Critiques de notre temps

Critiques de notre temps

Ecole et violence scolaire (2)

Réflexion seize (11 avril 2010)
Les états généraux sur la sécurité à l'école ... quel sens leur donner ?

Les 7 et 8 avril 2010 se sont tenus à la Sorbonne les états généraux sur la sécurité et la violence à l'école ... Un peu partout en France également, des syndicats d'enseignants tenaient des assises ou des colloques sur le même sujet. Ce qui est particulièrement surprenant dans ces assemblées, c'est l'absence de remise en cause par les enseignants de leur propre capacité et de leur propre envie d'enseigner, d'éduquer la jeunesse. On y a parlé de la violence des enfants, des parents, de cette violence extérieure aussi qui s'invite dans les établissements ... on a parlé de l'échec scolaire et de la désespérance de ces enfants exclus prématurément de l'apprentissage et relégués dans des classes sans avenir, mais on n'y a pas abordé le cas de la violence des enseignants à l'encontre des élèves, de cette violence institutionnalisée dont les enseignants estiment pouvoir user sans aucun contrôle, sans aucune limite, et dont toute remise en cause est de manière extraordinaire vécue comme des actes de violence par et envers ces mêmes enseignants ...
http://les-etats-generaux-de-la-securite-a-l-ecole.education.gouv.fr/
http://www.liberation.fr/societe/0101629284-violence-scolaire-le-grand-ecart-de-chatel
http://www.20minutes.fr/article/395968/France-Etats-generaux-de-la-violence-scolaire-tendre-vers-la-tolerance-zero.php

Je ne suis pas ici bien sûr pour détailler les résultats de ces états généraux ou des discours des uns ou des autres, des paroles du ministre de l'éducation nationale Luc Chatel ou des nouvelles dispositions envisagées pour combattre la violence à l'école. Les articles de presse se suffisent à eux-mêmes. Ce qui est sûr par contre, c'est que l'enfermement sécuritaire ou pédagogique ne sera pas une solution suffisante. Il faudrait apprendre aux enseignants à gérer la violence ? Mais tant que ceux-ci ne comprendront pas que c'est leur propre violence que les enfants leur renvoie, et celles de tous les enseignants que ces derniers ont rencontré au cours de leur scolarité ; rien de tout ceci ne servira à rien. Tant que les enseignants ne se remettront pas en cause dans leurs comportements de tous les jours, il n'y aura pas de réponse acceptable possible.

Il existe tant de formes de violence institutionnelle auxquelles les enfants sont soumis dans les établissements scolaires. Ces violences peuvent d'abord prendre la forme des jugements à l'emporte-pièce sur les capacités intellectuelles des enfants ou sur leur travail. Il y a une impossibilité pour les enseignants à intégrer l'aspect traumatisant de certains discours violents sur le regard que peuvent se porter les enfants soumis à ce genre de violence. Et cette violence concerne évidemment beaucoup plus les enfants en difficulté d'apprentissage ou en voie de relégation scolaire ... mais elle concerne malgré tout aussi l'immense majorité des enfants (sauf parfois les plus brillants et les plus modèles d'entre eux) qui se trouvera confronté un jour à de tels jugements au cours de sa scolarité  ... Tout enfant un peu différent du modèle parfait sera concerné à un moment ou un autre ... et il vivra également, pour peu qu'il y soit sensible, l'injustice de ces jugements sans aménité sur les moins doués ou les moins conformes au modèle de ses camarades ... Une violence tellement habituelle qu'elle doit sembler banale aux enseignants s'ils me lisent. Mais une violence injuste ...

Cette violence doit être rapprochée également de la violence des notes qui a cours dans l'éducation française ... Ces notes qui sont décernées aux enfants comme jugement permanent sur leur travail scolaire. Il est terrible d'imaginer que l'éducation nationale est incapable d'imaginer une forme de pédagogie qui ne repose pas sur cette forme de jugement ... Comment sont censés faire les enfants qui se voient remettre en permanence des mauvaises notes par leurs enseignants ? Quels regards peuvent-ils avoir sur eux ? Quelle image peuvent-ils avoir d'eux-mêmes ? Que leur restent-ils comme solution autre que la violence également, dirigée sur leurs pairs ou sur ceux qui les violentent depuis le début de leur scolarité ? Evidemment, ce discours ne sera jamais tenu par le monde de l'enseignement, car ce serait une remise en cause complète du système pédagoqique français dans son ensemble ...

Le pire évidemment vient du fait que ce jugement s'accompagne d'une culpabilisation de l'enfant et non de son enseignant. Devant des notes insuffisantes, ce n'est pas la capacité de l'enseignant qui est mise en doute, mais uniquement et évidemment le travail de l'enfant, la manière dont il suit les leçons en classe, la manière dont il apprend ses leçons, voire ses capacités intellectuelles. C'est toujours l'insuffisance des pré-acquis qui est mis en cause, rejetée sur la faute des enfants qui ne sont pas au niveau souhaité par leur professeur et incapables de profiter de l'enseignement merveilleux que celui-ci pourrait leur apporter ... Triste monde à l'égo boursouflu que le monde des enseignants !

