Critiques de notre temps

Critiques de notre temps

De la crise financière (14)

 

Réflexion quatre-vingt-onze (29 juin 2011)
Le désordre grec ...

 

Nouvelles turbulences en cette fin de mois de juin 2011 sur les bourses mondiales et sur l'économie mondiale en liaison avec les problèmes de dettes grecques. Depuis plus d'un an maintenant, les marchés financiers européens et mondiaux s'affolent en entendant parler des difficultés de l'état grec, d'une possible sortie de la Grèce de la zone euro et de l'incapacité des gouvernements européens à s'entendre sur l'aide à apporter à cet état.

Cette situation me fait réagir à plusieurs niveaux. D'un côté, il y a ceux qui expliquent que l'Europe ne doit pas laisser tomber la Grèce, et qu'une telle faillite de la Grèce serait pire que la faillite de Lehmans Brothers pendant la crise financière.

 

Je suis totalement en accord avec ces personnes (dont le président de la Réserve fédérale américaine). C'est évident. L'abandon de la Grèce serait donné le signal de la curée aux hordes de spéculateurs qui tournent comme des loups, comme des charognards autour de l'euro. Et pas seulement pour la Grèce ! Car dès que ces hordes de loups se seraient régalées sur la victime expiatoires grecques, ils se jetteraient avec encore plus d'apétit sur la prochaine victime de la liste, Espagne, Portugal ou Irlande en tête, la France n'étant cependant pas loin. Avec une certitude encore plus grande de l'emporter au final.

 

De l'autre côté, il y a ceux qui jugent inévitable qu'un des états européens doive sortir de la zone euro dans les prochains mois. Premièrement, ces personnes vraisemblablement extrêmement bien intentionnées appartiennent justement à la meute des prédateurs qui cherchent à s'enrichir encore plus sur la désagrégation de la zone euro ; certains s'étant justement enrichis sur les attaques spéculatives contre le franc il y a quelques années ou décennies. Leurs pronostics sont ainsi totalement subjectifs, et il est bien regrettable que des journalistes leur donnent la moindre publicité.

 

A un autre niveau, il faut également se prononcer sur les manifestations se déroulant en ce moment même en Grèce. On peut peut-être les comprendre, ces manifestants grecs qui refusent les réductions de dépenses publiques qui leur sont pratiquement imposées par les marchés financiers étrangers. Mais en même temps, les grecs sont quand même les premiers responsables de la dérive de leurs comptes publics. Ce sont les grecs qui ont institutionnalisés l'évasion fiscale et le travail au noir ; leurs finances publiques ne seraient pas dans cet état calamiteux si durant des années ils n'avaient laissé se poursuivre ces agissements de tous, des entrepreneurs, des fonctionnaires, des médecins ... s'ils n'avaient pas reconduit les mêmes politiques dévoyés ... Alors évidemment, ce qui payent le plus ne sont pas ceux qui ont le plus trichés ! Le problème est qu'ils ont affaire à la fois à des comportements mafieux, de prévarication tellement développés qu'ils touchaient pratiquement tout le monde, de telle sorte que le fisc ne peut pas poursuivre tout le monde ... et qu'ils ont aussi affaire à un emballement des marchés financiers, qui veulent des résultats tout de suite, immédiatement.

 

Dernièrement enfin, il y a les principes par lesquels les marchés financiers ont réussi à attaquer la Grèce ; le cours des CDS (Credit default swaps), titres qui permettent à un créancier de s'assurer contre le défaut de paiement d'un débiteur, qui atteignent des sommets (25% soit deux fois plus que Lehmans Brothers à la veille de sa faillite) ... et le cours des nouveaux emprunts d'état émis par le Trésor grec ... Et pourtant, quelque soit le niveau des primes que les emprunteurs sont obligés de payer pour couvrir leurs risques, ou le taux des nouveaux emprunts d'état (une fraction de la dette grecque totale), on pourrait penser qu'il n'y a aucune urgence à mettre en place de nouvelles mesures  fiscales, et rien qui ne l'impose. Après tout, une spéculation peut s'étouffer toute seule si rien ne vient l'alimenter. D'une certaine manière, on peut même peut-être comprendre les manifestants grecs qui contestent la nécessité d'un nouveau plan de rigueur ...

