Critiques de notre temps

Critiques de notre temps

L'affaire Arche de Zoé (1)

Réflexion quatorze (14 septembre 2010)
Les membres de l'association humanitaire Arche de Zoé renvoyés devant la justice française


Vous rappelez-vous de l'affaire dite de l'Arche de Zoé ? En octobre 2007, les membres d'une association humanitaire française sont soupçonnés d'avoir voulu exfiltrer des enfants tchadiens. Arrêtés avec les membres de l'équipage de l'avion qui devait les faire sortir du Tchad, les membres de l'Arche de Zoé seront finalement condamnés, très rapidement (le procès débute le 22 décembre 2007, après à peine deux mois d'enquête, et la peine est prononcée le 28 décembre 2007) et d'une manière que l'on peut qualifier d'expéditive. Huit années de travaux forcés ... Mais la rapidité du procès a également un avantage pour les six français poursuivis et condamnés : ils ne resteront que trois mois en prison, alors qu'une attente de quelques années aurait pu être terrible en milieu carcéral tchadien.
http://www.lemonde.fr/societe/article/2010/09/14/renvoi-devant-le-tribunal-requis-contre-les-membres-de-l-arche-de-zoe_1411180_3224.html

La France avait ouvert en même temps une enquête judiciaire sur les mêmes faits ; enquête qui vient donc d'aboutir par le renvoi devant le tribunal correctionnel des membres de l'association, trois ans après les faits. Condamnés le 28 décembre 2007 par la justice tchadienne, les six humanitaires français seront immédiatement transférés en France, le 30 décembre 2007, et leurs peines de travaux forcés commuées en une peine d'emprisonnement. Ils seront finalement graciés par le président tchadien Idriss Deby Itno le 31 mars 2008 (de sa propre initiative).

Dans cette affaire, on a l'impression désagréable que l'on a voulu laisser croire que la justice tchadienne pouvait se prononcer de manière totalement indépendante, mais dans un délai qui était imposé par le pouvoir français. Décision prise dans un délai extrêmement court ... avec cette idée que quelque soit la peine qui pourrait être prononcée, de toute façon, les peines seraient effectuées en France, et la sentence annulée par une grâce présidentielle tchadienne ... Même si la justice tchadienne s'est prononcée dans cette affaire, les humanitaires français n'ont pas effectué les peines prononcés, et cela était envisagé depuis le début de cette affaire.

Pour rappel, d'autres personnes avaient été impliqués dans cette affaire : un Soudanais, Souleïmane Ibrahim Adam, qui a servi d'intermédiaire dans la région tchadienne d'Adré, condamné et non gracié (qu'est-il devenu ?) ; trois tchadiens également renvoyés en 2007 devant le tribunal tchadien ; trois journalistes français, les sept membres de l'équipage espagnol, le pilote belge et le sous-préfet de Tiné avaient par contre bénéficié d'un non-lieu en décembre 2007. 

Enfin, pour rappel, quelques informations sur les membres de l'association humanitaire Arche de Zoé, renvoyés aujourd'hui auprès du tribunal correctionnel pour y être jugés :

- Eric Breteau, 37 ans (en 2007), est le fondateur et chef de file de L'Arche de Zoé. Pompier volontaire à Argenteuil (Val-d'Oise), il créa une première association au lendemain du tsunami de décembre 2004 en Asie. Charismatique et déterminé, selon ceux qui l'ont approché, "c'est un humanitaire pur, un homme qui n'a jamais pu rester passif quand il voit la misère et la souffrance autour de lui, il n'a pas d'autre motivation", expliquait son ex-épouse Agnès Breteau. "J'ai tout de suite vu que c'était un fonceur, qu'il irait jusqu'au bout", a confié au Monde, samedi, Dominique Gladin, médecin urgentiste à l'hôpital d'Argenteuil, rentré du Tchad deux jours avant l'arrestation de ses collègues. 

- Emilie Lelouch, 31 ans (en 2007), artiste de cirque et ambulancière, est la compagne d'Eric Breteau, rencontré en Indonésie après le tsunami. Partageant ses convictions, elle est un élément clé de l'affaire. "Tous les gamins transitaient par elle, témoigne Dominique Gladin. Elle était en contact direct avec les tribus et les responsables des camps qui lui amenaient des enfants. Elle constituait un petit dossier pour chacun, avec son nom, le nom de l'adulte qui l'avait amené, sa situation familiale, son village d'origine, etc. Ce sont des documents précieux. J'espère qu'ils referont surface. Ils permettront d'éclaircir beaucoup de choses."Ses parents la défendent bec et ongles : "elle n'a pas à demander pardon, elle n'a écouté que son cœur."

- Alain Péligat, 56 ans (en 2007), logisticien de L'Arche de Zoé, est un ancien légionnaire, aujourd'hui formateur de chauffeurs routiers dans un lycée professionnel de Châlons-en-Champagne (Marne). "Papy" est unanimement apprécié de ses élèves, qui se sont mobilisés au côté de son épouse Christine. Les Péligat forment une famille recomposée de six enfants, dont trois filles (3, 6 et 11 ans) adoptées au Vietnam. "On ne peut pas nous dire que nous étions en mal d'enfants...", dit Christine Péligat.

- Philippe Van Winkerberg, 48 ans (en 2007), médecin à Castellane (Alpes de Haute Provence), était un des soignants de l'équipe.