Autre forme de violence connue, les systèmes disciplinaires scolaires et l'ensemble des batteries de sanctions qui ont cours dans les établissements scolaires français (même sans compter les patrouilles récemment introduites ou les détecteurs de métaux) ... Cela va des notes de vie scolaire introduites il y a quelques décennies, qui ont conduit à la banalisation des observations, des retenues et autres sanctions données à tout bout de champ, pour un oui ou un non, une copie de note non signée, un murmure dans la salle de cours ou autre ... par des enseignants qui confondent autorité et légitimité ... Mais cela passe aussi par les permis à point mis en place dans certaines écoles pour lutter contre la violence ou les incivilités ... dans lesquels chaque enfant se voit attribuer un permis avec un certain nombre de points (12 point pour les moins imaginatifs) et où chaque 'erreur' de l'enfant lui coûte un certain nombre de points ... Et comme sur la route, avec ce genre de système, il peut suffir d'un jour à un enfant pour perdre tous ces points. 

Mais toutes ces mesures disciplinaires ont en fait un seul et unique point commun : leur absolue iniquité et leur complet arbitraire. Un système judiciaire a besoin d'être juste. Un système judiciaire a besoin que toutes les infractions soient punies de la même manière, de la même façon, en fonction simplement des circonstances de chaque infraction. Des systèmes unifiés d'appel et de cassation existent justement pour cette raison ; pour que la justice existe. Il n'existe rien de tel dans le système disciplinaire scolaire. Les enseignants y ont tous les pouvoirs, notent, évaluent et punissent comme bon leur semble, sans que n'existe aucun dispositif d'appel ni de contestation possible. Eux seuls peuvent punir ou ne pas punir, en fonction uniquement de leur bon vouloir, de l'opinion toute arrêtée qu'ils ont de l'enfant en cause. Garre aux enfants un peu différents, qui ne rentrent pas dans les moules ... Et dans ce système disciplinaire, les enfants ainsi que leurs parents y sont considérés comme des sujets de non-droits, comme des sujets d'expérience, comme des sujets ...

J'ai à peu près fait le tour des diverses formes de violence institutionnalisée qui n'ont pas été abordées dans le cadre de ces états généraux sur la violence, de tout ce qui n'a pas été dit sur le revers de l'école telle qu'elle existe dans notre société française, telle qu'elle est vécue par tant d'enfants confrontés à l'injustice et l'arbitraire ...

 

 

Réflexion quinze (25 février 2010)
Coup de gueule contre l'escalade des systèmes disciplinaires scolaires !

Quel parent d'un jeune écolier, d'un jeune collégien, d'un jeune lycéen ne s'est pas senti démuni face aux punitions diverses et variées données à leur enfant par une école, un collège ou un lycée, sensé pourtant enseigner à son enfant et lui offrir des apprentissages pédagogiques.

Quelle école n'applique pas désormais en France un beau petit système disciplinaire où chaque enfant se voit menacer de punitions graduées et surtout joliment automatiques. Certaines écoles inventent même des permis à point pour les enfants, où chaque faute est punie d'un retrait d'un certain nombre de points. Comme dans la vraie vie des adultes, comme sur la route, à croire que ce système de permis de conduire à points leur paraît une bonne mesure, à ces équipes pédagogiques. On verra vraisemblablement demain dans les écoles ou dans les cours de récréation des radars automatiques pour retirer des point aux enfants, pour verbaliser les interdictions de courir ou autres inventions du monde de l'enseignement. Ou bien des radars tronçons pour s'assurer que l'enfant a été sage tout le long de la récréation ou de la pause méridienne. 

Quel collège ou lycée ne dispose pas de son système de note de vie scolaire (belle invention des ministères) et d'un système disciplinaire d'observations, de retenues, de colles et d'exclusions pour aller avec ? On se demande parfois si, comme les policiers, les enseignants de nos enfants ne sont pas appréciés sur leurs chiffres en matière d'observations ou de retenues données aux gamins (au moins les policiers contestent cette politique du chiffre ce qui n'est même pas le cas des enseignants) ... Observations et retenues pleuvent ainsi sur les têtes de nos gamins, pour un bavardage en classe, pour une interrogation non signée par les parents (même pour un 20/20), sans qu'il soit possible pour l'enfant ou pour ses parents de comprendre l'objectif pédagogique ou la légitimité de la sanction.

Seul enseignement que les enfants et les parents peuvent tirer de ces histoires, de cette confrontation à ces systèmes disciplinaires : la compréhension et l'acceptation d'un régime totalitaire dans lequel l'enseignant est le seul juge et arbitre, et où il a tout pouvoir. La compréhension aussi que toute contestation de la sanction sera vécue par l'enseignant comme une agression et le conduira à brimer et à sanctionner encore durement plus l'enfant.

L'école n'est ainsi bien souvent qu'un vaste lieu d'arbitraire dans lequel nous abandonnons nos enfants sans protection, face à des malades névrosés. Pour un professeur intéressé par son métier, par l'enseignement à des enfants et par la pédagogie ; combien y a-t-il de personnes qui n'ont rien à faire dans le monde de l'enseignement ? En de nombreuses années d'expérience de parents d'élève, j'ai connu deux bons enseignants (qui avaient à coeur leur métier), une poignée d'enseignants potables, non toxiques pour les enfants (le minimum que l'on peut leur demander), et un grand nombre d'enseignants toxiques et malades ... Je comprends qu'ils aient la trouille d'être noté par leurs élèves et que la réalité de leur incompétence, de leur médiocrité, ne soit étalée sur internet, accessible par tous !

Intéressant d'observer le comportement de ces enseignants se réfugiant derrière l'obéissance aveugle au règlement et distribuant dans un but sécuritaire, dans le but de maintenir leur autorité, de punir untel ou untel. Et comment ne pas faire le parallèle entre ces excellents collaborateurs du système de l'enseignement public (ou privé), zélés distributeurs d'observations et de retenues, et les zélés collabos de la seconde guerre mondiale en France, membres ou informateurs de la milice ou de la gestapo, qui dénoncaient également vaillamment tous ceux qui ne respectaient pas les règlements ou qui pouvaient être juifs ou résistants ... ou plus prosaïquement, dont ils voulaient se venger ou qu'ils enviaient ...