 

Que devrait faire l'Europe ?

 

1) Financer la nouvelle dette grecque, solution qui avait été retenue jusqu'à présent, en permettant à la Grèce de se financer à des taux plus faibles. Mais apparemment, l'Europe veut de nouvelles concessions des contribuables grecs pour que les finances grecques reviennent vers l'équilibre.  

 

Cela me conforte dans l'idée que le redressement des comptes publics français doit être engagé le plus rapidement possible afin qu'une telle mésaventure ne touche pas la France. Car l'urgence a pour conséquence de creuser encore plus les déficits publics ...

 

2) Faire reprendre la partie excédentaire de la dette grecque par la zone euro, en la faisant financer par une nouvelle taxe sur les opérations financières en Europe, puisqu'il apparaît désormais fort improbable que la Grèce sera capable de sortir du piège de la dette où elle est tombée.

 

Mais cette solution consiste à récompenser les plus mauvais élèves ; une prime à la triche ! Mais à partir du moment où la faillite de la Grèce paraît difficile à envisager, et la sortie de la Grèce de la zone euro comme suicidaire, cette solution est très vraisemblablement la seule envisageable. Pour éliminer la mauvaise impression due au fait de récompenser les mauvais élèves, il pourrait être envisageable de racheter de la dette à tous les états de la zone euro, ce qui accroîtrait néanmoins le niveau des ressources nécessaires pour couvrir cette dette.

 

3) Enfin, que la Grèce fasse défaut sur le remboursement de sa dette. Mais ceci risquerait de faire perdre leur note triple A à tous les états européens et occidentaux, et renchérirait du coup le coût de leur dette publique ...


 

Réflexion quatre-vingt-dix (19 avril 2011)
Le secteur financier aux Etats-Unis - La fable du serpent et du soigneur ...

 

Les bourses occidentales ont 'corrigé' hier lundi 18 avril 2011, s'inscrivant en forte baisse (-2,35% pour le CAC40 à Paris, -2,11% pour le Dax à Francfort, -2,10% pour le Footsie (ou FTSE100) à Londres, -2,44% pour l'Eurostoxx50). Aujourd'hui, il est probable que le Dow Jones s'inscrira également en baisse comme le Japon ou les autres places financières.

 

La raison de cette nouvelle série baissière : les craintes sur la dette des Etats-Unis et des pays de la zone euro, ce qui a fait chuter le secteur financier un peu partout dans le monde. En milieu d'après-midi, l'agence de notation américaine Standard&Poor's a annoncé une dégradation (future) de la note attribuée à la dette des Etats-Unis. L'agence d'évaluation a ainsi abaissé à 'négative' la perspective d'évolution de la note de la dette américaine, invoquant des déficits budgétaires très importants, le niveau d'endettement du pays, et l'absence d'une politique claire pour y remédier. Selon l'agence, il y a une chance sur trois que les Etats-Unis perdent dans les deux ans leur précieuse note AAA (la note maximale accordée par S&P), qui leur permettent d'emprunter à bon compte sur les marchés. En zone euro, l'émission de l'Espagne de bons à 12 et 18 mois a été beaucoup plus difficile que les fois précédentes, avec des taux en forte hausse.

http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/04/19/les-etats-unis-rattrapes-par-l-ampleur-de-leur-dette_1509754_3234.html

http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/04/19/l-averstissement-de-standard-poor-s-aux-etats-unis-un-mal-pour-un-bien_1509774_3234.html


Plusieurs aberrations naissent de cette annonce de Standard&Poor's.

Premièrement, cette décision d'abaissement de la note de la dette américaine ne dépend en fait que de la seule agence Standard&Poor's (et de ses consoeurs Fitch et Moody's). Le fait donc de dire qu'il y a une chance sur trois que les Etats-Unis perdent leur note AAA (note également détenue par la France et d'autres grands pays occidentaux, mais peut-être également par la Chine ...) est un non-sens, puisque c'est une décision qu'ils ont vraisemblablement déjà arrêtés à Standard&Poor's.