Les juges français ont également renvoyé devant la justice française pour complicité d'aide au séjour irrégulier de mineurs étrangers un autre membre de l'association, Philippe Letien, ainsi qu'une journaliste de France 3, Agnès Pelleran, qui faisait partie des trois journalistes arrêtés au Tchad et qui avaient fait l'objet d'un non lieu.

Deux membres de l'association ne sont pas renvoyés devant la justice française. Contrairement aux autres, ils n'étaient pas inculpés mais entendus en tant que témoins assistés dans la procédure :

- Nadia Merimi, infirmière, la benjamine de l'équipe, originaire de la Cité du Pont de Sèvres à Boulogne Billancourt (Hauts-de-Seine), une autre soignante de l'équipe, qui aurait ouvertement manifesté ses doutes quant à l'opération d'évacuation des enfants.

- Dominique Aubry, 50 ans (en 2007), est lui-aussi sapeur-pompier volontaire, à Saint-Laurent-de-La-Cabrerisse et à Narbonne (Aude). Célibataire, sans enfants, ce retraité de l'Armée de l'air a rencontré Eric Breteau lors d'une mission organisée en Asie par Pompiers sans frontières après le tsunami. Il avait informé du projet Tchad Daniel Esparza, le maire de Saint-Laurent, et des habitants du village. "Mon oncle s'est fait berner par les organisateurs", a affirmé à plusieurs médias une nièce de Dominique Aubry.


Réflexion treize (31 mars 2008)
Terminé ?... Les six humanitaires français sont graciés !


Les six humanitaires français de L'Arche de Zoé, ainsi qu'un intermédiaire tchadien, Mahamat Dagot, ont été graciés lundi 31 mars 2008 par le président tchadien Idriss Deby Itno, selon deux décrets publiés à N'Djamena. Dernière personne condamnée dans cette affaire, Souleïmane Ibrahim Adam, un Soudanais qui a servi d'intermédiaire dans la région tchadienne d'Adré, n'a pas été gracié car il n'en aurait pas fait la demande.

Quelles tractations et quelles menaces sont à l'origine de cette procédure de grâce ? En effet, à peine sauvé, avec le soutien militaire de la France, d'une attaque rebelle qui a failli le renverser les 2 et 3 février, le chef de l'Etat tchadien s'était dit "prêt à pardonner" aux six condamnés français.

Le dernier espoir pour la justice dans cette affaire nullissisme repose-t-elle sur la justice française, qui a ouvert une enquête pour aide au séjour irrégulier de mineurs étrangers en France, dans laquelle Eric Breteau, sa compagne et assistante Emilie Lelouch, le médecin Philippe van Winkelberg et le logisticien Alain Péligat sont déjà inculpés, tandis que l'infirmière Nadia Merimi et l'autre logisticien, Dominique Aubry, sont entendus en tant que témoins assistés.

Sauf si Nicolas Sarkozy montre le même acharnement à protéger ses six personnes et à mettre fin à cette enquête qu'il en a mis à les faire libérer. Pour quelle raison ?


Réflexion douze (10 février 2008)
Grâce présidentielle tchadienne ?


On s'acheminerait vers une grâce présidentielle prononcée par le président tchadien. Cette grâce lui a-t-elle été arrachée par le gouvernement français en échange d'une aide militaire lors de l'insurrection des rebelles, à l'époque où il était retranché dans son palais présidentiel ?

L'effet de cette grâce présidentielle tchadienne aurait un effet négatif sur la prise de conscience des humanitaires de la nécessité d'intervenir de manière légale dans les pays africains et dans les pays en voie de développement. Eric Breteau et ses disciples auraient ainsi tout loisir de clâmer leur innocence. Quel message pour les parents des enfants enlevés, pour ces enfants enlevés une fois qu'ils seront devenus adultes, pour les familles qui croyaient pouvoir adopter (ou recueillir) un enfant ? En espérant que la grâce présidentielle tchadienne ne dispensera pas ces humanitaires d'indemniser les familles et les enfants tchadiens.

D'une certaine façon, heureusement que la justice française s'est également saisie de cette affaire et il est à espérer qu'elle pourra continuer à instruire cette affaire à l'abri des pressions militaires et politiques (du moins c'est à espérer) pour que toute la lumière soit faite sur cette histoire. Verdict peut-être dans quelques années.


Réflexion onze (20 janvier 2008)
Où en est-on dans cette histoire des humanitaires français ?


Dimanche 20 janvier 2008 ... On reste toujours dans l'attente du jugement du tribunal correctionnel de Créteil, qui après s'être réuni le lundi 14 janvier 2008 et avoir entendu les avocats des six accusés, rendra son jugement le 28 janvier 2008. Le ministère public a requis la stricte application du jugement tchadien en droit français, soit huit années d'emprisonnement.

Que sait-on de plus sur cette histoire aujourd'hui ? On sait désormais que l'association Arche de Zoé savait pertinemment que les enfants qui lui étaient confiés étaient bien tchadiens, et que certains membres de l'association ont fait pression sur les mères pour qu'elles leur laissent leurs enfants. Et chose encore plus grave, les deux dirigeants de l'association choisissaient les enfants qui leur étaient confiés en fonction de leur âge, pour qu'ils soient facilement adoptables, en contrôlant leur dentition, comme les anciens esclavagistes au temps de l'esclavage, comme avec les bestiaux ...

