Critiques de notre temps

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Cyclone Belal - Infantilisation et moralisation préfectorale

Cyclone Belal - Infantilisation et moralisation préfectorale

Par Saucratès 

Saint-Denis de la Réunion, vendredi 19 janvier 2024

 

Privé pendant plus d’une journée d’électricité (et d’eau accessoirement), j’ai eu tout loisir d’écouter les journalistes de RFO à la radio ainsi que les allocutions du préfet. Certes, les décisions de ce préfet étaient applaudies par les journalistes, les spécialistes de toute sorte et même nombre de téléspectateurs ou auditeurs de RFO. Je n’ai pas lu la presse locale mais je parierais qu’ils ont tous applaudi aux décisions si judicieuses de ce préfet miraculeux.

 

J’ai un autre regard sur cette affaire. La miraculeuse alerte violette est vraisemblablement une absurdité qui a retardé de plusieurs dizaines d’heures le rétablissement de nombre de services publics, voire est responsable de la mort de ses sans domicile fixe qui ont été abandonnés sans possibilité de secours pendant les pires heures de ce cyclone. Ils avaient refusé d’être mis à l’abri ? Pourquoi ce besoin de souligner ce point chaque fois que le préfet ou les journalistes parlent de ces décès ? Pour s’exonérer de toute responsabilité ? Il suffit donc que quelqu’un passe vous voir et vous conseille et demande de quitter votre domicile pour que vous soyez responsable de votre propre mort ?

 

La non moins miraculeuse alerte téléphonique pour nous avertir à longueur de journée des alertes rouges et violettes me semble tout aussi stupide. C’est donc le nouveau jouet du préfet. Il en a usé et abusé à longueur de temps dimanche, lundi et mardi. Alerte orange, alerte rouge, alerte violette, et maintien de l’alerte rouge à deux reprises. Je crains que cet usage immodéré des alertes téléphoniques via nos GSM ne soit maintenant utilisé à tout va par nos responsables politiques et préfectoraux. N’oubliez pas d’aller voter ! Interdiction de participer à des émeutes ! Catastrophes en tout genre. On n’est pas prêt d’arrêter de voir nos GSM sonner pour un oui ou pour un non !

 

Le maintien de l’alerte rouge jusqu’au mardi midi, alors que la majeure partie de la Réunion était à l’abri de l’influence du cyclone depuis au minimum le lundi soir, voire le lundi midi pour la zone de Saint-Denis, est une autre aberration de cet épisode cyclonique. L’alerte rouge sert à protéger la population d’un risque mortel avéré lié à l’activité cyclonique. Quel risque mortel courrait-on la nuit de lundi à mardi, ou le mardi matin ? Aucun. Les routes étaient certes impraticables, mais rien n’empêchait les réunionnais de secourir leurs voisins, d’aller faire quelques courses chez le chinois ou la superette. Le maintien de cette alerte rouge jusqu’au mardi midi n’avait aucun sens si ce n’est d’alimenter l’activité répressive des gendarmes et les commentaires délatoires de la populace.

 

Le pire est certainement les commentaires des censeurs journalistiques. Faites ci, faites ça, respectez les consignes, facilitez le travail des secours … J’ai retrouvé pendant cet épisode cyclonique la même palette de censure et d’infantilisation que j’avais entendu pendant la période du confinement du coronavirus.

 

Aussi insupportables, les discours moralisateurs du préfet pour présenter le passage en alerte orange (allez faire vos courses, allez acheter de l’eau, sécurisez vos logements …), pour présenter le passage en alerte rouge (ne bougez pas de chez vous, enfermez-vous …), pour avertir de la fin de l’alerte rouge (aidez vos voisins, faites ci, faites ça …). Tout ceci m’a profondément fatigué et écouter ce préfet discourir pendant presqu’une heure «sur ce que je devais faire» et «sur ce que je ne devais pas faire» était désagréable sachant que je n’avais que la radio pour avoir des informations sur ce qui se passait, ni rien d’autre à faire dans le noir.

 

Pour terminer, peut-on parler de la date de la rentrée scolaire de lundi prochain ? À nouveau, les autorités préfectorales et le rectorat avancent la rentrée scolaire de janvier d’une bonne semaine. À mon époque, dans les années 1980, la rentrée scolaire avait lieu aux alentours du 15 février et les vacances scolaires de l’été austral duraient deux mois, du 15 décembre au 15 février, respectant les périodes des plus grandes chaleurs australes. Il y a peu, la rentrée scolaire survenait plutôt fin janvier. Une nouvelle fois, cette année, la rentrée scolaire est avancée d’au moins une semaine. Il y a quelque années, les jeunes s’étaient massivement mis en grève pour protester contre la volonté de ramener la rentrée scolaire sur les dates métropolitaines. Gageons que notre si merveilleux préfet a déjà prévu la solution pour désamorcer la grogne des etudiants … Peut-être faire venir des centaines d’étudiants métropolitains pour remplacer les futurs grévistes …

 

Donc effectivement, je ne suis pas d’accord avec les appréciations dithyrambiques des journalistes, auditeurs et spécialistes sur les actions et la gestion merveilleuse de ce préfet. Mais tant qu’il est apprécié à Matignon et Place Beauvau … rien d’autre ne compte.

 

 

Saucratès



19/01/2024
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