 

Deuxièmement, cette annonce de Standard&Poor's n'est pas nouvelle en soi ; tout le monde sait que les Etats-Unis sont immensément endettés, et que leur déficit budgétaire, ainsi que le déficit de leur commerce extérieur, est abyssal (pour mémoire, le déficit budgétaire des Etats-Unis devrait dépasser 1 500 milliard de dollars en 2011, soit 10% de leur PIB et leur dette 14.200 milliards de dollars, soit 91,6 % du PIB). Mais en même temps, que signifie le terme de 'déficit abyssal' ? Ce qui aujourd'hui apparaît énorme ne sera-t-il pas demain normal ? Il y a quelques décennies, il était impossible pour des ménages français disposant de revenus moyens de s'endetter sur vingt ans pour des centaines de milliers d'euros, soit des millions de nouveaux francs, soit des centaines de millions d'anciens francs ! Et aujourd'hui, c'est devenu normal, commun.

 

Qu'en sera-t-il demain en terme de niveau jugé normal pour les dettes publiques des états ou des organismes internationaux ? De toute façon, les Etats-Unis ont toujours la possibilité de nationaliser l'ensemble de leur secteur financier ou de prélever l'ensemble de leurs résultats également vertigineux (et non plus abyssaux) pour diminuer leur niveau de déficit. Heureusement, les copains républicains des milliardaires et des multinationales américaines veillent pour leur offrir toujours plus de réductions d'impôts !

Troisièmement, la véritable aberration de cette annonce de Standard&Poor's vient du message désormais véhiculé. Il y a trois ans, les Etats-Unis avaient volé au secours du secteur financier américain en s'endettant de manière abyssale pour le refinancer, offrant (... une image s'impose ici ...) un asile en leur sein à un serpent venimeux ... Ce besoin de porter secours au secteur financier était lui-même la conséquence de l'incapacité des agences de notation Standard&Poor's, Fitch ou Moody's à noter convenablement les risques nés des produits dérivés des banques, du fait de conflits d'intérêts.

Aujourd'hui, le serpent rassuré, cajolé et soigné, vient de mordre celui qui le protégea durant ses dernières années ... Belle morale à cette histoire ! Quelle ingratitude du serpent aurait dit La Fontaine ! Ou bien eut-il parlé d'inconscience du soigneur ?

Quatrièmement, il demeure l'aberration de confier à des intervenants privés comme Standard&Poor's, Fitch ou Moody's, la notation de la dette publique des états. Il faut aujourd'hui s'interroger sur deux choses.

1) Pour quelles raisons Standard&Poor's menace-t-elle de dégrader la note des Etats-Unis ? N'est-ce pas simplement en raison d'une volonté américaine ou internationale de contrôler l'activité des agences de notation ou bien d'augmenter l'imposition des plus riches américains (dont fait partie le patron de S&P) ?

2) Quel organisme pourrait être chargé de la notation des dettes des états au cas où cette activité était désormais interdite aux agences privées de notation ? Le FMI ou la Banque Mondiale pourraient être parfait dans ce rôle. Mais comment les marchés financiers régiraient-ils aujourd'hui à une telle interdiction, qui donnerait l'impression que les Etats-Unis essaient de casser le thermomètre qui indique la dégradation de leur santé !

Une autre solution serait de proposer le découpage des activités des agences privées de notations, la fusion des services des trois agences chargées de la notation des états et leur mise sous tutelle internationale. Et parallèlement à cette mesure, l'imposition de nouveaux impôts sur les plus riches américains et sur le secteur financier, afin de redresser le déficit public américain conformément aux souhaits de Standard&Poor's.

Ce serait peut-être la parfaite morale pour conclure définitivement cette fable. L'écrasement du serpent ingrat !

 

 

Réflexion quatre-vingt-neuf (28 novembre 2010)
L'euro résistera-t-il à la crise financière ?