Ce qui n'a pas empêché Eric Breteau et sa compagne, au nom de l'Arche de Zoé, d'argumenter sur le fait qu'ils avaient été trompés par des intermédiaires tchadiens, qu'ils ne savaient pas, qu'ils ignoraient qu'il s'agissait d'enfants tchadiens ... Et ils n'ont pas hésité, jusqu'à la fin du procès, de contester l'existence des parents de ces enfants, de ces pères et de ces mères ... Et si les mères tchadiennes étaient aussi de bonnes mères, aimant leurs enfants, manipulées par des humanitaires français experts en manipulation et en culpabilisation ...


Réflexion dix (30 décembre 2007)
Les humanitaires français de l'Arche de Zoé sont arrivés en France


Et eux-mêmes et leurs familles se mobilisent déjà pour qu'ils échappent à la peine de prison à laquelle ils ont été condamnés ... Lire à ce sujet les deux derniers articles du Monde à ce sujet ...
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-994430,0.html
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3224,36-994594@51-963882,0.html

Ils ont donc échappé aux travaux forcés qui les attendaient au Tchad ... et ils s'en sortent plutôt "bien" avec une peine d'emprisonnement de seulement huit ans (ils encouraient vingt années de travaux forcés) ... huit ans pour avoir voulu jouer aux Zorros de l'humanitaire et faire "adopter" quelques centaines d'enfants par des familles françaises ... (je sais, l'adoption n'était pas prévue ... mais comme ses enfants ne seraient jamais revenus ni au Tchad ni au Darfour ... ils auraient finalement été forcément adoptés par les familles qui les auraient accueillis ... mais ce n'était évidemment pas l'objectif ...).

Et ils vont presque certainement échapper également à la prison en France ... ils vont tout faire ... Heureusement tout de même qu'ils n'ont pas été graciés dès leur arrivée, et qu'ils ont été effectivement incarcérés à Fresnes à leur descente d'avion ... Le contraire aurait été un camouflet adressé à l'état, à la justice et aux victimes tchadiens ... Et cela aurait mis en péril tout prochain transfèrement de prisonniers entre le Tchad et la France ...

Mais comment ces six humanitaires français pourraient-ils passer huit années de prison en France, alors que leurs associés, les autres dirigeants de cette association, les autres humanitaires qui ont travaillé au Tchad pour eux (mais qui étaient partis juste avant leur arrestation), n'ont jamais été inquiétés et ne sont ni poursuivis, ni condamnés ? Quelle est cette justice internationale à deux vitesses ? Comment des actes délictueux peuvent-ils être punis par une peine de travaux forcés de huit ans au Tchad et être considérés comme normaux en France ?

On peut donc enlever des enfants de leur pays d'origine en France et les faire adopter ailleurs sans risquer aucune peine d'emprisonnement ? Dois-je avoir peur de déposer mes enfants à l'école ou en crêche en France, dans la crainte de les voir être enlevés pour être adoptés au Tchad ou au Japon ?

Ou bien les actions de l'Arche de Zoé ne sont-elles pas encore condamnées par la justice française parce que ces actes ne concernaient que des enfants noirs ... et les mêmes actes sur des enfants blancs seraient-ils par contre plus vigoureusement punis ?... La longueur des procédures judiciaires françaises pose en tout cas un véritable problème ... N'est-on pas capable de juger et de traiter rapidement une telle affaire, comme le Tchad l'a fait ?


Réflexion neuf (26 décembre 2007)
Huit ans de travaux forcés pour les six humanitaires français au Tchad


Les six membres de l'association Arche de Zoé ont finalement été jugés coupables d'enlèvement d'enfants par la Cour criminelle de N'Djaména au Tchad ... Une peine de huit années de travaux forcés pour une aventure rocambolesque ... Les victimes tchadiennes auront au moins eu leur procès.

Même si jamais une justice ne fut aussi expéditive ... A peine deux mois d'écouler depuis que cette affaire a éclaté ... Deux mois pour l'instruction et pour la tenue d'un procès ... La justice française devrait en prendre bonne note ...

La justice tchadienne a donc fait son devoir ... Il me restera néanmoins une impression de honte vis-à-vis du comportement du pouvoir politique français à l'égard de l'indépendance et de la souveraineté nationale du Tchad :

1. Manifestement, tout a été fait, à la demande du gouvernement ou de la présidence française, pour que ce procès ait lieu dans les plus brefs délais, pour que ces six français passent le moins de temps possible en prison au Tchad

2. Il est honteux que l'on sache déjà que ces six français devraient être rapatriés dans les tous prochains jours en France. Je reste intimement convaincu que c'est au Tchad qu'ils devraient purger leur peine de travaux forcés.

3. Il serait inconcevable qu'après leur éventuel rapatriement en France, ces personnes puissent être graciés par le gouvernement français (ou par le Président de la République) et qu'il ne purgent pas la totalité de leur peine dans une prison française. Et pourtant, j'ai l'intime conviction qu'ils n'iront pas en prison s'ils sont rapatriés en France ... Ce qui serait une honte ...

Accessoirement, deux intermédiaires de l'association Arche de Zoé ont été condamnés à quatre ans de prison et deux autres ont été acquittés. Le rapatriement des deux autres condamnés (pour échapper aux geôles tchadiennes) sera-t-il également demandé par le gouvernement français ...

Et est-ce l'avion du milliardiaire Vincent Bolloré qu'utilise Nicolas Sarkozy qui doit récupérer les six français de l'Arche de Zoé ?... pour un voyage qui ne se fera certainement pas à fond de cale ... mais plutôt à la manière de VIP en salon tout confort ... Honte de la diplomatie française ? Ou honte de Nicolas Sarkozy et du cynisme de personnes tel Eric Breteau ?