Voilà ce que sont devenus les hussards noirs de la troisième république, ces enseignants laïcs qui se pensaient investis d'une mission sacrée visant à éduquer les jeunes français et les campagnes françaises ... Ils sont devenus un troupeau de maniaco-parano-dépressifs, terreau ou ferment d'une prochaine milice totalitaire, qui ne sentent respectés que lorsqu'ils sanctionnent des enfants ... Les collabos d'un futur envahisseur ou d'un futur tyran. Les concierges délateurs d'un système totalitaire et fasciste. Et ils croient en plus se reconnaître dans des idées socialistes !!!


Réflexion quatorze (29 novembre 2009)
Le débat sur la notation des profs ...

Pour quelle raison l'idée que des enfants puissent noter leurs professeurs soulève-t-elle un tel effroi chez les enseignants français ? Cette question m'interpelle en ce qu'elle démontre une incompréhension entre les enseignants, leurs élèves et les parents d'élève. Le système français est invraisemblable en ce qu'il maintient le monde de l'éducation nationale dans une zone de non-droit ou plutôt d'absence totale de droit de nos enfants.

Les mêmes enseignants qui notent et jugent à longueur de temps leurs élèves, qui pour nombre d'entre eux, 'cassent' les enfants qui leur sont confiés, qui ne sont capables le plus souvent que de les écraser et de recenser leurs seuls échecs, leurs seules fautes, et pour nombre d'entre eux, sont incapables de mettre en avant leurs réussites, leurs apprentissages réussis, leurs points positifs, qui ne connaissent absolument pas, pour une part d'entre eux, ni les mots d'encouragement, ni le respect dus à des pousses d'adulte en devenir ... ces mêmes enseignants s'effraient que ces enfants sur lesquels parfois ils se sont acharnés la journée durant, puissent eux-aussi, également, les juger et les noter de la même manière !

C'est en tout cas ce qui ressort des actions des personnels enseignant devant certains sites internet qui se lancent sur le sujet des notations des écoles et des professeurs ...
http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/11/28/qui-est-assez-competant-pour-noter-son-professeur_1273457_3224.html

Il y avait d'abord eu le site www.note2be.com en début d'année 2008 et la levée de boucliers qui en avait résultée, avec une série d'actions en justice pour faire interdire ce site (pour crime de lèse-majestée) et empêcher de citer nommément les professeurs. Même la CNIL (Commission nationale informatique et libertés) s'en était mêlé en injonctant le site à cesser son activité. Maintenant, il faut également compter avec le site www.notetonprof.com tenu depuis les Etats-Unis afin d'empêcher l'action de la justice française.

Evidemment, certains pourraient estimer que ma position est de parti pris contre le monde de l'enseignement. Il n'en est rien. Mais comme dans toute profession, il s'y trouve des personnes qui n'ont rien à y faire, qui ne devraient, ni de loin, ni de près, participer à l'éducation des enfants. Ce n'est évidemment pas la majorité, et pourtant mes années d'adolescence sont remplis de leur souvenir et des raclées que ma mère me donnait après chaque rencontre parents-professeurs ... Comme si les enseignants ignoraient que la majeure partie des enfants qu'ils enfoncent devant leurs parents ne se ramassent pas des tournées dès qu'ils sont de retour chez eux ... Et aujourd'hui, dans mon rôle d'adulte et de parent d'élève, je me retrouve encore et toujours, le plus souvent, face au même profil d'enseignants, qui ne sont capables que de mentionner les points négatifs de mon fils, et si rarement, dans de très rares cas d'enseignants, ses points positifs et ses points négatifs ... Cette dernière situation est tellement agréable ; un enseignant qui apprécie un enfant dans ses forces et ses faiblesses, ses bons et ses mauvais côtés ... mais tellement rare !

Aussi dans un tel monde d'injustice que le monde de l'éducation nationale, dans un tel monde de non-droit, d'absence de droits des enfants face à des enseignants bardés de leurs certitudes et de leur toute-puissance, je ne peux qu'adhérer au droit des enfants de pouvoir noter et apprécier leurs enseignants et leurs collèges, écoles ou lycées ... et qu'ils puissent exprimer, de façon anonyme puisque le contraire les mettrait en danger, qu'untel est un connard débile et incompétent, qui n'a pas sa place dans l'éducation nationale ... Aussi, enfants de tous pays, allez sur www.notetonprof.com !


Réflexion treize (8 octobre 2009)
Le concept de 'school bullying' ...

Le concept de 'school bullying' fut inventé par Dan Olweus, professeur de psychologie à l'université de Bergen (Norvège), qui mena des recherches sur une grande population de jeunes à partir des années 1970. Ses premiers travaux portaient sur l'agressivité humaine. Un de ses ouvrages a été traduit en français en 1999 sous le titre «Violences entre élèves, harcèlements et brutalités, les faits, les solutions» (ESF éditeur, traduction de Marie-Hélène Hamen). 

Qu'entend-on par 'School Bullying' ? Le 'school bullying' est une forme de violence à long terme, physique (coups, bousculades…) ou psychologique (insultes, surnoms, moqueries, rumeurs, isolement de la victime du reste de ses camarades, menaces, homophobie, racisme…), perpétrée en milieu scolaire (le plus souvent dans les parties communes (couloirs, escaliers, cour de récréation) et les lieux non supervisés par les adultes) par un ou plusieurs agresseurs à l’encontre d’une victime. C’est un harcèlement, basé sur l’intimidation entre élèves, qui implique des brimades et des brutalités se prolongeant dans le temps.