Le plan d'aide à l'Irlande, d'un montant de 85 milliards d'euros (dont 35 milliards pour la recapitalisation du seul secteur bancaire), a été validé ce dimanche par l'ensemble des états de l'Union européenne. C'est le deuxième état de la zone euro à afficher des difficultés de refinancement, soumis à la spéculation des marchés, après la Grèce au cours du premier semestre 2010. Mais après la Grèce et aujourd'hui l'Irlande, les marchés s'interrogent sur le prochain maillon faible de l'Europe : le Portugal, l'Espagne ou alors la France ?

Le gouvernement français a beau jeu de déclarer que les situations sont différentes. La Grèce avait certes masqué l'importance de ses déficits publics en recourant à des manipulations de sa dette et en présentant des statistiques fausses. L'Irlande de son côté a affiché des niveaux de déficits records, qui auraient coulé encore plus rapidement tout autre état non protégé par l'euro : 14,4% de déficit public en 2009 et apparemment 32% en 2010. L'Espagne serait fragilisée par l'explosion d'une bulle immobilière.

Mais les marchés ont l'extrême outrecoindance de décider eux-mêmes, de manière totalement libre et indépendante, des états ou des entreprises dont ils se méfient, entraînant immédiatement un renchérissement des conditions d'emprunt. S'ils estimaient que la France présente dorénavant des risques sur sa dette publique, ce ne seront pas les rotomontades de Nicolas Sarkozy qui leur feront peur.

Comment cette situation peut-elle se comprendre ? Les interrogations sur les dettes publiques grecques et irlandaises n'ont pas véritablement de sens. Simplement la crise financière est entrée dans une nouvelle phase, concernant les dettes publiques. La zone euro apparaît être une zone de fragilité au sein de la finance mondiale, en raison des divergences de situation économique et budgétaire au sein des pays qui la composent. Le dollar et le yen peuvent baisser ou augmenter plus ou moins librement ; et nul spéculateur n'irait parier un kopek sur la sortie du dollar d'un quelconque des états composant les USA. Il n'en va pas de même de la zone euro, qui fête à peine ces dix ans d'histoire, et sur laquelle la spéculation quant à la sortie d'un état en difficulté de la zone euro paraît beaucoup moins improbable.

Nous sommes ainsi toujours très loin d'être sortis de la crise financière démarée à l'été 2007. Les craintes des marchés financiers mondiaux ne se calmeront pas avec le sauvetage de l'état irlandais. Dans quelques mois, ce sera au tour du Portugal, ou de nouveau de la Grèce d'être concernés et de devoir être secourus. Puis l'Espagne ! Puis la France sera elle-aussi concernée au premier chef ? Sauf si la crise financière se calme suffisamment pour que la reprise économique suffise à équilibrer les déficits publics et à les ramener à un niveau rassurant. Evidemment, il s'agit de pure spéculation, sans aucune argumentation communicable. Mais à partir du moment où les ménages français eux-mêmes considéreront qu'investir dans une obligation française est trop risqué en matière de certitude de remboursement et de niveau de rémunération par rapport à l'inflation, alors ce sera un signe que la spéculation se sera déjà attaqué à notre pays.

L'euro pourra-t-il résister à cette nouvelle phase de la crise financière ? Pour l'instant, les mécanismes internes à l'euro de sauvetage des états en difficulté fonctionnent convenablement. Simplement, les divergences au sen des états européens demeurent et prennent de plus en plus d'ampleur, menaçant les emplois dans les états moins productifs que l'Allemagne ainsi que la stabilité de l'euro.

Mais la sortie de la zone euro ne constitue pas une solution pour les états européens les plus fragiles. L'adoption d'une nouvelle monnaie (ou le rétablissement de l'ancienne) serait un constat d'échec et entraînerait une dévaluation extrêmement importante pour ces pays qui seraient vraisemblablement chahutés par les spéculateurs pendant des décennies. Pour tous ceux qui voient l'euro comme un carcan, il ne faut pas oublier que les états européens avaient souhaité se regrouper ou rejoindre l'euro pour éliminer la contrainte monétaire qui enserrait auparavant toutes leurs décisions budgétaires.