Réflexion huit (25 décembre 2007)
Derniers jours du procès des français au Tchad


Mercredi 26 décembre 2007 sera prononcé le verdict du procès des humanitaires de l'Arche à Zoé ... Dernières journées de procès éprouvantes pour des français traités de 'voleurs d'enfants' par les parties civiles ... Et défense difficile lorsque les avocats des français réclament des preuves de maternité ou de paternité ... des tests ADN ... pour contester les témoignages des parents des enfants qu'ils voulaient enlever et dont ils pensent ou pensaient qu'ils étaient orphelins ...

A un de leurs défenseurs qui disait ... "il ne me semble pas avoir vu les actes de naissance des enfants" ... l'avocat général (Beassoum Ben-Ngassoro) répliquait ... "je suis surpris de tant de légalisme quand on sait que les enfants ont failli sortir du territoire sans aucun papier" ...

Quelle décision demain ... 15 ans de travaux forcés ? Et combien de jours avant que ces humanitaires français ne soient récupérés et extradés vers la France par notre super-président de la République (avec un avion de son ami milliardiaire) pour y purger leur peine (ou y être graciés) et rembourser leur dette qui risquera d'être élevée ... 109,1 millions d'euros soit 70,9 milliards de francs CFA ...


Réflexion sept (22 décembre 2007)
Le procès des français démarre au Tchad


Le procès de l'Arche de Zoé s'est ouvert vendredi 21 décembre 2007 au Tchad. On peut douter que les six français poursuivis puissent bénéficier d'un procès parfaitement équitable. Poussée par l'opinion publique tchadienne, on peut craindre que la justice tchadienne n'est déjà condamnée les six français et leurs intermédiaires locaux. Ils échapperont difficilement à une peine de plus de dix ans de travaux forcés. Est-ce insupportable ? En France, ils n'auraient pas été poursuivis et cela aurait été tout aussi inacceptable, sauf évidemment pour ces personnes qui croient être totalement inoccentes.

Car ce qui ne sera pas jugé dans ce procès au Tchad, c'est le procès de l'adoption internationale, c'est le fait d'arracher des enfants à leur vie, à leur entourage, pour les faire adopter en France (même s'il n'en était pas question, évidemment). Car ce qui correspond parfois à un besoin d'enfants pour certains, conduit aussi, d'une autre manière, à une impression de suprématie de la vie occidentale aux yeux de ces personnes qui se disent humanitaires ...

Evidemment, tous les parents qui adoptent des enfants à l'étranger (parce qu'ils n'arrivent pas à adopter en France) croient leur apporter une vie meilleure. Pour reprendre un cas flagrant approchant d'adoptions humanitaires, il faut revenir à l'affaire des enfants réunionnais déportée dans la Creuse. Derrière l'affaire politico-judiciaire, l'idée était la même : sortir des enfants de la misère et leur apporter la civilisation française et l'éducation ... à des enfants même pas orphelins (non plus) mais placés le plus souvent à la DASS. Ce qui les attendit dans le département de la Creuse, ce ne fut pas l'éducation et l'amour de familles françaises aimantes (on était dans les années 1960-1968) mais le travail d'ouvriers agricoles dans des fermes de la Creuse, pour des enfants mineurs. Affligeant pour un pays qui a signé les conventions internationales qui protègent normalement les enfants du travail forcé ! Mais bon, c'était des petits réunionnais, même pas blancs ... Peut-être que la France estimait à cette époque que seuls les enfants blancs étaient concernés par ces conventions !

Ces enfants seraient restés à la Réunion, auraient-ils vécu une vie pire ? Absolument pas, car les personnes de leur âge dans ce département français ont une vie certainement plus agréable qu'elle ne l'est dans un département comme la Creuse ou dans l'ensemble de la France métropolitaine. Ils auraient également eu un métier (ou bénéficié du RMI) et se seraient mariés.

Et si c'était pareil dans le cadre de l'adoption internationale ! Si la vie que ces familles désireuses d'enfants (égoïstement) pouvaient proposer à ces enfants (tchadiens par exemple) n'était pas meilleure que celle que ces enfants pourraient avoir dans leur propre pays, dans leur propre culture, dans leur propre famille ?

Si c'est le cas (et cela l'est certainement), l'envie de quelques humanitaires qui veulent fasciner et qui veulent que l'on parle d'eux, qui veulent faire quelque chose, n'importe quoi, même s'ils n'ont aucune qualification utile aux véritables ONG (raison pour laquelle certains montent des ONG telle Children Rescue), et l'envie d'enfants de quelques familles qui trouvent la possibilité de contourner les obligations légales d'adoption (en imaginant qu'aucun pervers ni esclavagiste n'avait fleuré dans cette histoire le bon plan pour satisfaire leur goût douteux), méritaient-elles l'exil de cette centaine d'enfants ?

L'exil d'enfants étrangers dans le cadre de l'adoption internationale n'est-il pas plus largement un crime, que ce soit depuis le Tchad, le Darfour, Madagascar ou le Vietnam ?


Réflexion six (10 décembre 2007)
L'affaire Arche de Zoé ... deux semaines plus tard ?


