Critiques de notre temps

Critiques de notre temps

L’aberration du malus écologiste et ses conséquences industrielles

L’aberration du malus écologiste et ses conséquences industrielles

Par Saucratès 

Saint-Denis de la Reunion, dimanche 10 septembre 2023

 
Existe-t-il une analyse critique du malus automobile à la française ; cette taxe absurde qui pouvait atteindre 50.000 euros cette année sur les véhicules considérés comme très polluants, et qui devrait être déplafonnée et illimitée à compter de 2024. 

 

https://www.msn.com/fr-fr/auto/actualite/malus-%C3%A9cologique-2024-une-taxe-sans-limite-ce-que-l-on-sait-sur-ce-que-pr%C3%A9pare-le-gouvernement

 

Cette taxe est évidemment une magnifique interprétation des théories de Pigou, en tant que taxation des pollueurs, encore appelée principe des pollueurs-payeurs. Dans l’idéal, cela fonctionne parfaitement. On fait payer à l’achat aux automobilistes une taxe en fonction de la norme de pollution du véhicule qu’ils ont acheté. D’abord plafonnée à 10.000 euros, elle est passée successivement à 20.000 euros, puis à 30.000 euros, puis à 40.000 euros et en 2023 à 50.000 euros, sans pouvoir excéder 50% du prix du véhicule, ce qui n’était pas le cas en 2022. 

 

Le gouvernement français a rajouté à cette taxe sur les émissions de CO² une nouvelle taxe au poids, reposant toujours sur le principe pigouvien que plus un véhicule est lourd, plus il consomme et plus il pollue. Evidemment, ces taxes sont sensées avantager les constructeurs automobiles français et porter essentiellement sur les productions étrangères et notamment celles des grosses berlines allemandes.

 

Pourquoi donc est-ce que j’estime que cette taxe est une absurdité sans nom ? Les seules critiques sont le plus souvent celles des magazines automobiles, mais si ceux-ci encensent les productions automobiles françaises, et j’imagine qu’ils doivent recevoir des publicités importantes de la part des constructeurs automobiles français, ou du gouvernement, pour tenir ce langage sur les productions françaises. Comme par exemple les commentaires sur «Le magnifique touché de route des Peugeot, dont feraient bien de s’inspirer certaines productions étrangères », entre autres.

 

En fait, la France a déjà eu une politique fiscale particulière, qui lui était propre, et qui a durablement marqué la production automobile de notre pays, nous orientant selon moi vers un cul de sac productif. C’était le principe de la vignette automobile fonction de la puissance fiscale (chevaux fiscaux), qui matraquait les véhicules et les moteurs de grosses cylindrées, ainsi que les motocyclettes, et qui a orientait toute la production automobile française vers des moteurs à quatre cylindres de 5 à 7 chevaux fiscaux, c’est-à-dire avec des cylindrées d’environ 1.200 centimètres cubes. Et 1.900 centimètres cubes en moteur diesel. 

 

Accessoirement, il ne doit pas non plus rester de producteurs français de motocyclettes de grosse cylindrée en France, victimes de la même politique fiscale stupide, sans jamais que la pertinence de ces politiques fiscales confiscations n’ait été interrogées, que ce soit celle de la vignette automobile d’autrefois ou bien celle du malus écologique d’aujourd’hui. 

 

Les constructeurs automobiles français ont ainsi totalement abandonnés les moteurs à six, huit ou douze cylindres, abandonnant complètement le créneau des véhicules de luxe et haut de gamme, laissant ce créneau aux constructeurs allemands, italiens ou suédois, à compter des années 1970-1980. Et l’absurdité de cette fiscalité de la vignette automobile était à peine abandonnée que les énarques, hauts fonctionnaires et écolo-politiques ont inventé cette nouvelle fiscalité punitive sur le malus écologique. Comme la feu vignette automobile, cette fiscalité est en train d’orienter tout le marché automobile français et la production automobile française, sur la base d’une sorte d’idéal écologique déconnecté de la réalité des campagnes françaises. Et en plus cela ne sert à rien : l’Etat français se fait malgré tout condamner pour inaction climatique par des juges administratifs partisans et pro-écologie-collapsologie.