Mais la zone euro ne sera vraisemblablement pas considérée comme une zone intangible, au même titre que le dollar, avant plusieurs siècles, lorsque la construction européenne aura dépassé l'histoire des nations qui la composent, qu'elle sera une réalité politique, que son intégration économique sera achevée. Ce jour-là seulement, l'euro sera à l'abri des spéculations. Il ne faut pas oublier l'histoire de l'Union latine, qui dura plus de soixante ans (de 1865 à 1927) mais qui n'empêcha ni la survenue de la première guerre mondiale, ni la montée des haines en Europe, ni sa disparition. Evidemment, la Prusse (puis l'Allemagne) n'en faisait pas partie, et elle ne reposait pas sur une monnaie commune, simplement sur des pièces au poids en or et en argent d'un rapport et d'un poids commun. L'histoire de l'euro sera encore longue si elle survit à cette crise.
 

Réflexion quatre-vingt-huit (16 novembre 2010)
De nouvelles craintes des marchés concernant désormais l'Irlande

Nous nous étions quittés il y a six mois sur les soubressauts de la finance mondiale en liaison avec les craintes sur la situation financière de la Grèce puis du Portugal. Six mois après, malgré la mise en oeuvre de mécanismes de garantie des emprunts des états en difficulté, qui ont réussi à calmer pendant un temps les spéculateurs, les marchés financiers mondiaux s'inquiètent de nouveau, au sujet de la situation financière de l'Irlande cette fois-ci, et par effet de contagion une nouvelle fois, du Portugal.

Normal, ces différents pays sont regroupés sous l'acronyme PIGS par les intervenants anglo-saxons sur les marchés financiers ; acronyme au sein duquel le 'I' ne correspond pas à l'Italie mais bien à l'Irlande (Portugal, Irlande, Grèce, Spain-Espagne).

L'Irlande doit faire face actuellement au sauvetage extrêmement coûteux de son système bancaire, et les fonds que l'Etat a dû y injecter ont fait exploser le déficit public irlandais à plus de 30% de son produit intérieur brut, bien au-delà du niveau de déficit de l'ensemble de ses partenaires de la zone euro (ou hors zone euro). L'Irlande, ce tigre européen qui affichait des taux de croissance asiatique, s'enfonce ainsi désormais dans la crise.

Mais il y a une forme de justice néanmoins dans les difficultés qui touchent désormais l'Irlande. Au plus fort de la crise financière, lorsque les systèmes bancaires européens étaient à deux doigts de s'effondrer, lorsque des foules de déposants affluaient comme aux pires heures des années 30 devant les guichets des banques françaises ou anglaises, après les difficultés de Northen Rock au Royaume-Uni ou d'AIG aux Etats-Unis, lorque le marché monétaire européen était pratiquement bloqué avec le refus des banques de se faire confiance, lorsque les banques redécouvraient l'intérêt des placements de leur clientèle ... l'état irlandais avait tenté d'attirer, quelqu'en soit les moyens et les risques, les placements des ménages européens en garantissant sans limitation de montant les placements dans les banques irlandaises.

Un peu moins de deux ans plus tard, on en voit finalement les résultats. Les systèmes bancaires de la majeure partie des états européens sont redevenus bénéficiaires et les difficultés monétaires sont derrière nous, sauf en Irlande. En Irlande, le système bancaire est toujours dans une situation extrêmement compromise, nécessitant des fonds publis faramineux.

De manière encore plus surprenante, ce seront les contribuables irlandais qui payeront éventuellement pour la sécurisation des placements financiers des épargnants étrangers et le remboursement de leurs avoirs en cas de faillite. Et puis surtout, l'état irlandais ne peut pas laisser un établissement même extrêmement compromis coulé, puisqu'il serait alors inévitablement appeler à couvrir les engagements qu'il a pris au plus fort de la crise. L'état irladais est ainsi obligé de secourir toutes les banques irlandaises sauf à devoir rembourser directement les épargnants.

Peut-on appeler cela la justice ? Je le pense ! Et les bourses mondiales plongent sur mardi 16 novembre 2010 ; le CAC abandonnant 2,63% en dessous de 3.800 points ...