Quelques semaines après le début de ce qu'il faut bien appeler l'affaire 'Arche de Zoé' et les rodomontades du président Nicolas Sarkozy pour faire libérer les 'humanitaires' français emprisonnés au Tchad, il faut bien reconnaître l'essoufflement de la couverture médiatique de cette histoire, qui ne fait plus recette.

Le juge tchadien chargé de l'instruction du dossier a renvoyé devant la cour criminelle tchadienne les six français poursuivis par la justice tchadienne, ainsi que trois tchadiens et un soudanais. Les douze autres personnes inculpés (les trois journalistes français, les sept membres de l'équipage espagnol, le pilote belge et le sous-préfet de Tiné) dans cette affaire bénéficie par contre d'un non-lieu. Les accusés risquent désormais une peine de cinq à vingt ans de travaux forcés.

Les six humanitaires français auraient commencé, samedi, une grève de la faim, seule arme qui leur reste en raison de l'essoufflement de la mobilisation des autorités françaises pour les faire libérer pour les juger en France ... Mais sur quelle base une telle libération pourrait-elle avoir lieu sans violer les accords internationaux signés par la France, ce qui arrange bien celle-ci lorsqu'il s'agit de poursuivre des criminels réfugiés dans les pays africains.

Pour ceux que cela intéresse, ci-dessous la lettre envoyée par le président de l'association Arche de Zoé depuis sa prison tchadienne pour expliquer l'action de son association.
http://www.france-info.com/IMG/pdf/Lettre_Eric_Breteau.pdf


Réflexion cinq (27 novembre 2007)
Que viennent faire Nicolas, Cécilia et François Sarkozy dans l'affaire Arche de Zoé ?


Pour quelles raisons Nicolas Sarkozy s'est-il précipité au Tchad pour tenter de rapatrier les européens emprisonnés dans le cadre de la procédure judiciaire engagée contre l'Arche de Zoé pour enlèvement d'enfants ? Pourquoi un tel empressement ?

Comme de nombreux français, je n'y ai d'abord vu qu'une agitation médiatique, à l'image de l'activisme que véhicule notre Président de la République, conforme à l'ambition qu'on lui connaît de vouloir apparaître comme un sauveur. Mais si les raisons de son activisme étaient autres, pour cette fois ? Si sa volonté de voir juger en France les membres de l'association Arche de Zoé, au mépris de tous les accords internationaux signés par la France, au mépris de l'indépendance des autorités politiques et judiciaires tchadiennes, s'expliquait au contraire par une volonté d'étouffer cette affaire, pour cacher certaines implications. Il a été dit par des proches des français incarcérés au Tchad que l'association Arche de Zoé leur aurait menti en les assurant du parainage de Cécilia Sarkozy pour cette opération.

Vous trouverez ci-après un lien vers le site de l'association 'voltairenet.org' qui présente une théorie impliquant un organisme semi-public français, 'Paris Biotech Santé', dont l'objet est de soutenir des projets de création d’entreprises dans le domaine du médicament, des dispositifs médicaux et des services aux malades.
http://www.voltairenet.org/article152777.html

Cet organisme semi-public conteste cette présentation et nie toute relation avec l'association Arche de Zoé, même si, selon 'voltairenet.org', le contact légal de cette association aurait été salarié de Paris Biotech Santé et domicilié à Paris Biotech Santé. Par ailleurs, 'voltairenet.org' ferait état de liens entre l'association Arche de Zoé, une association australienne ressemblante (Zoe’s Ark Foundation Inc.) et la société Paris Biotech Santé. Le nom de François Sarközy, frère cadet de Nicolas Sarkozy, apparaît à cette occasion en tant que membre du comité d'évaluation de Paris Biotech Santé.

Voir ci-dessous droit de réponse de Paris Biotech Santé :
http://www.voltairenet.org/article152874.html

et le site de Paris Biotech Santé :
http://www.parisbiotech.org/pbs6/

Et pendant ce temps-là, la guerre continue au Tchad, où des combats violents faisant plusieurs centaines de morts ont eu lieu près de la ville d'Abéché (où intervenait l'association Arche de Zoé), à une centaine de kilomètres à l'est de cette ville, entre les localités d'Abou Goulem et d'Am-Zoer. Cette accrochage militaire a vu s'opposer les forces gouvernementales aux rebelles de l'UFDD.


Réflexion quatre (20 novembre 2007)
L'affaire Arche de Zoé et le droit à l'adoption internationale


Avec l'affaire 'Arche de Zoé', on ne peut éviter d'ouvrir le débat du droit de l'adoption internationale. En effet, même si cette association ne promettait pas l'adoption des enfants qu'elle envisageait de faire venir en France en les 'sauvant' de leur misère au Darfour (ou au Tchad), il ne peut être nié que certains parents (mais pas tous) aient vu dans cette opération une possibilité d'adopter un enfant.

Le désir d'adopter n'est évidemment pas blâmable. C'est une réponse au besoin d'enfant lorsque celui-ci ne peut être traité à l'aide de la médecine. C'est aussi une démarche généreuse qui engage un couple pour la vie. Mais il faut aussi s'interroger sur l'existence d'un droit de l'adoption. Un droit pour qui. Pour l'enfant à adopter ou pour l'adulte souhaitant adopter ?