Abus de pouvoir agressif et systématique, perpétré par plusieurs agresseurs (bully) à l’encontre d’une victime (bullied) dans l’incapacité de se défendre dans ce contexte précis. Ce harcèlement est un mélange de menaces, de moqueries et d’insultes verbales justifiées par des critères discriminatoires, le plus souvent d’origine physique ou sociale, qui y associent parfois tout le registre sexuel. Ces menaces peuvent être accompagnées de gestes où l’agresseur montre un couteau à sa victime, la bouscule ou vandalise ses biens. Dans tous les cas, l’agresseur poursuit sa victime, choisie en fonction d’une différence physique mineure, et lui inflige une relation de type dominant-dominé fondée sur la tyrannie et l’humiliation consciente. Le racket, comme le harcèlement sexuel au collège, au lycée ou à l’université en font partie.

Dès le début des années 80 en Scandinavie, le 'school bullying' a été abordé dans de nombreux articles. Dans les années 90, le 'school bullying' fera l'objet d'une forte émotion et d'une importante mobilisation et médiatisation en Grande Bretagne (rapport Elton), qui conduira à l'adoption de directives vers les établissements scolaires dès 1993. En 1994, au Japon, il a fait l’objet d’une enquête qui faisait apparaitre environ 200 cas par jour et le rendait responsable d’avoir conduit au suicide sept enfants. Son ampleur internationale a été révélée par le «Sheffield project» et par les publications de l’Association «Young Voice», fondée en 2000. Enfin, le tournage en observation réelle pendant 52 heures dans la cour d’une école de Toronto a permis de montrer, en le prouvant, que le 'school bullying' faisait 10% de victimes régulières et touchait autant les garçons que les filles.

Selon le «Sheffield project» (Smith et Sharp), en 1991-1992, 27% des élèves interrogés en primaire et 10% en secondaire déclarent avoir été victimes de bullying durant l’année scolaire, au moins une fois par semaine pour la plupart.

L'enquête de l'association «Young Voice» menée en 2001 faisait apparaître que :
- 13% des garçons et 12% des filles déclaraient avoir été gravement victimisés
- 47% des garçons et 42% des filles déclarent l’avoir été moins gravement
- 35% des garçons et 26% des filles déclarent avoir été agresseurs

Selon l'enquête menée par Dan Olweus, environ 15% des élèves des écoles primaires et collège de Norvège sont concernés par des faits de harcèlement, c'est à dire un élève sur sept.  9% peuvent être considérés comme des victimes régulières et 7% comme des agresseurs.

Les victimes du 'school bullying' sont souvent des enfants sensibles, plus réservés que les autres, et qui présentent une plus grande vulnérabilité. Mais les victimes peuvent aussi parfois être des enfants agressifs dont le comportement a entrainé des représailles de la part des autres. Dans la majorité des cas les victimes n’ont pas une personnalité type. La discrimination et les préjugés dont elles sont l’objet sont basés sur des stigmates émissaires totalement arbitraires.

Facteurs de bullied : anxiété, faible estime de soi, idées de suicide fréquentes (61%), absence d’amis (personne pour les défendre), 42% des victimes auraient été victimes de violences de la part d’un adulte, des caractéristiques physiques particulières les différenciant des autres (lunettes, obésité, handicaps…), mais également les élèves qui travaillent trop bien dans des établissements où règne un climat d’opposition à l’école.

Pour les victimes, les conséquences traumatiques sont souvent graves. Elles durent longtemps et, en fonction de leur état psychologique, elles seront amplifiées par la fréquence et la durée des épreuves de harcèlement. Le sentiment d’exclusion auquel les brimades les auront conduites leur donnera une image négative de l’école. Leurs résultats scolaires baisseront et elles finiront par décrocher. Les victimes sont stressées, anxieuses. Elles ont des troubles du sommeil et finissent par avoir une baisse considérable de l’estime de soi. Le sentiment d’isolement dans lequel les plongent les vexations répétées finissent par les mener à la dépression et au désespoir. Elles présentent un risque accru de suicide et d’Etat de Stress Post Traumatique (ESPT) semblable aux névroses de guerre. Parfois elles se retournent et deviennent, par réaction, elles-mêmes des agresseurs. Leur avenir est sombre. Les répercussions à long terme sont une intégration difficile dans la vie d’adulte avec le risque de tomber dans la délinquance.

Les auteurs de 'school bullying', dont les plus jeunes peuvent avoir 2 ou 3 ans, sont souvent dans les mêmes classes que leurs victimes (30% sont plus âgés, 10% sont plus jeunes). Comme les victimes, les auteurs de "school bullying" peuvent être des filles ou des garçons. Les garçons usent plus de menaces physiques tandis que les filles fondent leur tyrannie sur des insultes, des cancans et des rumeurs qui visent à isoler leurs victimes. Le comportement des agresseurs est appris et non prédéterminé. Comme leurs victimes, les auteurs sont souvent issus de milieux qui présentent des difficultés sociales et des problèmes dans les relations familiales. Le pronostic de leur vie les prédisposent à avoir des relations sociales et familiales souvent violentes et difficiles.