Réflexion quatre-vingt-sept (17 mai 2010)
La crise grecque et la crise financière (suite 2) ...

En complément d'information, quelques articles du Monde intéressants sur le sujet ... Où l'on voit que les idées de relance monétaire et de réforme des agences de notation internationale gagnent du terrain ...
http://www.lemonde.fr/economie/article/2010/05/15/les-marches-sont-pour-une-fois-raisonnables_1352138_3234.html
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2010/05/15/merci-les-marches-et-vive-la-rigueur_1352171_3232.html
http://www.lemonde.fr/economie/article/2010/05/15/le-senat-americain-veut-encadrer-les-agences-de-notation_1352142_3234.html

Les évolutions erratiques des bourses occidentales nous rappellent que la crise financière n'est toujours pas terminée. Cette crise est initialement partie, à l'été 2007, de l'éclatement d'une bulle de crédit sur le segment des crédits subprimes immobiliers américains, crédits subprimes dont on s'est ensuite aperçu qu'ils avaient été disséminés dans l'ensemble de la finance occidentale, dans l'ensemble des produits financiers. Du coup, une crise qui n'aurait dû envoyer au tapis que les quelques institutions de crédit insuffisamment regardantes sur la qualité des prêteurs auxquels elles consentaient des crédits, a concerné l'ensemble de la finance mondiale et a entraîné la faillite d'institutions jusqu'en Allemagne ou en Angleterre, qui n'avaient pourtant jamais consentis le moindre crédit subprime mais avaient acquis des créances reposant sur de tels crédits.

Les états occidentaux se sont endettés massivement entre 2007 et 2010 pour sauvegarder les systèmes financiers et les plus importants établissements de crédit, puis pour tenter de relancer budgétairement les économies frappées par une crise économique ayant suivie la crise financière. Car la crise financière correspondait aussi à une crise d'une économie fonctionnant à crédit, tout particulièrement aux Etats-Unis, et la crise financière a entraîné un début de perte de confiance dans le système économique, d'où cette généralisation de la crise et un ralentissement de la consommation et une grippage du marché immobilier frappé par un début de baisse des prix immobiliers.

Alors que les bourses avaient commencé à se redresser dès le deuxième trimestre 2009 après à peine un peu moins de deux ans de crise, le début de l'année 2010 a vu croître des interrogations des marchés financiers sur le niveau d'endettement des états occidentaux, et notamment au sein de la zone euro les états considérés comme les plus fragiles ... comme la Grèce, le Portugal ou l'Espagne ... avant que le tour des autres états ne viennent ...

On ne peut nier le rôle des spéculateurs dans ces difficultés, ni l'influence de l'irrationnalité et des insuffisances du fonctionnement des marchés financiers. Mais derrière ces explications, il y a autre chose. Dima comme Nolats nous explique que l'Europe et la zone euro étaient dès l'origine une erreur de casting en intégrant des états qui n'avaient rien de comparables, et qui ne se trouvaient pas au même niveau de développement économique.

Ils ont évidemment raison ! Les états européens n'ont en effet rien de comparables, surtout en terme de système fiscal et de comportement de la population face à l'impôt et à l'état. Déjà la France et l'Allemagne sont aussi différents face à la loi et l'impôt qu'il est possible de l'être, entre des français réfractaires à l'ordre, dont le sport national est de tenter d'échapper à l'impôt, qui rêvent de partir à la retraite dès 55 ans voire 50 ans ... et des allemands beaucoup plus travailleurs et beaucoup plus obéissants (ce qui les avait conduit à suivre aveuglement un régime fasciste dans les années 1930-1945 et à exterminer des peuples entiers) ... Nul n'est parfait ...