L'adoption (nationale ou internationale) nécessite avant tout le respect de l'histoire de l'enfant, de son passé et de sa culture. L'adoption crée une filiation nouvelle pour un enfant qui en manque. Mais il ne faut pas perdre de vue l'intérêt prioritaire de l’enfant, bien avant celui des adultes qui veulent adopter. Et c'est peut-être ce qui pose problème dans cette affaire Arche de Zoé. En effet, tous les enfants pauvres du monde ne sont pas adoptables. La reponse aux problèmes des enfants en difficulté d'ici ou d'ailleurs ne passe pas nécessairement par l’adoption. On peut aussi aider des enfants à vivre chez eux, dans leur culture, dans leur environnement.

Sans un certain nombre de protections et de règles, on risque rapidement de tomber dans le piège d'un néocolonialisme qui nous sera inévitablement reproché par des gouvernements étrangers ou leurs sociétés civiles. En présence de tels pieds nickelés de l'action humanitaire, on risque surtout de perdre cette possibilité d'adoption dans la majeure partie des états pauvres d'Afrique, où de nombreux parents adoptants arrivent néanmoins parfois à trouver des enfants à adopter.

L'adoption pose évidemment problème. Comment respecter la culture de cet enfant, comment lui reconnaître ce droit à ses racines, à une autre famille d'origine ? Face à ces importantes difficultés auxquelles il est déjà délicat de répondre, autant ne pas rajouter une autre difficulté majeure, liée à un mensonge initial sur la réalité de son abandon, de son caractère d'orphelin ou d'enfant abandonné par sa famille.

Pour cette raison, laissons la justice traiter cette affaire. N'ajoutons pas à l'impression néocoloniale née de cette histoire de pseudo-enlèvement, un regard néocolonial sur le droit de la justice tchadienne et des parties civiles à voir juger cette affaire au Tchad. Conformément à la charte judiciaire existant entre le Tchad et la France, il me semblerait même normal d'extrader au Tchad les responsables de cette association restés en France pour qu'ils soient également juger par la justice tchadienne.


Réflexion trois (12 novembre 2007)
L'activisme humanitaire, la bonne conscience occidentale et l'ethnocentrisme


L'affaire Arche de Zoé et les histoires ressemblantes d'évacuation collective d'enfants en danger (desquelles je rapproche cette histoire des enfants réunionnais déportés de la Creuse) posent le problème de l'ethnocentrisme d'un certain nombre d'activistes humanitaires.

Certaines grandes catastrophes créent des vocations humanitaires. L'association Arche de Zoé est née de la catastrophe du tsunami en Asie. Ces actions humanitaires honorent évidemment ceux qui se lancent à corps perdu dans ce combat pour la prise de conscience dans nos sociétés de la misère du reste du monde. Mais le danger vient lorsque cet engagement humanitaire se transforme en un activisme de mauvaise aloi, lorsque ces personnes oublient l'importance du relativisme culturel et basculent dans l'ethnocentrisme, lorsqu'ils croient que la seule façon de sauver des vies est de ramener ces enfants dans leur occident paré de toutes les vertus.

L'adoption internationale présente un danger inhérent manifeste lorsqu'il se conjugue avec l'action humanitaire et avec les catastrophes naturelles ou humaines (faits de guerre). Il y a danger lorsque l'adoption est considérée comme la seule solution envisageable pour sauver des enfants d'une catastrophe humanitaire, sans savoir s'il n'existe pas une autre solution localement, auprès de la famille étendue ou de la communauté villageoise. Pourquoi les belles âmes humanitaires dans nos sociétés occidentales internationales qui accordent une telle place à l'enfant ne lui reconnaissent pas cette même importance dans les autres organisations sociales, même lorsqu'il s'agit de pays en développement ?

Evidemment, il se dit partout que les familles d'accueil de l'Arche de Zoé n'étaient pas dans une optique d'adoption a priori. Mais imagine-t-on que ces enfants, après quelques années passées en France, ayant appris une autre langue, ayant perdu leurs liens avec leur société d'origine, auraient été renvoyés au Tchad ou au Darfour par leur famille d'accueil. La logique humanitaire aurait forcément conduit leur bonne famille d'accueil a lancé une procédure d'adoption pour leur permettre d'acquérir la nationalité française et d'échapper à l'horreur du retour dans leur pays dévasté, en guerre, souffrant de mille maux.

N'y a-t-il pas une aberration dans le fait que les travailleurs humanitaires qui souhaitent aider les pays en développement en arrivent à tellement idéaliser la vie dans leur pays occidental d'origine ?

Je ne conteste évidemment pas le fait que nos pays occidentaux offrent un cadre de vie très agréable en regard de la vie dans la majeure partie des pays en voie de développement, essentiellement du fait de l'instauration d'une véritable démocratie, du respect des droits de l'homme et du citoyen et de la reconnaissance de droits sociaux étendus. A ces trois points, il faut rajouter une hygiène de vie, grâce à des services publics de qualité (adduction d'eau, traitement des eaux usées, déchets, transports, administration ...). Evidemment, ces points ne sont pas généralisés dans tous les pays occidentaux, certains disposant de services publics moins efficients (les transports publics en Angleterre) ou de droits sociaux restreints (couverture maladie aux Etats-Unis) ... Mais il est souvent plus facile de vivre en occident que dans le reste du monde en développement. Mais l'espoir a bizarrement disparu de notre monde occidental, confronté au chômage et à l'égoïsme forcené des citoyens pour tous ceux qui les entourent. Ceux qui militent pour l'évacuation de ces enfants sont-ils sûrs de leur offrir une vie meilleure que seule qu'ils auraient connu dans leur pays d'origine. Et cette interrogation touche également les processus de l'adoption internationale, qui répond pas d'abord au souhait de ces couples d'élever des enfants.