L’omerta de l’Education nationale. Pourtant, alors que les adultes chargés de surveiller les espaces scolaires (cours, escaliers, couloirs…) ne voient pas, ou feignent de ne pas voir, les violences qui se déroulent sous leurs yeux, 70% à 80% des élèves reconnaissent en être les témoins. L’intervention simple d’un adulte suffit pourtant, dans la plupart des cas, à faire cesser les harcèlements dont sont victimes de nombreux enfants ou adolescents. Mais, par crainte des représailles les témoins se taisent, par peur de ne pas être pris au sérieux les victimes se taisent et par fatalisme, ou par souci de préserver la bonne image de leur établissement, les proviseurs et les enseignants se taisent. Cette loi du silence s’oppose pourtant à tous les résultats qu’ont montré dans leurs enquêtes et leurs études les pays qui se sont penchés sur ce phénomène, que ce soit en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis ou au Japon. En France il n’existe malheureusement pas de recueil de données sur cette question. La prévention se limite à un affichage indigent, souvent peu visible, et il n’existe aucun programme sur les conduites à tenir en milieu scolaire pour combattre ce phénomène.

L’école : un espace enfermé. L’école est un milieu clos qui dispose de ses propres règlements internes, parfois très contraignants. C’est à l’école que les enfants passent l’essentiel de leurs journées. Ils y apprennent et ils y échangent. L’école est aussi un lieu d’observation. Les enfants s’y observent et sont observés dans leurs comportements. L’école est un espace "enfermé" dans lequel l’enfant vit une autre vie, au milieu des regards croisés d’un grand nombre de professionnels de l’Education nationale.

La situation d’aujourd’hui révèle une incohérence entre le discours de nos gouvernants, soucieux de réintroduire dans les salles de classe une discipline surannée, et le mutisme de l’Education nationale. L’apprentissage de la Marseillaise, le respect enfin réhabilité envers l’instituteur et le professeur s’opposent au désordre invisible qui subsiste dans les espaces vacants des écoles, des collèges et des lycées (cours, escaliers, couloirs…). Le "school bullying", le "jeu du foulard" ou celui de la "tomate", le "happy slapping", la "mort subite", le "binge drinking" et la "compresse" font autant de victimes, consentantes ou désignées, qui hypothèquent dangereusement leur avenir. Un grand nombre d’entre elles se retrouveront sur la voie de la délinquance, incapables de s’insérer sereinement dans la société.

http://www.liberte-psychiatrie.fr/spip.php?article71
http://www.harcelement-entre-eleves.com/danolweus.htm
http://www.scienceshumaines.com/qu-est-ce-que-le-bullying-a-l-ecole-_fr_21811.html


Réflexion douze (6 octobre 2009)
La violence à l'école vue par les enseignants et les enfants (ter) ...

Pour conclure sur le livre de Cécile Carra : «Violences à l'école élémentaire - L'expérience des élèves et des enseignants» (PUF - septembre 2009), celui-ci aborde également le problème de la violence tel que vécue par les enfants, reposant notamment sur un questionnaire réalisé au sein d'un certain nombre d'établissements scolaires, sur la violence ressentie mais également auto-déclarée.

« Notre hypothèse est que la violence participe d'une socialisation enfantine partiellement autonome. Cela suppose que nous ne considérons pas a priori la violence, telle qu'elle est définie par les écoliers, comme anormalité, exceptionnalité ou experssion pathologique, mais comme une modalité d'interaction sociale, pesant sur la structuration des rapports entre pairs. (...) Cette vision de l'enfance qui se révèle à nous , à travers l'étude du phénomène de violence, est loin d'apparaître comme un âge d'or mais comme un âge où les rapports de force visibles semblent faire loi. (...) Les pairs permettent l'apprentissage d'un rapport à autrui, à soi-même et au groupe, rapport qui sera de plus en plus sous-tendu par des principes de respect et de justice. » (pages 46-47)

L'auteure insiste beaucoup sur le fait qu'il n'y aurait pas d'un côté des victimes et de l'autre des auteurs de violence. Clairement, je ne suis pas absolument d'accord avec son analyse. Elle étudie notamment dans son échantillon des écoles considérées comme violentes dans des zones d'éducation prioritaire, en mettant notamment en avant les réussites d'une méthode d'éducation dite Freinet. Elle démontre (et démonte) toutefois parfaitement les processus de violence et de construction des rapports entre pairs. Mais il est clair, selon moi, qu'il doit arriver que des enfants ne comprennent pas, n'aient pas, les clefs de compréhension du comportement social qui est attendu d'eux de la part de leurs pairs (ou de leurs bourreaux dans un tel cas). Ecole en zone d'éducation prioritaire ou non, hier comme aujourd'hui, la violence demeure un mode d'interaction qui n'est pas compréhensible par tous les enfants, et contre laquelle les équipes pédagogiques, d'hier et comme d'aujourd'hui, sont incapables et n'ont pas envie de les protéger. Les bagarres de cour de récréation sont ainsi vécues par les enseignants comme des interrelations normales, comme des jeux anodins, comme une activité habituelle, sans que soit appréhendé le caractère d'épreuve que cela revêt pour les enfants. Il n'est pas rare que ces bagarres de cour soient minimisées par les enseignants («rien de méchant»). A l'inverse, les violences verbales ne sont jamais minimisées par les enseignants !!!