Les grecs ont une mentalité encore plus différente de la nôtre, ressemblante d'une certaine manière à nombre de pays en développement d'Afrique. Une incapacité de leurs citoyens à respecter leur état et les règles du vivre ensemble en société, dans une société développée. Le sport national grec est d'échapper à l'impôt par tous les moyens possibles, ce qui donne une généralisation des systèmes de dessous de table pour toutes les activités de la vie quotidienne. Ce qui est limité en France et (plus rarement) en Allemagne à quelques professions particulières qui préfèrent travailler au noir (plombiers, carreleurs ...), à l'attribution de marchés publics où il est nécessaire de graisser la patte de quelques maires, présidents de région ou de département, de leurs proches ou de quelques administratifs (fonctionnaires territoriaux) ... est à ce point généralisé en Grèce qu'il y semble même impossible d'accoucher dans un hopital ou une clinique si vous n'avez pas versé d'enveloppe  pour pouvoir être soigné (en plus du coût normal déclaré).

Le gouvernement grec commence à s'attaquer à ce fléau de l'économie souterraine, en rappelant notamment qu'il est anormal qu'il y ait même si peu de gens (quelques milliers) qui acceptent de déclarer gagner plus de 100.000 euros par an. Un pays constitué de tricheurs est rentré dans l'Europe et dans la zone euro. Ses finances publiques sont très gravement déséquilibrées mais les grecs ne sont toujours pas prêts à accepter les règles du jeu d'un état de droit. Peut-être que la Grèce devrait sortir de la zone euro dans laquelle ils n'ont pour l'instant rien à faire !



Réflexion quatre-vingt-six (6 mai 2010)
La crise grecque et la crise financière (suite) ...

Chaque jour qui passe nous amène son lot de mauvaises nouvelles, de dégradation de note d'une agence de notation, ou d'une autre mauvaise nouvelle. Hier mercredi 5 mai 2010, c'était au tour de l'agence de notation internationale Moody's d'«annoncer qu'elle envisageait d'abaisser la note de la dette souveraine du Portugal dans les trois mois en raison de la récente détérioration des finances publiques et des faibles perspectives de croissance à long terme du pays».
http://www.boursorama.com/infos/actualites/detail_actu_marches.phtml?num=4dfdcbf54873f6f5d34c7c0b47fe071d

Chacune à leur tour, les trois principales agences de notation internationales (Standard & Poor's, Moody's et Fitch Rating) égrennent leurs décisions d'abaissement des notes de la Grèce, du Portugal puis de l'Espagne ... comme si chacune d'elles voulait sa part de médiatisation dans cette affaire, comme si elles voulaient créer un état d'esprit particulier sur les marchés de capitaux internationaux ... comme si elles avaient décidé que les états de la zone euro étaient suffisamment endettés et qu'ils étaient temps pour ceux-ci de revenir à des finances publiques en équilibre budgétaire ou en excédent ... Dans un sens, pourquoi pas !... Mais le pire est qu'elles ont les moyens d'y parvenir en créant un sentiment de psychose sur les marchés financiers.

Elles se sont trompés en permanence avant la crise financière ... Les états occidentaux ont sauvegardé le système financier et bancaire international au plus fort de la crise, lorsque les plus grandes institutions financières sombraient ... Mais les marchés financiers ont pourtant aujourd'hui plus confiance en ces oiseaux de mauvaise augure que sont ces agences de notation internationales que dans les états souverains occidentaux ...

Mais les marchés financiers ne sont qu'une juxtaposition de comportements d'agents lambda individuels ... Vous-mêmes, moi-même, serions-nous prêts à faire confiance à l'état grec en investissant dans des obligations publiques grecques, libellées en euros (donc sans aucun risque de change à moins d'une sortie de la Grèce de la zone euro) présentant un taux d'intérêt extrêmement élevé (entre 7% et 11% aujourd'hui) en comparaison des produits d'épargne qui sont accessibles (1,25% pour les livrets A) ? Je crains que ni vous ni moi ne sommes prêts à prendre ce risque, mais il est tellement simple de mettre la faute sur le dos des marchés financiers ...