Derrière l'envie de sauver des enfants de la misère ou de la mort, n'y a-t-il pas caché, derrière les bons sentiments et les grandes idées morales, un petit ethnocentrisme non assumé et de mauvais aloi ?


Réflexion deux (11 novembre 2007)
Le parallèle avec l'histoire des enfants réunionnais de la Creuse


Les demandes de libération et de transfert vers la France des humanitaires français détenus au Tchad demeurent toujours aussi pressantes, même au sommet de l'Etat français. Parallèlement, la justice française a également lancé une enquête judiciaire à l'encontre des dirigeants de l'association 'Arche de Zoé'. Et pourtant, je ne pense toujours pas que la France soit capable d'offrir aux victimes des agissements de cette association l'assurance d'un procès équitable, juste et rapide.

Evidemment, peu de français se sentent véritablement concernés par l'horreur des agissements de cette association. En effet, ce sont des enfants de parents tchadiens que ces humanitaires avaient récupérés et voulaient rapatrier en France, pas des enfants de coopérants français. Quelle différence font véritablement les français entre des enfants tchadiens et des enfants du Darfour ? Il n'est pas du tout certain que quelqu'un aurait découvert la substitution si l'opération avait réussi et si ces enfants avaient rejoint leur famille d'accueil. Après tout, nul n'aurait essayé de leur parler dans leur langue maternelle théorique, mais ces familles auraient évidemment eu à coeur de leur faire comprendre le français.

Imaginons maintenant que l'association 'Arche de Zoé', ne trouvant pas d'enfants au Darfour, ne se soit pas rabattue sur des enfants tchadiens, mais sur des enfants en Corse, dans la banlieue de Marseille, ou alors à Mayotte, à la Réunion ou aux Antilles (quelques zones françaises relativement plus proches du Darfour). Evidemment, expliquer la présence d'un accent corse ou marseillais pour des enfants censés venir du Darfour aurait été difficile. Supposons donc que l'association aurait récupéré des enfants mahorais ou réunionnais pour les rapatrier en France métropolitaine, les arrachant à leur famille. Et supposons encore une fois que ces humanitaires n'aient pas été français mais allemands ou américains. Aurions-nous accepté que ces personnes ne soient pas jugées sur le lieu de l'enlèvement, et aurait-on accepté de les rendre à un pays dont nous ne serions même pas sûr qu'ils les condamnent véritablement ?

Cette histoire met enfin véritablement en exergue l'illégitimité de l'accueil d'enfants étrangers soi disant pour des motifs humanitaires. Ce qui est en cause, c'est le mélange des genres entre l'action humanitaire et l'accueil et l'adoption d'enfants, enfants qui seront acculturés dans notre société et dont on imagine très vite qu'ils ne pourront plus retourner dans leurs véritables pays. Pour quelques familles qui agissent véritablement et uniquement pour des motifs humanitaires, combien de familles engagent cette démarche pour d'autres motifs cachés, pour pouvoir adopter, pour chercher une petite femme de ménage à domicile qu'il ne sera pas nécessaire de rémunérer, ou pour d'autres motifs inavouables ? Ces exemples caricaturaux sont loin d'être des exceptions ; il suffit de voir le nombre d'affaires d'esclavage domestique dans notre merveilleux pays des droits de l'homme.

L'affaire Arche de Zoé me rappelle une autre histoire triste d'enlèvement d'enfants, qui concerne les enfants de la Creuse, des enfants réunionnais qui ont été dans les années 1960 exportés en France métropolitaine (dans la région de la Creuse) et arrachés à leurs familles pour repeupler la Creuse et leur offrir soi-disant une éducation qu'ils n'auraient pas eu dans le département de la Réunion. A cette époque-là, également, ces enfants n'étaient pas tous des orphelins (parfois des enfants placés à la DDASS) et les autorités françaises ont également menti à leur famille en leur faisant croire qu'ils resteraient dans le département et qu'ils y auraient une bonne éducation. Arrivés dans la Creuse, ces enfants ont essentiellement travaillé comme ouvriers agricoles, malgré leur jeune âge, dans les propriétés de ceux qui étaient censés être leur famille d'accueil, sans bénéficier de cette éducation qui avaient été promise. L'histoire des enfants réunionnais de la Creuze est bien sûr très ancienne et très différente, car c'est l'état français lui-même qui a été reconnu coupable, mais la raison est toujours la même, parce qu'un illuminé humanitaire a pensé sauver des enfants en les arrachant à la pauvreté, à leur famille et à leur patrie ... Comme le disait Jean Vaudeville, le préfet de la Réunion en 1968 : ... « une belle expérience de solidarité humaine et de promotion sociale » ...

Exactement ce que semble dire toutes ces belles âmes qui joue aujourd'hui à l'aide humanitaire. Mais si c'était leurs propres enfants que les belles âmes avaient enlevées ?

Et parce que je crains que la sanction judiciaire ne sera jamais prononcée en France contre ces responsables s'ils étaient transférés (pas plus que les responsables de l'époque pour l'histoire des enfants réunionnais de la Creuse n'ont été poursuivis), je continue de préférer qu'ils soient jugés au Tchad, sur le lieu de leur crime si la justice tchadienne considère les faits de cette manière, et qu'ils y effectuent leur peine, dans les conditions normales de ce pays, pour qu'une telle histoire, ou une histoire comme celle des enfants réunionnais de la Creuse, ne se reproduise jamais plus !