« Nous dirons qu'un enfant ou une jeune personne est victime de school-bullying lorsqu'un autre enfant ou jeune ou groupe de jeunes se moquent de lui ou l'insultent. Il s'agit aussi de bullying lorsqu'un enfant est menacé, battu,  bousculé, enfermé dans une pièce, lorsqu'il reçoit des messages injurieux ou méchants. Ces situations peuvent durer et il est difficile pour l'enfant ou la jeune personne en question de se défendre. (Smith, Sharp, 1994). » (page 48)

Combien de victimes de school-bullying dans les écoles, les collèges et lycées français ? Ce point a-t-il fait l'objet d'études, de recensements, d'enquêtes de la part du ministère de l'éducation ? Face à une éducation nationale et à un monde de l'enseignement (et ce livre intéressant ne participe-t-il pas à la même entreprise), qui repousse majoritairement la faute de telle situation sur l'incapacité de ces enfants à répondre de manière idoine aux sollicitations de leurs pairs (ou bourreaux).

Ce qui n'est pas dit dans ce livre, c'est l'incapacité des enfants le plus souvent à accepter les différences, qu'elles soient physiques ou comportementales ... Les enfants considèrent ainsi les différences comme sujets de moquerie ou d'agression ... 

Ce livre donne par contre des explications sociales à cette violence ; le monde ouvrier, manuel, accorderait plus de valeurs à la force et à l'engagement physique que les autres classes sociales, se reposant sur une lecture de Bourdieu. « (...) il faudrait se demander si la valorisation populaire de la force physique comme dimension fondamentale de la virilité et de tout ce qui la produit et la soutient n'entretient pas une relation intelligible avec le fait que la classe paysanne et la classe ouvrière ont en commun de dépendre d'une force de travail que les lois de la reproduction culturelle et du marché du travail réduisent plus que pour aucune autre classe, à la force musculaire ; sans oublier le fait qu'une classe qui, comme la classe ouvrière, n'est riche que par sa force de travail ne peut rien opposer aux autres classes, en dehors du retrait de cette force, que sa force de combat qui dépend de la force et du courage physique. (Bourdieu, 1979). Si l'accroissement de l'automatisation des tâches et la diminution des emplois de l'industrie et de l'agriculture pourraient laisser penser à une disparition ou un affaiblissement de cette dimension physique, virile, ces moteurs ont été remplacés par le développement des métiers de la sécurité, accessibles aux résidents des banlieues, où le lien entre rapport de classe et nécessité de la force physique dans l'exercice du métier s'actualise avec encore plus d'évidence. » (page 76).


Réflexion onze (4 octobre 2009)
La violence à l'école vue par les enseignants et les enfants (suite) ...

Deux jugements récents sur les relations et les violences entre parents et enseignants me semblent instructifs. Le premier jugement s'est déroulé devant le tribunal correctionnel de Villefranche. Il concernait le parent d'un élève inscrit en maternelle sur la commune de Gleizé, qui aurait insulté la maîtresse de son enfant, une jeune enseignante, pour une punition donnée à son fils (l'enfant avait été privé du gâteau d'anniversaire d'un camarade tandis qu'il était conduit dans le bureau de la directrice après avoir dessiné sur des sièges de l'école), puis pour une blessure sous l'œil contractée par son petit garçon à cause d'un jet de pierre. Arguant du fait que « l'école doit être un lieu protégé de la violence », le représentant du ministère public a condamné les actes du prévenu en sollicitant une peine de 30 jours-amende à 6 euros (180 euros). Le parent d'élève, au casier judiciaire bien rempli (trois procès en moins d'un an pour violence envers sa compagne et conduite en état d'ébriété), a été condamné à 50 jours-amendes de 6 euros (300 euros) et à 600 euros d'indemnisation du préjudice de l'ancienne institutrice de son fils.
http://www.leprogres.fr/fr/region/le-rhone/villefranche/article/2006320,186/Tribunal-l-institutrice-insultee-le-parent-d-eleve-condamne.html

Le tribunal correctionnel de Créteil a condamné vendredi un parent d'élève à 8 mois de prison avec sursis et à une amende de 750 euros avec sursis pour avoir agressé un instituteur dans la cour de récréation de l'école Eugénie-Cotton de Bonneuil-sur-Marne (Val-de-Marne). Les faits s'étaient produit le 26 mars 2009, dans un établissement classé en zone d'éducation prioritaire. Le père d'un élève de CE1 avait agressé un instituteur de CP âgé de 28 ans, après l'avoir interpellé "assez vulgairement" (dixit l'enseignant) à travers la clôture. Son enfant, agressé quelques jours auparavant par des élèves plus âgés, avait eu l'impression que son enseignante n'avait pas pris en compte sa demande d'explication. Et ce jour-là, voyant son enfant en pleurs à la suite d'une punition, le parent s'était énervé. Le ministère public, parlant de faits d'une extrême gravité survenus dans l'enceinte de l'école, « le lieu où on fabrique nos enfants, un sanctuaire et (qui) doit le rester », avait requis une sanction exemplaire de 12 mois de prison avec sursis et une amende de 1.200 euros.
http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5j_goaFVoFLg_LeDScZhVkSfVSL5Q

Ces jugements me posent problème car ils contribuent à dissocier les faits de violence subis par les enfants dans les écoles, considérés comme normaux, comme un processus de socialisation des enfants, comme des interrelations normales, et ceux vécus par les enseignants, qui sont immédiatement grossis et médiatisés. Si l'école doit vraiment être le lieu sanctuarisé où sont fabriqués nos enfants, alors il faut que la violence autorisée et considérée comme normale par ces mêmes enseignants, dans le cadre de la cour de récréation, soit également combattue avec la même énergie.