Autre nouvelle tombée hier mercredi, les affrontements violents et meurtriers ayant eu lieu en Grèce, dans le cadre de la grève générale à laquelle appelaient les syndicats grecs de travailleurs ... On trouve chez les décideurs politiques européens, chez les syndicats grecs, chez les gauchistes européens, l'idée aberrante à la fois que la crise grecque est liée à une aberration ou un emballement des marchés financiers (ainsi l'intervention du secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Pierre Lellouche, qui exprimait «son émotion pour ces décès directement liés à l'emballement des marchés»), et une forme de paranoïa qui veut faire croire que cette crise est une tentative, un essai, menés par les libéraux pour détruire le système social européen ... aujourd'hui la Grèce, demain le reste de l'Europe ... Et on voit ainsi les partis gauchistes européens jouer la carte du 'no passaran' ...

Cette crise n'est pas un effet de l'emballement des marchés !... Les marchés financiers ne sont qu'une nébuleuse d'actions individuelles, au premier rang desquels on trouve peut-être le comportement de ces mêmes dirigeants syndicaux ou militants gauchistes qui, pris individuellement préfèrent transférer leur petite épargne d'un FCP vers leur livret A ou sous leur matelat en prévision de la lutte finale, ou qui dans les organismes sociaux paritaires dans lesquels ils siègent, imposent une gestion moins risquée des placements de ces organismes, en leur demandant de se réfugier vers des placements sans risques ... Ce n'est que cela, les marchés financiers, une concaténation de décisions individuelles ... Il n'y existe pas de grands satans ... juste des traders qui appliquent souvent les décisions d'anonymes petits épargnants ... Tout au plus peut-on voir dans cette nouvelle crise des marchés financiers une volonté de quelques influenceurs libéraux (dans les agences de notation internationales, dans quelques grands titres de presse financière, dans quelques banques centrales, dans quelques universités ou thinks tank ...) d'obtenir une baisse des dépenses publiques et des déficits publics ... maintenant que les états ont réussi à sauvegarder le système financier international dont ils dépendent ...

Mais les syndicats grecs n'y comprennent rien. Il est aberrant de les voir combattre le plan de rigueur grec en menaçant de mettre le feu, comme s'ils croyaient que la Grèce allait pouvoir continuer de vivre à crédit toute leur vie durant ... La Grèce a peut-être eu les jeux olympiques de son histoire, mais elle ne s'en est jamais économiquement et financièrement remise ...

http://www.boursorama.com/infos/actualites/detail_actu_marches.phtml?num=25a40944a9d8adce8172dac92c5fa623

Enfin, dernière nouvelle financière de la journée d'hier ... Les 10,6 milliards de dollars d'aide demandés par Freddy Mac (de son véritable nom  'Federal Home Loan Mortgage Corporation' - FHLMC) aux Etats-Unis, après les 8 milliards de dollars de perte annoncée par l'établissement pour le premier trimestre 2010 ... Ce qui portera le plan d'aide du gouvernement fédéral aux organismes Freddy Mac et Fanny Mae (de son véritable nom 'Federal National Mortgage Association' - FNMA) à 136,5 milliards de dollars depuis le début de la crise financière ... (et ce n'est pas terminé). Le sauvetage de Freddy Mac comme de Fanny Mae est indispensable à la sécurité du système financier américain puisqu'ils garantissent ensemble 5.500 milliards de dollars de prêts immobiliers aux Etats-Unis ... Manifestement, pour ceux qui en doutait ou l'ignorait, la crise financière n'est toujours pas terminée aux Etats-Unis.
http://www.boursorama.com/international/detail_actu_intern.phtml?num=efb941de80d2b92b0705dd64286b6e9c

Et cette dernière mauvaise nouvelle est peut-être la plus inquiétante du lot, en ce qu'elle nous rappelle que le pire de la crise immobilière américaine n'est peut-être pas passé.


Saucratès
 
 

Mes autres écrits sur la crise financière :
1.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-1985888-de_la_crise_financiere__1_.html
2.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-1985907-de_la_crise_financiere__2_.html
3.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-1986317-de_la_crise_financiere__3_.html
4.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-1988042-de_la_crise_financiere__4_.html
5.https://saucrates.blog4ever.com/blog/lire-article-447196-1988064-de_la_crise_financiere__5_.html
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14/11/2010
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