Réflexion une (4 novembre 2007)
Que penser de l'épisode de l'aventure de l'Arche de Zoé ?


Pour plagier Anna, cela offre d'abord un nouveau merveilleux terrain médiatique à notre cher Président, qui se métamorphose en un véritable Zorro (voire en Superman) en arrachant des prisons tchadiennes de pauvres journalistes français et de belles hôtesses de l'air espagnoles (il n'a pas mauvais goût ... sauver des hôtesses de l'air ... et comme en plus il n'est plus marié ... une de ces dernières pourrait bien tomber amoureuse de son sauveur ...) ... Ce qui rattache définitivement notre Président plus à Superman (avec Loïs) qu'à Zorro ...

Mais sur le fond de cette histoire, que penser du sort des six français (et des trois navigants espagnols, du pilote belge et des quatre tchadiens de la mission) qui sont restés inculpés au Tchad pour enlèvement d'enfants ? Ces six français sont Eric Breteau (37 ans), sa compagne Emilie Lelouch (31 ans), Alain Péligat (56 ans), Dominique Aubry (50 ans), Philippe Van Winkerberg (48 ans) et Nadia Merimi (la benjamine).

Quelque soit leur degré de culpabilité dans cette affaire, qu'ils soient effectivement coupables des faits qui leur sont reprochés ou que la réalité des faits ait été grossie et déformée, le simple fait que l'on puisse demander à ce qu'ils soient juger en France me semble poser un problème d'ordre moral.

1) Les autorités politiques tchadiennes ainsi que les parents de ses enfants enlevés (auxquels l'association a apparemment menti sur ses objectifs) ont d'abord le droit de voir ces personnes être jugées par la justice tchadienne et les voir effectuer leur éventuelle condamnation dans une prison tchadienne.

2) Il serait au contraire amoral de voir de possibles criminels (ou délinquants) être rapatriés en France pour y être éventuellement jugés ou pour y effectuer leur peine d'emprisonnement (qu'ils n'effectueront par ailleurs même pas à moitié du fait des remises des peines automatiques à la française) ...

3) Sur quels fondements pourrait-on priver les tchadiens de juger eux-mêmes cette affaire qui les concerne en premier lieu ? Comment aurions-nous réagi si le présumé assassin de Ilan Halimi (Youssouf Fofana), du gang des Barbares, n'avait pas été extradé en France par l'état Ivoirien où il s'était réfugié, mais si au contraire la Côte d'Ivoire avait décidé de juger elle-même cette affaire de meurtre, en ne le condamnant éventuellement même pas ?

4) Par ailleurs, quelle certitude pourrait avoir les autorités tchadiennes de voir ces français être véritablement poursuivis et condamnés par la justice française ? Ne serait-ce pas enrageant pour les personnes concernées (les parents des enfants enlevés) de voir ces personnes soupçonnées être rapidement remises en liberté dans l'attente de leur jugement, puis de les voir peut-être condamner à des peines avec sursis ?

5) Ce serait un message détestable transmis à tous les autres aventuriers du même accabit ... Allez-y ! Quoique que vous fassiez. On vous couvre ! Message déjà transmis par notre Président Superman ...

En conséquence, je préférerais voir ces personnes être jugées au Tchad, puis les voir y effectuer leur peine d'emprisonnement (s'ils sont condamnés). Ce serait plus moral.

Mais cela implique évidemment également de dissocier dans cette lamentable aventure les responsabilités de chacun ... Et de ne pas oublier que certaines personnes (Dominique Aubry ou Nadia Merimi) ont été apparemment entraînées dans cette histoire sans savoir où elles s'embarquaient, sans réussir à s'opposer au reste du groupe ou à se dissocier efficacement de son action.

A contrario, il y a vraisemblablement d'autres responsables en France de cette association qui devraient être entendus. Que penser par exemple de l'implication de Dominique Gladin qui intervenait au Tchad pour le compte de l'association quelques jours auparavant, comme les personnes inculpées au Tchad ?

L'absence d'incarcération en France des autres personnes concernées n'est-elle pas une preuve de la clémence avec laquelle cette histoire criminelle serait traitée par la police et la justice française, si les six français en cause n'étaient pas jugés et condamnés au Tchad mais transférés en France ?


Saucratès


Nota : L'accord franco-tchadien de 1976

Article 29 : "si l'une ou l'autre partie en fait la demande, tout ressortissant de l'un des deux Etats condamné à une peine d'emprisonnement sera, sous réserve de son consentement, remis aux autorités de l'Etat dont il est ressortissant."

Article 30 : "sont décidés, selon la législation de l'Etat où la peine est exécutée, sur avis de l'Etat dont relève la juridiction de condamnation, les réductions, ajournements, libérations et modalités d'exécution des peines."

Article 32 : "la grâce et l'amnistie sont de la compétence de l'Etat dont relève la juridiction de condamnation."

Article 43 : "les parties s'engagent à se livrer réciproquement (…) les individus qui, se trouvant sur le territoire de l'un des deux Etats, sont poursuivis ou condamnés par les autorités judiciaires de l'autre Etat."

Article 44 : "les parties n'extradent pas leurs nationaux respectifs " mais " la partie requise s'engage à poursuivre ses propres nationaux qui ont commis sur le territoire de l'autre Etat des infractions punies comme crime ou délit dans les deux Etats."



28/01/2011
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