dans ces moments-là, de la violence (ou de la menace de violence) subie, puisque les organisations syndicales imposent ensuite aux signataires patronaux une renonciation pour toute poursuite pour faits de grève commis au cours du mouvement de grève ... Protéger des salariés qui ont pu s'exposer à quelques débordements ou quelques atteintes à des matériels de production ne me paraît pas choquant ! Protéger des salariés proférant des injures racistes ou divulgant des informations confidentiels dans la presse, ou empoisonnant des cours d'eau (forme de terrorisme environnemental) me paraît extrêmement limite ! Protéger des salariés coupables d'actes de violence à l'encontre des patrons ou de cadres, me semble inacceptable ...
Cela participe à un extrêmisme syndical en train de se développer, sur lequel surfe un parti comme le NPA d'Olivier Besancenot ... Nicolas Sarkozy parle d'état de droit ... Je pense aussi simplement au fait que ces personnes pourraient être l'un d'entre nous, pourraient être moi ... Et conformément à un célèbre précepte biblique ... Ne pas faire aux autres ce que l'on aimerait pas qu'on nous fasse ... Je peux comprendre la rage de ses salariés ... Je vois aussi cette envie de faire comme les autres, la disparition des normes et des règles, du respect de la personne des autres ... Je vois surtout le débordement des actions syndicales par quelques individus extrêmistes, qui forcent ensuite le groupe à demeurer solidaire de ces actions ... Et malgré le fait qu'on puisse comprendre, il faut des sanctions judiciaires exemplaires à l'encontre de tous les salariés ayant participé à ces séquestrations, pour servir d'exemple, pour rappeler l'existence de lois et de règles, pour ramener l'action syndicale dans la légalité. Car l'action syndicale, ce n'est pas uniquement l'usage de la force brute et des biceps, ni du terrorisme social ...
Réflexion trois (26 février 2009)
Trop de mouvements sociaux tuent-ils les mouvements sociaux ?...
Grève générale en Guadeloupe et en Martinique contre la vie chère et la politique gouvernementale ... Paralysie des universités françaises, bloquées par les étudiants et par les enseignants chercheurs ... Mot d'ordre de grève générale pour le 5 mars à la Réunion, dans une sorte de surenchère électoraliste ... Si les guadeloupéens sont capables de bloquer leur économie, pourquoi pas nous !... Grève générale et climat insurrectionnel à Madagascar, où les partisans d'Andry Rajoelina affrontent le gouvernement et la présidence malgache pour le renverser ... parmi d'autres conflits sociaux moins médiatisés.
Mais à la longue, on se trouve face à des mouvements sociaux qui pourrissent lentement, dans les revendications et dans l'attention qui leur est porté par les médias nationaux ... Le jeu des gouvernements ... les laisser s'essouffler et se dégonfler lentement ... Mais parfois, on assiste à une convergence de ces divers mouvements sociaux ... Ce que fut mai 68 ...
L'attention des médias est forcément limitée, limitative ... Peut-on envisager un journal de 20 heures consacré à une ribambelle de conflits sociaux ? Sauf à donner l'impression d'un pays au bord de l'explosion sociale, les journaux télévisés ne pourront se référer qu'à un ou deux 'beaux' conflits sociaux ; la Guadeloupe ayant pris l'ascendant sur les autres couvertures de ce genre d'évènements ... Quelques bavures judicieusement placées peuvent permettre par ailleurs de relancer ou maintenir l'attention médiatique, comme en Guadeloupe avec la mort d'un syndicaliste tué par de jeunes casseurs, en la mort de Malik Oussekine en octobre 1986 lors des manifestations contre la loi Devaquet ... L'objectif du gouvernement étant justement d'éviter de tels drames pour que les mouvements de contestation s'essoufflent rapidement ... en quelque sorte la leçon que le pouvoir politique a conservé d'octobre 1986 où la répression d'une manifestation bon enfant à Paris par les forces de l'ordre avait retourné l'opinion publique contre le gouvernement de Jacques Chirac et entraîné le retrait de la loi Devaquet ...