 

La France coule ainsi son industrie automobile pour satisfaire des lobbies écologistes qui ne seront de toute façon jamais satisfaits avant que nous ayons rejoint l’âge de pierre avant l’invention du feu (parce que le feu, ce n’est pas bon non plus, cela émet du CO²). Et ces mêmes lobbies écologistes sont également derrière les politiques européennes de sortie des moteurs thermiques en 2035 ou avant, qui aura les mêmes conséquences sur les productions automobiles européennes et notamment sur les constructeurs allemands. Au final, ces politiques n’avantageront qu’un seul interlocuteur : les producteurs automobiles chinois tandis que l’Europe cessera de produire des véhicules automobiles comme elle a dû cesser de fabriquer de l’électro-ménager depuis les années 1980. La production a d’abord été délocaliser en Chine ou dans d’autres pays en développement, avant que ces industriels ne perdent le contrôle de leurs filiales chinoises et disparaissent corps et âmes dans les cimetières du capitalisme. Il en sera demain de même de Peugeot, Renault, Citroën ou Volkswagen. Mais n’est-ce pas l’objectif ultime de la Commission européenne et du gouvernement français ? Un gigantesque marché ouvert aux intérêts des industriels chinois ? Avec une inflation modérée pour que le peuple soit satisfait ?

 

https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/09/04/il-ne-faudra-que-quelques-annees-a-byd-pour-devenir-le-leader-mondial-de-l-industrie-automobile_6187756_3234.html

 

L’analyse du marché automobile français et européens me semble particulièrement pertinent sur l’état de dégradation de notre patrimoine automobile.

 

« Entre 2004 et 2022, la production automobile en France est tombée de 3,66 à 1,37 million d’unités. Aucune des voitures les plus populaires dans l’Hexagone n’y est fabriquée : la Peugeot 208 vient de Slovaquie comme la Citroën C3, le 2008 arrive d’Espagne de même que le Renault Captur, tazndis que la Renault Clio est turque. Rare sont les pays qui disposent de marques automobiles nationales et qui fabriquent aussi peu sur place. A tel point qu’avec 161.000 exemplaires, le modèle le plus produit en France en 2022 était la … Toyota Yaris Cross. »

 

Tiré de l’éditorial du dernier Hors série de L’automobile magazine (toutes les voitures du monde 2023-2024)

 

Les immatriculations en France se sont ainsi élevées à 1.529.185 exemplaires, en baisse de -7,8% par rapport à 2021. Peugeot est le leader en France avec 245.608 exemplaires immatriculés devant Renault (236.405 exemplaires) et Dacia (130.855 exemplaires). Citroën suit à la quatrième place avec 129.883 exemplaires. Le véhicule est le modèle le plus immatriculé avec 88.821 exemplaires, devant le Dacia Sandero (64.308 exemplaires) et la Renault Clio (64.033 exemplaires). Avec 17.005 exemplaires immatriculés, la Tesla modèle 3 est à la 23è place du classement.

 

A titre de comparaison, 

 

  • L’Allemagne a enregistré en 2022 un total de ventes de 2,65 millions de véhicules automobiles, avec trois Volkswagen aux trois premières places (La Golf avec 84.282 exemplaires, le Tiguan avec 59.136 exemplaires et le T-Roc avec 58.942 exemplaires). Il n’y a pas une seule automobile française dans les dix modèles le plus commercialisés en Allemagne. 

 

  • Au Japon, les ventes se sont élevées à 4,2 millions de véhicules automobiles, avec aux trois premières places, la Honda N-Box (202.197 exemplaires), la Nissan Note (110.113 exemplaires) et la Toyota Roomy (109.236 exemplaires).

 

  • Pas une seule française non plus dans les dix véhicules automobiles les plus commercialisés au Royaume Uni (1,614 millions d’exemplaires commercialisés), avec le Nissan Qashqai en première place (42.704 exemplaires), la Vauxhall Corsa (39.910 exemplaires) et la Tesla Model Y (35.553 exemplaires).

 

  • Les Etats-Unis ont enregistré 13,88 millions de véhicules automobiles immatriculés, avec 653.957 pickups Ford F-séries, 513.354 pickups Chevrolet Silverado et 468.344 RAM Pickup. Pas non plus l’ombre d’une française dans les dix véhicules les plus commercialisés mais on y décompte 230.027 Tesla model Y.