La lecture du livre de Cécile Carra : «Violences à l'école élémentaire - L'expérience des élèves et des enseignants» (PUF - septembre 2009), situe d'une certaine façon le sujet du débat. Au delà des faits de violence physique et verbale, la première erreur de ces parents n'aient pas simplement d'avoir agressé ces enseignants. C'est d'avoir osé être en désaccord avec les décisions des enseignants, avec les punitions que ces enseignants ont donné à leurs enfants. Leur premier crime, c'est de n'avoir pas cautionné les décisions des enseignants, ce qui est considéré par une certaine fraction des enseignants comme une remise en cause de leur autorité. Les faits de violence qui ont suivi ne sont que la cerise sur le gateau pour ces enseignants qui ne devraient pas enseigner. L'épisode qui permet à ces enseignants de porter plainte contre ces parents d'élève qui ont osé contester leurs décisions et leur autorité.

Pour ces différentes raisons, je considère que ces jugements sont partiaux. Ils correspondent à une mise sur un piédestal des enseignants, comme s'ils étaient supérieurs au reste de la population. Ce n'est pas par le biais de la justice que les enseignants retrouveront l'ancienne légitimité de leur fonction. Comme en toute chose, c'est la compétence de ces personnes, leur qualité humaine et relationnelle, qui leur assurera cette reconnaissance, et aucun jugement ni aucun procès. Le problème des punitions, c'est l'injustice ressentie par les enfants qui les subissent ... C'est les faits d'injustice vécus ou vus ... Et tant que des enseignants débordés continueront d'agir de manière injuste et sans aucune légitimité aux yeux des enfants et de leurs parents, le problème des enseignants continuera d'être observé.


Réflexion dix (21 septembre 2009)
La violence à l'école vue par les enseignants et les enfants ...

Lecture recommandée d'un livre récent et extrêmement intéressant de Cécile Carra : «Violences à l'école élémentaire - L'expérience des élèves et des enseignants» (PUF - septembre 2009). Reposant sur des enquêtes sociologiques auprès d'élèves et d'enseignants dans un certain nombre d'écoles françaises, ce livre permet de décrire de manière frappante le regard porté sur la violence de ces acteurs de l'école.
http://www.puf.com/wiki/Autres_Collections:Violences_à_l'école_élémentaire#Caractéristiques
http://www.cesdip.fr/spip.php?article432
http://www.snuipp.fr/spip.php?article6434

1) Le regard des enseignants sur la violence à l'école

Cette partie du livre doit être lue pour mieux comprendre le malaise des enseignants dans le monde de l'école et de l'enseignement, notamment au sujet des formes de violence dont une partie d'entre eux s'estiment victimes. Une partie des enseignants appellent, vivent et estiment que les échanges verbaux qu'ils ont avec les parents d'élèves qui contestent simplement les décisions prises à l'encontre de leurs enfants sont des situations de violence ! Près du tiers des enseignants consultés lors des enquêtes ayant été réalisées dans le cadre de ce livre estiment avoir rencontré des situations violentes depuis le début de l'année scolaire dans le cadre de l'exercice de leur fonction, majoritairement avec des parents d'élèves.

Mais contrairement à ce que l'on pourrait mettre derrière cette notion de violence, il ne s'agit pas dans le cas présent de violence physique, de menaces ou d'insultes ; il s'agit essentiellement de faits mineurs : «conflit avec un parent d'élève soutenant l'enfant» (ce que je fais toujours ... qui défendra mon enfant si ce n'est pas moi ?), «altercations verbales avec des parents qui n'étaient pas d'accord et nous en ont fait part, en direct ou au téléphone», «parents contestant une punitionl'affirmative à la question», «plainte d'un parent», «j'ai donné une observation à un enfant, la maman l'a très mal pris, elle n'était pas d'accord !».

Trois types de parents d'élève sont construits par les enseignants « sur le croisement du degré d'implication identifiable à travers la présence des parents à l'école et les réponses positives aux sollicitations de l'enseignant ».

« Le bon parent (premier type) est donc non seulement celui qui ne dispute pas le monopole du pouvoir pédagogique à l'enseignant, mais de surcroît, celui qui participe, par son action, à sa légitimisation («ceux qui vont dans le même sens que nous»). L'absence des uns, marquant pour les enseignants leur démission (deuxième type), et l'interrogation des autres (troisième type) sur les décisions prises pour leur enfant, lue comme un soutien inconditionnel à leur progéniture, constituent selon ces schèmes dominants de lecture, des symptômes de défaillance éducative. »

L'auteur soulève notamment les tensions entre formes divergentes de regard sur l'enseignement et sur l'éducation ... « une autre ligne de tension apparaît avec la tentative d'imposition de la forme scolaire de socialisation dans sa dimension disciplinaire dans les milieux sociaux valorisant l'expression et l'épanouissement de l'enfant plus que sa soumission à l'autorité. » (milieu des Bobos notamment) ... Et évidemment, je me retrouve à peu près dans cette vision de l'éducation, avec une attention plus particulièrement marquée pour une absence de sentiments d'injustice ressentis par mes enfants ... Ce qui ne m'empêche pas par ailleurs néanmoins d'avoir des attentes en matière d'obéissance de mon enfant, dans un certain nombre de situations (respect dû aux adultes, respect de règles à la maison ou à l'extérieur ...).