J'avais vécu en province le retour des trains de manifestants montés la veille sur Paris ... le retour de nos collègues dans l'un des amphithéatres occupé par la coordination étudiante, l'indignation ressentie devant les témoignages du déferlement de violence subie et gratuite ... l'incompréhension de la raison de cette violence, et la haine vis-à-vis d'un gouvernement qui n'avait pas hésité à lancer les militaires (les gendarmes mobiles) contre sa jeunesse, pour casser du jeune et du bougnoule ... Il m'arrive parfois de me demander pourquoi je supporte difficilement les partis de droite et leurs idées, mais comment oublier cette rage ... Un tel sentiment d'impuissance et d'injustice ... Vouloir marquer le monde et en avoir en même temps peur ... C'est une expérience particulière à conduire ... et je comprends tous ces jeunes étudiants qui sont lancés dans cette expérience, dans ce combat contre un projet gouvernemental considéré comme inique et injuste ...
Mais le maintien inchangé du système universitaire français et de la place laissé aux jeunes dans la vie active est-il véritablement meilleur et plus juste ? Les jeunes ont-ils une chance égale dans l'accès au monde du travail, dans l'accès à la fonction publique, dans l'accès à l'enseignement et à la recherche ? Le monde de l'enseignement et de la recherche en France est-il juste, égalitaire et sans problème ... Ceux qui enseignent et y font de la recherche sont-ils à leur place et sont-ils bons ?
Réflexion deux (24 février 2009)
Les jeunes ...
Ce fut l'un de mes premiers textes écrits sur mon blog (si ce n'est le premier). En réaction aux manifestations des jeunes étudiants et lycéens contre le Contrat Première Embauche, et à la manipulation dont ils faisaient selon moi l'objet. En ce mois de février 2009 où un nouveau vent de fronde souffle sur les campus universitaires, à l'encontre cette fois-ci de la loi Pécresse, je ne peux qu'inciter chacun à me relire ...
Certes, le parti socialiste n'a pas gagné les élections présidentielles qui ont suivi, en mai 2007, en raison notamment du rôle joué par Nicolas Sarkozy dans la sortie de cette crise (et pour d'autres raisons évidemment liées à la personnalité de son adversaire au second tour ou à la complaisance des médias) ...
Certes, le CPE n'est pas entré en application. Mais les jeunes étudiants sortis ensuite sur le marché du travail ont-ils trouvé et trouvent-il depuis plus facilement du travail, lorsque l'on voit notamment les conséquences de la crise financière et économique actuelle sur les perspectives d'emploi du pays et plus largement du monde ?
Les jeunes sont-ils désormais mieux représentés dans les organisations syndicales et dans les partis politiques ? Quelques quarantenaires prennent certes le pouvoir au parti socialiste, et quelques uns (ou quelques unes), issu(e)s de la diversité, se sont vus offrir des postes au gouvernement ... Mais à part cela ... Les jeunes ne cesseront de se battre contre tout projet du gouvernement, et seront manipulés par quelques organisations révolutionnaires étudiantes, et récupérés par quelques organisations syndicales ou politiques ...
Cela forme la jeunesse ... Une sorte de rite de passage à l'âge adulte. Il en faut bien ! Un sentiment d'appartenance à un groupe, dans l'espoir de réussir une nouvelle fois mai 68, et de réussir cette fois-ci à renverser la société, cette société que les vieux ne veulent plus voir remise en cause ...
Réflexion une (11 avril 2006)
CPE ... entre ignorance et manipulation
J’ai été jeune.
J’ai été manipulé.
J’ai souhaité réformer la société.
Je me suis senti incompris par mon père.
Et à la fin aussi, on a gagné contre Devaquet.
Mais presque aucun d’entre nous n’avait lu le texte de loi que nous combattions. Nous n’en connaissions que quelques idées. Non aux facs privées. Et aujourd’hui, c’est non à la précarité.
Le problème de ce combat contre le CPE, c’est que les jeunes n’ont pas compris qu’avec ou sans CPE, leur accès au marché du travail se fera sous le signe de la précarité, même pour ceux qui auront la chance de se voir proposer un CDI. Les employeurs selon leur bon vouloir peuvent à tout moment licencier un salarié, parfois en le poussant à la faute ou en lui en inventant.