 

  • Enfin, la Chine a enregistré 26,84 millions de véhicules automobiles commercialisés, avec la BYD Song Plus en première position (459.424 exemplaires), devant la Nissan Sylphy (446.492 exemplaires) et la Wuling Mini EV (443.384 exemplaires). Volswagen place son modèle Lavida à la quatrième place (361.734 exemplaires) mais on ne compte là non plus aucun modèle d’un constructeur français dans les dix modèles les plus commercialisés

 

«On achète désormais presque deux fois plus de voitures en Chine qu’aux Etats-Unis. Le classement est de plus en plus occupépar des modèles chinois et le constructeur BYD fait une entrée spectaculaire : il était absent du top 10 en 2021, il y classe trois modèles en 2022, dont un en tête.»

 

Du fait des politiques fiscales confiscatoires mis en place en France et des normes européennes drastiques rajoutées les unes sur les autres, les véhicules les plus commercialisés notamment aux Etats-Unis ou au Japon ne sont mêmes pas proposés ou commercialisables en France ou en Europe. Je vous parle bien sûr des gros Pickups américains ou des grosses berlines ou SUV américains que les médias considèrent comme non adaptés à notre réseau routier ou à nos centre-villes. Ou de tous les véhicules dont les motorisations tomberaient sous les coups de notre taxation prohibitive sur le malus écologique. 

 

En plus, cette politique, au-delà d’orienter la production française vers des modèles minuscules, aux cylindrées fragiles et picrolinesques, qui lui ferme l’ensemble des autres marchés automobiles des pays avancés (on doit certainement réussir à vendre des Renaut et des Peugeot en Afrique, même si on doit s’y faire également tailler des croupières par la production chinoise dont les modèles doivent pouvoir être beaucoup moins chers et de bien meilleure qualité. Mais comme les réseaux de distribution doivent être contrôlés par des groupes commerciaux français, ils doivent accaparer ces marchés pour en faire des marchés captifs et s’y enrichir.

 

Cette politique fiscale confiscatoire n’est enfin même pas juste puisque les plus riches de nos concitoyens peuvent échapper eux très facilement à cette fiscalité confiscatoire en immatriculant leurs véhicules luxueux dans d’autres pays européens et en les faisant circuler avec des plaques étrangères en France, ce qui leur évitera de payer des malus assassins et totalement stupides.

 

En fait, les seuls à se faire matraquer par cette fiscalité injuste, ce sont les classes pauvres et moyennes de notre société, qui perdront bientôt leurs emplois le temps que le marché de l’électrique se développe, que BYD et les chinois prennent le contrôle du marché automobile européen. Et le parc automobile français continue de vieillir puisque les prix des véhicules automobiles continuent leur surenchères tarifaires et qu’acheter un véhicule automobile neuf devient de plus en plus difficile.

 

Bientôt, la France ressemblera à Madagascar avec de vieux véhicules hors d’âge que les français s’échineront à faire rouler. Et encore, à Madagascar, ils ont les vieilles Peugeot increvables du passé, pas les pauvres Peugeot d’aujourd’hui aux petits moteurs boostés à l’obsolescence programmée. Bientôt, comme en Allemagne, il n’y aura plus que les nostalgiques de la grande époque qui rouleront encore dans des Renault ou dans des Peugeot.

 

Il manque en France une réflexion sur la légitimité et la responsabilité des outils de politique fiscale dans les choix et les impasses industriels dans lesquels les hauts fonctionnaires et les politiques dogmatiques ou manipulés par des lobbies écologistes tout-puissants nous emmènent et nous entraînent. Je pense à la destruction d’EDF et de la filière de la production d’électricité hydraulique et nucleaire au bénéfice du marché, du démantèlement de la SNCF et du rail, et de la politique fiscale autour de la filière automobile et de l’essence. Le problème est à la fois l’idéologie de quelques hauts fonctionnaires obnubilés par leur petit dada écolo-marxiste, et la vision court-termiste de l’ensemble de l’administration française où l’on cherche juste à trouver de nouvelles ressources fiscales pour couvrir le déficit budgétaire. 

 

Saucratès



10/09/2023
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 49 autres membres