Tous les enseignants en école élémentaire ne vivent évidemment pas les relations avec les parents d'élève de cette manière. Cette vision est essentiellement le propre d'enseignants du primaire jouant le jeu de la victimisation. Par contre, les mêmes enseignants, lorsqu'ils doivent répondre à la question de savoir s'ils ont été violents avec leurs élèves depuis le début de l'année scolaire, ne comptabilisent pas les violences verbales, les remontrances au sein de leurs propres actes de violence ... ce que je trouve personnellement aberrant. La proportion d'enseignants estimant avoir été auteurs de violences s'élève ainsi à 13% de l'échantillon. Les violences reportées concernent essentiellement l'usage de la force physique envers les élèves, mais absolument pas les autres formes de violence décrites par ailleurs : exercice de la violence symbolique, humiliation des élèves, pratiques discriminatoires et ethnisation des rapports scolaires, jugements scolaires, infantilisation des parents. Aberrant que des enseignants ne regardent pas de la même manière les actes qu'ils ont pu ressentir comme violents (violence verbale et désaccords avec les parents d'élève) et les actes commis par eux-mêmes (violence verbale et symbolique à l'encontre de leurs élèves).

En conclusion, selon l'auteur,  « l'étude des enjeux met en effet à jour que la violence est d'abord conflit de légitimité, et que, comme telle ... elle est approuvée ou dénoncée, licite ou illicite en fonction de normes sociales qui ne sont pas toujours clairement définies et, plus spécifiquement ici, dans une tentative de redéfinition de normes statutaires et professionnelles. »


Réflexion neuf (1er septembre 2009)
Ecole, violence, massification et enseignement ...

Quels sont les résultats de l'enseignement scolaire à la française ? L'école, le collège, le lycée et l'université française favorise-t-elle l'éducation de la jeunesse française des deux sexes, ou doit-on diagnostiquer son échec pour toute une frange de la population française ? C'est l'opinion d'un certain nombre de critiques du milieu de l'enseignement français.

Et pourtant, il y a un peu moins de trente ans, au début des années 1980, l'école s'était vue assigner l'objectif d'amener 80% d'une classe d'âge au niveau du baccalauréat, ce qui visait à relever le niveau d'éducation des jeunes français. Trente ans plus tard, il est à craindre que le diplôme du baccalauréat ait perdu une grande part de sa valeur dans cette opération, et que le niveau d'éducation des jeunes français n'ait guère progressé sur la période malgré l'atteinte de cet objectif.

La massification de l'enseignement secondaire français s'est plutôt accompagné pour certains de ces contempteurs par une dévalorisation du diplôme du baccalauréat, puis des diplômes universitaires. La sélection se réalise désormais dans les premiers cycles universitaires ou au seuil des grandes écoles prestigieuses, dans ces classes préparatoires tellement décriées et élitistes. Certains émettent des vélléités de poursuivre maintenant dans l'université le mouvement de massification de l'éducation, en imposant la réussite au niveau licence d'un certain pourcentage d'une classe d'âge ...

Mais il est à craindre que la sélection se fera nécessairement plus tard, en dévalorisant alors le niveau d'enseignement obtenu majoritairement par cette classe d'âge, et en opérant une sélection ultérieure pour des niveaux supérieurs d'étude. Il faudra alors étudier de plus en plus tard pour obtenir un diplôme reconnu et valorisé, ce qui ne sera possible que pour une minorité issue des classes riches de la société. Les étudiants brillants des classes moyennes et pauvres ne pourront alors atteindre que très difficilement ces niveaux de diplômes, sept ou huit ans après le baccalauréat, qui impliqueront une aide financière importante de leur famille.

Cette analyse pose le problème de la sélection des meilleurs dans l'enseignement français ; le fait par exemple que dans toute classe, même dans les classes préparatoires, le monde de l'enseignement soit habitué à découper les élèves en trois groupes : un tiers de bons élèves, un tiers de moyens, un tiers de mauvais élèves. Le fait de devoir amener 80% d'une classe d'âge au baccalauréat n'a pas rompu avec cette habitude française. Pour quelle raison un diplôme obtenu par 80% d'une classe d'âge (ou par plus d'un tiers d'une classe d'âge) devrait-il forcément être dévalorisé voire sans valeur ? Pour quelle raison seule une sélection drastique peut-elle donner une valeur à un diplôme ?

Et l'on rejoint ici le diagnostic sur la violence institutionnelle de l'école, cette incapacité de l'école à reconnaître une valeur positive, des résultats positifs, dans les enfants qui lui sont confiés ... Cette propension du monde de l'enseignement à émettre des jugements négatifs sur la majeure partie des enfants qu'elles tentent de briser, cette propension à se focaliser sur les fautes, les erreurs, les insuffisances des enfants au lieu de souligner au contraire les réussites de ces mêmes enfants.

Cette analyse pose également le problème de la relation entre l'école, le lycée, l'université et le monde du travail ... En quelque sorte cette violence sociale de la société française à l'encontre de tous ceux qui ne sortent pas des plus hautes écoles prestigieuses de la République, ou ceux dont le nom de leurs parents ne leur ouvriront pas les portes de la réussite et du succès.

Les entreprises (et plus largement les employeurs, au premier rang desquels on trouve les administrations avec leurs concours élitistes) sont les premières responsables de l'image de dévalorisation des diplômes ressentie par les enfants, leurs parents voire par le monde de l'enseignement. Ce sont celles-ci, les entreprises, qui se servent des diplômes pour sélectionner et classifier leurs employés, pour décider de leur droit à travailler et de leur évolution de carrière, le plus souvent préétabli dès l'embauche. Ce sont elles qui relèvent peu à peu leur niveau d'exigence en fonction des curriculum vitae qui leur parviennent (ce en quoi elles se déclarent non responsables), dévalorisant de fait les diplômes (comme le baccalauréat) auxquels elles n'accordent plus d'importance.

Où sont réellement les responsabilités de la dévalorisation des diplômes et de l'image que les jeunes ont d'eux-mêmes ? Et y a-t-il faillite du système d'éducation français comme semble le dire certains contempteurs ?


Saucratès



01/11/2010
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