Cette précarité aurait-elle été pire avec le CPE ? Vraisemblablement.
Mais pourquoi cette révolte ? Depuis quand un gouvernement doit-il demander l’autorisation d’organisations étudiantes ou de syndicats de salariés avant de proposer un texte de loi.
Récupération politique. Les syndicats se battent pour s’offrir ou défendre une image de contestataires auprès des jeunes et des salariés. Façon de dire : on est prêt à refuser le dialogue avec le gouvernement lorsque l’on estime que la ligne rouge est franchie !
Mais les jeunes dans tout ça ; les syndicats n’en ont pas grand chose à faire. Un jeune travailleur n’intéresse pas beaucoup les syndicats. Ceux-ci se méfient des jeunes, de manière bien pire que les patrons qu’ils combattent soi-disant. Comment faire confiance à un jeune pour occuper un poste syndical important. Il faut qu’il est prouver sa valeur, son engagement syndical.
Les manifestations contre le CPE étaient-elles autre chose que de la manipulation ? Evidemment, la lutte des syndicats contre la précarité est une réalité, un vieux combat. Mais leur combat, c’est surtout d’empêcher la transformation des postes existants en postes précaires. C’est la sauvegarde de l’emploi existant, fusse aux dépends des nouvelles embauches. Le travail précaire existe aux marges des organisations syndicales, mais il ne les intéresse pas. Ils ne combattent pas les précaires, évidemment, mais uniquement les patrons qui veulent y recourir. Et les précaires sont ignorés la majeure partie du temps dans les entreprises lorsque leur présence est indispensable (remplacement de congés maternité, congés maladie ...).
Quant aux partis politiques, il faut séparer les groupes révolutionnaires, immédiatement prêts à se rallier à ce genre de mouvements, du parti socialiste, qui se donne une petite cure de contestation pour devenir plus présidentiable.
La crise du politique, c’est de voir des députés ne plus croire en le travail parlementaire et préférer descendre dans la rue pour manifester contre un projet de loi. Aller dans la rue, c’est ne plus croire en la politique.
Au fait, est-ce que le parti socialiste accorde une place aux jeunes dans la représentation nationale ? Combien de députés socialistes ont entre vingt et vingt-cinq ans ? Combien simplement ont moins de quarante ans ? Une infime minorité. La représentation nationale, les élus municipaux sont la chasse gardée de notables mâles ayant entre 45 et 65 ans et de race blanche.
Alors n’y a-t-il pas manipulation à tenter de récupérer la contestation normale, éruptive des jeunes, et de jouer au matador en donnant des ordres au gouvernement pour l’exhorter à écouter la rue et à obéir à quelques millions de personnes.
.... Cette jeunesse aussi oubliera sa révolte.
Le plus grand nombre reprendra les cours.
Ils conserveront leurs exploits en mémoire et ceux qui sont tombés.
Nous n’avons jamais oublié la mort de Malik Oussekine, un jour d’octobre 1986 à Paris.
Ils revoteront un jour pour la droite, dans de très nombreuses années.
Ils essaieront de trouver un job.
Ils devront obéir aux ordres de leurs chefs.
Ils seront peut-être précaires, même sans CPE ...
Une nouvelle fois, un nouveau gouvernement, peut-être de gauche, inventera de nouveau un contrat pour les jeunes, comme les emplois jeunes à une époque. Et peut-être, si c’est la gauche qui sera au pouvoir, personne ne bougera, comme pour les emplois jeunes (travail non précaire, mais travail sans avenir).
Ou peut-être que les jeunes de cette époque sortiront de nouveau manifester contre ce nouveau contrat, mais seuls si c’est la gauche au pouvoir.
C’est cela la vie, mais c’est réconfortant d’être jeune, de savoir que l’on a été jeune.
La politique tout comme le syndicalisme sont sans pitié. Et seuls ceux qui aspirent au pouvoir pour le pouvoir, prêt à tuer tout le monde pour arriver au sommet, y réussissent. Ce sont souvent les pires qui y arrivent. Ceux avec lesquels nuls ne voudraient être amis, s’ils n’avaient autant de pouvoir.
Saucratès
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